23/09/2025 dedefensa.org  5min #291386

 L'attaque israélienne à Doha: la fin des refuges sûrs dans un Moyen-Orient multipolaire

Déconstructuration à Doha

 Journal dde.crisis de Philippe Grasset  

23 septembre 2025 (16H00) – Je me réfère ici au texte publié ce même jour par notre contributeur Peiman Salahi, qui développe une  conception brillantissime de l'interprétation de l'attaque israélienne sur Doha. Ce que Salahi décrit lorsqu'il développe son interprétation, c'est bien ce que nous nommons une  déconstructuration de principes et de règles essentielles telles que les impératifs de la diplomatie de la civilisation occidentale, – c'est-à-dire, du Système.

« D'un point de vue civilisationnel, l'attaque souligne les limites de l'universalisme occidental. Israël, en tant qu'avant-poste de l'Occident au Moyen-Orient, a clairement fait comprendre que la survie de son hégémonie prime sur le respect de la souveraineté, de la diplomatie ou du droit international... »

« L'attaque israélienne contre Doha doit être comprise comme un tournant. Il ne s'agit pas seulement du Hamas ou du Qatar; il s'agit des fondements ébranlés d'un système international où la diplomatie bénéficiait autrefois de sanctuaires... »

« En résumé, la guerre est entrée à Doha non pas à coups de roquettes ou de troupes, mais parce que l'architecture même de la diplomatie a été bombardée...»

Il s'agit d'une interprétation qui décrit une situation opérationnelle très avancée de la déconstruction et de de la déstructuration (déconstructuration) du Système. L'attaque israélienne est directe et d'une puissance considérable, elle se moque absolument de toutes les règles essentielles de la diplomatie, elle les ridiculise avant de leur faire subir un sort fatal. Elle opère cette opération vitale sans la moindre précaution, sur un objectif qui est totalement intégré dans les caractères structurants du Système, qui en est même comme un achèvement proche de la perfection :
• d'une part, implication directe et extrêmement importante de Doha dans le dispositif militaire US ;
• d'autre part, statut du Qatar comme triomphe absolu de la modernité occidentale, comme intégration financière, technologique, de communicationnel et humaine dans le Système ;
• tout cela, dans un milieu social et ethnique qui n'est nullement occidental à l'origine, donc totalement une conquête du Système.

... En d'autres mots : s'il y a un pays, un lieu, une conception géopolitique et sociale qu'il faut respecter pour protéger le Système, c'est à Doha et au Qatar qu'on les trouve dans toute leur exemplarité. Mais non, c'est là que les Israéliens ont justement frappé, détruit, déconstruit et déstructuré. Pour eux, seule compte l'efficacité de leur brutalité extrême, de leur puissance déchaînée, de leur dessein qu'ils proclament d'inspiration divine, de leur sens inné de l'illégalité, et ils ne se sentent aucune solidarité ni aucun devoir avec ce fleuron du Système qu'est le Qatar.

Il faut alors poursuivre notre raisonnement en observant combien cette attaque de Doha à la lumière de l'interprétation de Salahi rejoint un de nos principes essentiels de notre réflexion, résumé sous la forme imagée d'une équation renvoyant à un phénomène largement sollicité pour décrire l'effondrement de notre civilisation, du Système, sous la poussée ultime du «  déchaînement de la Matière » : l'équation surpuissance = autodestruction. Le concept est largement présent dans nombre de nos textes (226 textes référencés avec les deux mots), le concept de surpuissance était opérationnalisé essentiellement par la " politiqueSystème". On peut le retrouver notamment dans le ‘Glossaire.dde' sur " l'effet-Janus".

On retrouve également dans un texte du  19 janvier 2024 une description du maximalisme israélien vers le "politiqueSystème" (la surpuissance), y compris l'anecdote révélatrice qui place Biden comme le principal responsable du quitus qui fut donné (en 2010) à Netanyahou, – contre les instructions d'Obama, – de poursuivre sa "politiqueSystème" en Palestine, selon une dynamique qui conduirait jusqu'au désastre actuel, où l'on distingue déjà le phénomène de l'autodestruction :

« Il est évidemment sympathique et prémonitoire que, d'une part l'un des facteurs fondamentaux renforçant la  politiqueSystème soit le gouvernement israélien d'alors, déjà « nétanyaousé" ; et d'autre part, dans l'épisode de 2010 rapporté par Alastair Crooke, que ce soit Biden qui ait saboté une tentative d'Obama de contraindre les Israéliens à avoir une conduite plus acceptable... Ils étaient déjà tous là et le sort en était déjà jeté. »

« On a bien compris que le Système, mystérieuse émanation de forces suprahumaines accoucheuses du «  déchaînement de la Matière », entend imposer cette force surpuissante de la  politiqueSystème de et à l'Occident-récréatif jusqu'à ce qu'autodestruction s'ensuive. On peut alors ne pas craindre une seconde de dire qu'en bien des occasions, c'est Biden lui-même qui est allé et qui va gaillardement au-delà des avis de ses conseillers bien entendu-neocon et qui apparaissent bien médiocres à la lumière fulgurante du Chef-en-action. C'est lui, le premier... [...] c'est lui qui s'est précipité à Tel Aviv pour annoncer à Netanyahou qu'il soutenait à fond sa politique de liquidation des Palestiniens. »

Ces différentes citations rappellent opportunément qu'Israël et Netanyahou sont évidemment les instruments idéaux du déchaînement de la surpuissance de la politiqueSystème, donc qu'ils sont les artisans privilégiés de la démarche menant à l'autodestruction. Il n'y a qu'eux, Israël et Netanyahou, qui étaient capables d'appliquer si parfaitement l'équation surpuissance = autodestruction en attaquant Doha

C'est chose faite et nous attendons la suite. Il ne faut à aucun prix désespérer de ‘Bibi'.

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