11/12/2019 europalestine.com  5 min #165830

Quand Raphaël Glucksmann se fait remettre à sa place...

Lettre de Salah Guemriche dans le journal Le soir d'Algérie, à la veille d'élections algériennes, et à alors que le parlement européen, qui ne s'en est jamais soucié jusqu'ici, vient de chapitrer le régime algérien, à l'initiative de Raphaël Glucksmann. (Extraits)


"Après avoir ignoré les désolations du peuple algérien durant tout le règne de Bouteflika, comme l'UE a de tous temps ignoré les malheurs du peuple palestinien, voilà que, soudain, la bonne conscience du Parlement européen se réveille !", écrit sans une "Lettre ouverte à Raphaël Glucksmann et aux eurodéputé-e-s", l'essayiste algérien.

À l'initiative de ce réveil, un député fraîchement élu, surgi de la Sarkozie (il était présent au fameux meeting du 29 avril 2007 du candidat de l'UMP), passé au macronisme avant d'opter pour une gauche en perdition : Raphaël Gluksmann. Il est dit que, jeune étudiant, il aurait fait un stage de sept mois au Soir d'Algérie ! Très original ! Mais on ne peut pas dire que cela lui ait servi à établir une juste hiérarchie des causes à soutenir...

Adepte du bienfondé de la guerre en Irak (avec la revue Le Meilleur du monde, organe des néo-conservateurs français), puis, contrat de mariage oblige (avec une ancienne vice-ministre de l'Intérieur de la Géorgie), soutien du Président géorgien (2008-2013), on le retrouve en mai 2019 sur une liste socialisante aux Européennes ! Plus convertible que ça, tu meurs !

C'est donc, à l'initiative de l'ancien conseiller du Président géorgien que votre Parlement vient de chapitrer le pouvoir algérien en le sommant de cesser les atteintes aux droits de l'Homme dont sont victimes les activistes ou les sympathisants algériens du Hirak. Belle et admirable initiative, certes. Mais, loin de faire oublier la bienveillance du Parlement à l'égard de la politique d'apartheid pratiquée au grand jour par l'État d'Israël, cette initiative met l'accent sur une exceptionnalité sans précédent dans l'histoire des relations internationales. La vérité est que, dans le sillage de l'ONU, l'UE s'est distinguée par sa discrétion dans la tragédie du peuple palestinien, ce qui revient à cautionner les manquements aux droits de l'Homme commis quotidiennement par l'État d'Israël : le sort de tout un peuple dépossédé, déshumanisé, forcé de survivre dans un camp de concentration à ciel ouvert, ce sort vous indiffère, Mesdames et Messieurs du Parlement ! D'où la question primordiale : pourquoi cette indignation sélective ? Et, subséquemment : pourquoi aujourd'hui ?

Vous préférez donc morigéner le régime algérien, croyant faire oublier votre silence assourdissant sur les forfaits que commet chaque jour et depuis plus d'un demi-siècle « la seule démocratie de la région » ! Faillite ou démission, l'Histoire retiendra que durant 71 ans, un peuple aura été abandonné comme jamais aucun autre peuple ne le fut depuis la dissolution de la Société des Nations (1946). Même dans leur grand malheur, les Juifs d'Europe avaient fini par recouvrer leurs droits, et par être indemnisés : historiquement, moralement, financièrement et territorialement. Cela ne vaut pas effacement, pour reprendre une formule biblique, de « l'abomination de la désolation » que demeure la Shoah. Sauf que, par l'indemnisation territoriale, l'ONU avait corrigé une abomination par une autre abomination, une injustice par une autre injustice : cela restera dans l'Histoire comme son péché originel, et pour l'Union européenne comme un crime de non-assistance à peuple en danger d'extermination.

Les génocides arménien, rwandais et kurde ont été caractérisés. Le peuple palestinien, lui, est en passe de subir le destin des « Amérindiens ». La différence, qui le sauvera de l'effacement de sa terre, c'est qu'à l'époque de la « conquête de l'Ouest », les opinions mondiales n'avaient pas les moyens d'être témoins des crimes contre l'humanité commis par les conquérants européens. Aujourd'hui, les peuples du monde savent, les leaders du monde savent, et nombre de citoyens d'Israël en témoignent, au risque d'une sanction devant laquelle l'excommunication de Spinoza ferait figure de bonnet d'âne !...

Pour le salut d'Israël, l'AIPAC, aux USA, et le Crif, en France, veillent. Sans compter le deux poids deux mesures appliqué honteusement par les médias français dès qu'il s'agit des exactions commises par Israël : toute dépêche évoquant un massacre de civils par les soldats israéliens est traitée comme une information facultative, alors qu'une attaque au couteau, par un adolescent palestinien, est traitée en ouverture par les J.T. Une adolescente palestinienne qui gifle un soldat de l'armée d'occupation écope de 8 mois d'emprisonnement, alors qu'un soldat israélien achevant un jeune Palestinien déjà à terre et ne représentant aucune menace est célébré par la population de Tel-Aviv comme un héros ! Des centaines de mineurs en détention et sans procès, subissant tortures et humiliations, c'est ce genre d'injustices qui, démultiplié, amena un ancien président de la Knesset, Abraham Burg, à faire à Israël un procès que l'ONU s'interdit de faire : « Il apparaît que ces deux mille ans de lutte du peuple juif pour sa survie se réduisent à un État de colonies, dirigé par une clique sans morale de hors-la-loi corrompus, sourds à la fois à leurs concitoyens et à leurs ennemis. Un État sans justice ne peut pas survivre (...) Le compte à rebours de la société israélienne a commencé. » !(1) (...)

Mesdames et Messieurs les eurodéputé-e-s, quelle est donc cette justice au nom de laquelle le Parlement se veut aujourd'hui garant des droits des peuples à disposer d'eux-mêmes, de tous les peuples sauf du peuple palestinien ? Le peuple algérien, celui qui manifeste depuis le 22 février 2019 contre la mafia indigène, vous dit : « Portez plutôt votre attention sur Gaza ; notre mafia, on s'en charge ! »

Article intégral sur : lesoirdalgerie.com

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