01/11/2025 ssofidelis.substack.com  8min #295027

Samhain, le Nouvel An celtique et Halloween

Par  Hugh J. Curran, le 31 octobre 2025

Orono, Maine - Les Celtes, qui vivaient il y a environ 3 000 ans dans une région qui correspond aujourd'hui à la Gaule (France), l'Irlande, le Pays de Galles, l'Écosse, l'Angleterre et la Bretagne, célébraient leur nouvel an selon le calendrier lunaire, vers la première semaine de novembre, mais il est désormais généralement associé à la veille du 1er novembre. Ce jour marquait la fin de l'été et des récoltes, ainsi que le début de l'hiver, une période associée à la fin des récoltes et à la chute des feuilles en automne.

MONDE LIMINAL : La nuit précédant le nouvel an (Samhain), la frontière entre le monde des vivants et celui des morts s'estompait. C'était un moment liminal, une période de flottement entre les deux mondes. On célébrait alors la venue des esprits des morts, et si les récoltes n'étaient pas encore engrangées à cette date, elles étaient gâchées par les Aes Sidh (les fées) et abandonnées aux pookas*.

ESPRITS DE L'AUTRE MONDE : On croyait que les esprits de l'autre monde se mêlaient à celui-ci, et autrefois, les druides et les poètes racontaient des histoires sur les origines du peuple celte en incarnant le rôle d'Amairgin, un poète chef des Milésiens, décrivant en détail l'arrivée des premiers colons en Irlande et en Écosse. On racontait les histoires des Tuatha De Dannan (le peuple de la déesse Anna), ainsi que les exploits héroïques de Cuchullan et Fionn Mac Cuill. On pratiquait la divination et les prophéties pour aider les villages à survivre à la longue obscurité hivernale. Les contes et la musique des longues soirées d'hiver apportaient un réconfort bienvenu jusqu'à l'arrivée du printemps (Beltaine, le 1er mai).

FEUX DE JOIE : Pour commémorer Samhain, de grands feux de joie étaient allumés, en particulier lors de cette journée de "fête du feu", où les gens se rassemblaient pour brûler les restes des récoltes et célébrer la fin de la saison des moissons. On faisait des offrandes aux divinités agricoles. On portait des costumes faits de paille ou de peaux d'animaux. Une fois les célébrations terminées, les feux de cheminée, éteints plus tôt dans la journée, étaient rallumés avec les braises du feu de joie du village. Ce geste resserrait les liens entre les villageois.

ROMAINS ET ANGLO-SAXONS : Au début du premier millénaire, les Romains ont conquis ce qui est aujourd'hui l'Angleterre, la Bretagne et le Pays de Galles. De nombreux rituels et cérémonies celtiques se sont alors perdus ou ont été oubliés, en particulier après l'invasion des Anglo-Saxons venus d'Allemagne au Ve siècle. L'Irlande et les Highlands écossais ont été épargnés par les attaques des Romains et des Saxons et ont su préserver les rites et cérémonies celtiques.

LA POMME : L'un de ces rites impliquait la pomme, vénérée comme un aliment d'un autre monde lors des quêtes mythiques vers les îles bénies des mers occidentales. Des rites modernes, tels que la pêche aux pommes et la sculpture de gros navets éclairés de l'intérieur, ont été adoptés à partir de ces récits d'aventures et de voyages. Au XXè siècle, les citrouilles ont remplacé les navets en Amérique du Nord et le port de costumes effrayants ou macabres avait pour but d'éloigner les démons pendant cette nuit des morts. La croyance veut qu'un humain portant un costume représentant la mort troublait les morts-vivants, qui présumaient qu'ils venaient eux aussi de l'autre monde et les laissaient tranquilles.

LA QUÊTE ÉTAIT UN VOYAGE HÉROÏQUE : Dans le monde celte, la quête des îles sacrées de la Pomme (Abal ou Avalon) était un périple héroïque. L'une des histoires de voyage préférées était celle du Voyage de Maelduin, dans laquelle une pomme magique fournissait une nourriture illimitée et pouvait nourrir un équipage de 18 personnes pendant plusieurs jours. Au cours de ce voyage, Maelduin fut emporté par la mer avant d'avoir pu trouver l'assassin de son père sur les îles jumelles chauves que le bateau dépassées. Cette tempête magique le propulsa, lui et son équipage, dans une spirale menant aux 33 îles des morts. Après avoir découvert des îles possédées par des démons, des îles où régnait le chagrin et d'autres où flottaient des éclats de rire, ils trouvèrent une île paisible gouvernée par des femmes. Après de nombreuses années qui leur semblèrent n'être qu'un bref instant dans ce monde à l'envers sur la mer, ils partirent et suivirent un faucon, pour finalement retrouver le chemin de l'Irlande, mais les habitants de leur village ne se souvenaient que de Maelduin et de ses hommes comme d'un lointain passé, et ils durent repartir. Mais Maelduin avait alors pardonné aux meurtriers de son père et ne chercha pas à se venger.

LE LIVRE CELTE DES MORTS : Ce voyage métaphorique a été qualifié par certains écrivains de "LIVRE CELTE DES MORTS" et a été reconstitué à l'époque médiévale sous forme de pèlerinage annuel. Le célèbre voyage de Brendan le Navigateur fut une quête similaire, à la recherche d'une île paradisiaque spirituelle, mais avec une touche chrétienne.

Illustration tirée de Heroes of the dawn [Mythologie irlandaise]. Violet Russell ; Beatrice Elvery, illustratrice. New York : The Macmillan Co. 1914.

ÎLES IMMORTELLES : Ces îles occidentales de l'immortalité portaient plusieurs noms, dont Tir-nan-og, ou "Terre de l'éternelle jeunesse", et Hy Brasil. Elles étaient considérées comme la patrie originelle des Tuatha De Danann (anciennes divinités de la nature) et on pouvait y accéder en voyageant vers l'ouest par la mer ou en passant par les portes des tumulus des Sidhe. À Tir-nan-Nog, le temps est suspendu, tandis qu'il passe si vite dans le monde des mortels. La légende d'Oisin, le fils de Fionn mac Cumhall, et de sa bien-aimée la fée Niamh, raconte qu'Oisin passa trois ans au royaume magique. Il revint finalement chez lui pour découvrir que trois cents ans s'étaient écoulés et qu'il n'était plus qu'un lointain souvenir pour les habitants. Lorsqu'il descendit de cheval et que ses pieds touchèrent la terre irlandaise, il reprit son âge de mortel.

TOUSSAINT : Au Vè siècle, une forme tolérante de christianisme s'est répandue dans toute l'Irlande, harmonisant les anciennes légendes et les rituels funéraires. Au VIIè siècle, des ermites et des moines celtes aventureux, tels que saint Columba d'Iona et saint Cianaidh (Kenny), s'installèrent sur des îles des hautes terres d'Écosse et, au VIIIè siècle, le pape Grégoire III désigna le 1er novembre comme "jour de la Toussaint", incorporant certaines des traditions du Samhain des Celtes. La Toussaint était également appelée All-hallows Eve, soit le jour des morts, et la nuit qui la précédait, la nuit traditionnelle de Samhain, dans la tradition spirituelle celte, a fini par être nommée All-hallows Eve, puis Halloween. Plus tard encore, en l'an 1000, l'Église a fait du 2 novembre, jour des morts, une journée de commémoration des défunts. Elle était célébrée de manière similaire à Samhain, avec de grands feux de joie, des défilés et des déguisements de saints, d'anges et de démons.

SAMHAIN = HALLOWEEN : Le dernier mois des récoltes dans l'année celtique. Autrefois, les anciens Celtes consacraient ce mois à la préparation de l'hiver et à la fête celte de Samhain, également connue sous le nom de "Féile na Marbh" (la fête des morts). Samhain (sough-wan) est célébré fin octobre et début novembre et signifie en gaélique "fin de l'été et début de l'hiver". Cette ancienne célébration de la vie sur la mort est l'occasion de se souvenir de ceux qui ont quitté le monde des vivants. Traditionnellement, des bougies sont allumées sur les tombes des ancêtres, tandis que des feux de joie sont allumés sur les collines environnantes. Lors de cette "nuit des ancêtres", la ligne ténue entre le monde des vivants et celui des morts disparaît.

Samhain marque le début de la saison hivernale et se termine six mois plus tard à Beltaine (Baltony) ou May-Day. Le soir, au crépuscule, on raconte des histoires et on joue de la musique, et le Seanachie (Shanachy) local raconte des légendes relatant les exploits des grands héros du passé : Lugh, Dagda, Fionn, Cuchullan, Deirdre, Etain et Manannan Mac Lir, etc., ainsi que les aventures et les voyages des Tuatha De D'annan (le peuple de la déesse Ana ou D'ana). Il existe plus de 300 histoires anciennes de ce type, et chacune d'entre elles nécessite une soirée pour être racontée. Ainsi, un Seanachie n'a pas besoin de répéter la même histoire pendant les six mois d'hiver jusqu'au 1er mai (Beltaine). La plupart des villages avaient leurs conteurs attitrés, héritiers d'un répertoire de mythes et légendes mêlant habilement bravoure et tristesse, chagrin et allégresse, tourments et joies.

Sanhain - se prononce sough-win /saʊ/, \ˈwɪn\

Dans la mythologie celtique, le triskell, ou triple spirale, représente le monde spirituel des ancêtres et le monde céleste du soleil, de la lune, des étoiles et des planètes. Il est considéré par beaucoup comme l'un des plus anciens symboles spirituels. Depuis ses origines pré-celtiques, il a été largement adopté dans l'art et l'architecture celtes. L'un des exemples les plus remarquables du triskell dans l'art se trouve à Bruig na Boinne (Newgrange), un ensemble archéologique situé en Irlande dans le Comté de Meath, un des plus grands et des plus importants ensemble de sites mégalithiques et préhistoriques d'Europe, composé de tumulus, de mégalithes et d'enclos préhistoriques datant du néolithique. Le triskell peut être interprété comme la force, le progrès et l'intention ou la la résilience face à l'adversité. Le motif en nœud fluide représente le chiffre celtique 3 (également sacré dans la numérologie indo-européenne) ainsi que des lignes sans début ni fin. Le chiffre 3 symbolise le temps - passé, présent et futur, les dieux - une fonction sacrée, une guerrière et une productive, trois catégories sociétales - les druides, les guerriers et les travailleurs, et les bases de la vie des Celtes - les dieux, la société et la nature.

* pooka : créature féerique de la tradition celte, en particulier en Irlande, dans l'ouest de l'Écosse et au pays de Galles. Elle a notamment inspiré le personnage homonyme de Puck dans la pièce de Shakespeare Le Songe d'une nuit d'été.

Traduit par  Spirit of Free Speech

 Hugh J. Curran enseigne les "études sur la paix et la réconciliation" à l'université du Maine depuis 20 ans.

 juancole.com

 ssofidelis.substack.com