12/06/2025 mondialisation.ca  14min #280952

Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes

Par  Dominique Muselet

Le titre de cet article est une citation faussement attribuée à Bossuet. En fait, c'est une reformulation, plus courte et plus claire (ce qui explique son succès) de ce qu'a vraiment écrit Bossuet :

« Mais Dieu se rit des prières qu'on lui fait pour détourner les malheurs publics quand on ne s'oppose pas à ce qui se fait pour les attirer. Que dis-je ? Quand on l'approuve et qu'on y souscrit, quoique ce soit avec répugnance. »

Bossuet était un contemporain de Baruch Spinoza à qui on aurait pu tout aussi bien attribuer cette citation apocryphe.

Jacques-Bénigne Bossuet

Spinoza (1632-1677) est à la philosophie ce que Mozart (1756-1791) est à la musique. Sa pensée est, comme la musique de Mozart, lumineuse, limpide, décisive.

Statue du philosophe néerlandais Baruch Spinoza à La Haye

Les deux génies ont été des enfants prodiges et ont atteint leur maturité très tôt. A 23 ans, Baruch Spinoza a été excommunié à vie par la communauté juive d'Amsterdam, dont il faisait partie, pour cause d'hérésie. Son crime était de ne pas croire au dieu anthropomorphique et aux miracles de la Bible. Désormais seul dans la vie et décidé à le rester, il a passé sa courte et édifiante vie à expliquer en latin sa vision du cosmos, de la création et de dieu, tout en polissant des lentilles pour gagner son pain.

Dieu, pour lui, c'est la nature, le cosmos ou plutôt la substance du Cosmos. Tout ce qui existe est Dieu, puisque tout ce qui existe fait partie de l'univers. On sait que l'univers, qui est à ses yeux la forme visible de Dieu, n'a ni début, ni fin, ni but, et qu'il fonctionne selon des lois naturelles incontournables qui nous échappent souvent. Par conséquent Dieu, qui est sa substance, est éternel et infini, mais contrairement à ce que prétendent les religions monothéistes, il n'a pas de projet sur le monde, ni sur l'humanité, et il ne fait pas non plus de miracles. Le raisonnement de Spinoza est imparable : vous dites que Dieu a créé l'univers et les lois qui le régissent, alors pourquoi Dieu enfreindrait-il les lois qu'il a lui-même créées ? Dieu se contredirait-il ? Si nous croyons aux miracles, conclut-il, c'est que nous ignorons encore les lois naturelles qui régissent la plupart des phénomènes que nous observons.

Ce n'est pas l'univers, donc pas Dieu, qui a besoin de sens, nous dit Spinoza, c'est nous. C'est nous qui avons besoin de comprendre et de nous projeter dans l'avenir. C'est nous qui avons des projets. C'est nous qui aimerions être protégés et dirigés par un dieu, de préférence bienveillant, qui sait où il va. Personnellement, j'attribue ce besoin d'un dieu à notre image mais infiniment puissant, à l'angoisse de la mort, cette angoisse existentielle que les religions et les états utilisent pour assoir leur pouvoir.

‘Baruch Spinoza, né le 24 novembre 1632 à Amsterdam et mort le 21 février 1677 à La Haye, est un philosophe néerlandais d'origine séfarade. Il est, avec  René Descartes et  Gottfried Wilhelm Leibniz, l'un des principaux représentants du rationalisme. » ( misterprepa.net)

Spinoza démontre que l'univers, et tout ce qu'il contient, est en réalité régi par la causalité, la relation de cause à effet : « D'une cause déterminée résulte nécessairement un effet ; et, inversement, si aucune cause déterminée n'est donnée, il est impossible qu'un effet se produise ». Le monde n'a donc pas de finalité, il est la conséquence implacable et irréversible des développements précédents. Tout ce qu'il contient, les êtres vivants y compris, sont régis par ce même principe de cause et d'effet. Nous ne sommes libres que dans la mesure où nous en sommes conscients car alors nous pouvons prendre une certaine distance avec ce déterminisme, vivre dans la joie (satisfaction) et même atteindre la béatitude. Pour Spinoza, selon  Sciences humaines « La joie n'est autre que l'augmentation de cette puissance d'agir, l'accroissement de cette vie en nous (la tristesse est sa diminution). Le bien n'est donc pas une valeur qui transcende la vie, et permet de la juger : il n'est autre que ce qui est bon, ce qui nous donne la puissance de persévérer en notre être ».

Spinoza ne s'est pas contenté de le dire, il l'a fait. Tous ceux qui l'ont connu en témoignent.

L'imparable et irréfutable démonstration de Spinoza, basée sur l'observation rationnelle de la réalité, était si révolutionnaire, qu'alerté par son excommunication suivie d'une tentative d'assassinat, il n'a pas fait publier ses livres de son vivant.

La volonté populaire, asile de l'ignorance

Plus je m'imprègne de sa vision du monde, plus j'ai l'impression qu'elle s'applique peut-être encore plus à notre époque qu'à la sienne, car, dans notre société soi-disant laïque, les croyances irrationnelles, les superstitions, ne se cantonnent plus aux religions, elles ont envahi tous les domaines, le militaire (il faut croire que la Russie est à nos frontières, prête à nous envahir), l'économie (il faut croire aux vertus du marché libre), la science (il faut croire au progrès technique), la médecine (il faut croire aux vertus des vaccins), la politique (il faut croire aux bonnes intentions, à défaut de compétence, de nos dirigeants), la justice (il faut croire à son indépendance) l'art (il faut croire à sa gratuité), la sociologie (il faut croire à son objectivité), la psychologie (il faut croire qu'elle peut tout régler), la vie quotidienne (il faut croire qu'on a bien de la chance de vivre en France et que c'est pire ailleurs) et je vous passe les croyances obligatoires sur le climat, le genre et les minorités. Et vous dites que les faits démontrent le contraire, c'est que vous êtes un complotiste d'extrême-droite et un ennemi de la République !

Capture d'écran. Sur quoi repose le complotisme ? ©Getty – Moor Studio

Spinoza disait que « la volonté de dieu », que les pouvoirs religieux invoquent pour tout faire accepter aux croyants, est « l'asile de l'ignorance », eh bien on pourrait dire qu'aujourd'hui « la volonté du peuple » que brandissent, pour tout nous faire accepter, les soi-disant démocraties et leurs institutions de contrôle : assemblées nationales, Conseil Constitutionnel, Conseil d'Etat, partis politiques, instances académiques, Conseils des Ordres (médecins, infirmières, avocats, etc.), instances médiatiques, autorités scientifiques, économiques, militaires, est pareillement l'asile de l'ignorance.

Elles forment toutes ensemble un système prédateur, piloté par les puissances d'argent, où règne le même arbitraire en matière de vérité que dans les religions que combattaient Spinoza et Leon Tolstoï. C'est de ce système, qui s'abrite derrière la volonté populaire, que jaillit la Vérité que la population est sommée de croire, sinon il lui en cuira ! Et pour être sûrs que les gens croient leurs mensonges de plus en plus invraisemblables, de plus en plus déconnectés de la réalité, sur les guerres, le climat, l'immigration, l'insécurité, l'économie, les sexes, les minorités, l'IA, le transhumanisme, le progrès, les ennemis désignés, l'utilisation de leur argent, l'euthanasie, bref sur absolument tout, ils s'assurent qu'en plus d'avoir peur, ils ne comprennent rien à ce qui se passe, absolument rien…

L'Info s'éclaire ou comment ramollir le cerveau des Français

On a assisté à un exercice de ramollissement de cerveau de ce type dans l'émission l'Info s'éclaire (comprendre le contraire !) du 12 juin 2025 sur France inter, où on commentait l'assassinat au couteau de Mélanie G., une surveillante du Lycée Françoise Dolto à Nogent, par un collégien de 14 ans. Un assassinat particulièrement spectaculaire puisqu'il s'est déroulé sous les yeux ébahis d'une dizaine de policiers en train de fouiller les cartables des élèves qui arrivaient.

Les soi-disant journalistes et habituelles sangsues de plateaux s'attardaient avec complaisance sur la supposée sidération (cela fait 30 ans que les services de sécurité alertent mais, comme ils ont interdit les statistiques, ils peuvent continuer à faire semblant d'être sidérés) et supposée impuissance du gouvernement (qui détient absolument tous les pouvoirs).

Macron, qui n'a honte de rien, a parlé d'instrumentalisation de « faits divers » et Bayrou, qui donne chaque jour plus de signes d'imbécilité congénitale, a évoqué en bégayant une soi-disant « culture du couteau ». Tous les gens qui sont censés diriger le pays ont, sans vergogne, déploré le crime comme s'il s'agissait d'une catastrophe naturelle dont ils étaient autant victimes que la pauvre surveillante qui sera aussi vite oubliée que le malheureux Elias, et ont cyniquement avancé les solutions habituelles dont on sait qu'elles ne marchent pas ou sont carrément impraticables: portiques à l'école, kit de repérage des élèves en difficulté mentale sans infirmières pour d'en servir, vote de lois inapplicables car les moyens manquent ou qu'elles sont en contradiction avec le droit européen…

Evidemment, personne sur aucun des plateaux ne s'est interrogé sur les causes des effets que ces hypocrites malfaisants déplorent, puisque leur travail est justement de les cacher pour protéger les puissants qui les rémunèrent généreusement…

Si après ce lavage de cerveau permanent, à base de crétineries mensongères arrosées d'une bonne dose de mépris de classe, Fes français réfléchissaient encore, là ce serait un miracle…

Heureusement il y a les médias alternatifs !

Sur les médias alternatifs, il y a un effort méritoire pour analyser les causes de la rapide dégénérescence de la France et pour donner la parole aux victimes de la Caste.

Dans la matinale de Tocsin du 10 juin des éleveurs de bovins de Dordogne expliquaient que les services vétérinaires les menacent d'un abattage total de leurs troupeaux soi-disant pour cause de tuberculose, alors que les tests ne sont pas plus sûrs que ceux du Covid. Le scandale, c'est que cela permettra aux gros industriels de la viande, Charal et Bigard de racheter les bêtes abattues à vil prix avant de les remettre dans la chaîne alimentaire normale. Ce qui signifie que les bêtes qui sont considérées comme malades quand elles sont chez les éleveurs ne le sont plus quand elles sont dans les usines de Charal et Bigard. Coup double des grands groupes sur le dos des éleveurs ! Grâce à Tocsin, on clairement que les services vétérinaires, sur l'ordre de Macron and Co, travaillent pour Charal et Bigard.

Source :  France Bleue

Toujours sur Tocsin, le 11 juin, Jean-Vincent Chantreau, Secrétaire général de l'Union française des pêcheurs artisans (UFPA) vient expliquer que le gouvernement veut interdire aux petits chalutiers français d'utiliser le chalut alors que la dizaine de chalutiers industriels qui bénéficie de puissants soutiens à l'UE ne sera pas soumise à la mesure. Pour ne pas être dérangé par les protestations de ses victimes, Macron leur a interdit l'accès au Sommet des océans à Nice, et le port de Nice a même été vidé des petits bateaux de pêche. Ici encore, on voit clairement que l'UE et Macron travaillent pour les gros industriels de la pêche aux dépens des artisans pécheurs.

Dans la série, l'union fait la force, l'UFPA (Union française des pêcheurs artisans) a décidé de se joindre au Mouvement des Gueux, lancé par Alexandre Jardin, qui vient d'obtenir l'annulation des iniques Zones à faible émissions (ZFE) et à la Coordination rurale qui se bat contre la liquidation des petits exploitants agricoles au profit des grands groupes.

Le tapage en gare, une infraction inventée pour verbaliser un jeune chanteur

Des agents de la SNCF ont inventé une infraction, le tapage en gare, pour pouvoir mettre une amende de 60 € à un jeune qui revenait du pèlerinage de Chartes. Il chantait avec ses amis mais il est le seul à avoir été sanctionné au motif qu'il avait «regardé» les agents de la SNCF en chantant. Cela montre, s'il en était besoin, l'arbitraire, le double standard ainsi que le sentiment de puissance et d'impunité des organes de contrôle français. Sans compter que ces agents corrompus et lâches n'auraient jamais osé faire la même chose aux supporters de foot, qui pourtant se livrent à des tapages en gare bien plus bruyants…

L'Etat français, c'est contrôle partout, justice nulle part, s'indigne Alexandre Cuignache. L'Etat tape sur les bons citoyens et épargne les autres. Les agents SNCF, RATP et autres auraient même pour consigne de repérer au facies le gens solvables pour leur mettre des amendes. Cuignache raconte qu'il a pris une amende pour avoir fumé sur le quai de gare en plein air et qu'un peu plus tard, dans le train, il est tombé sur une bande de jeunes qui fumaient des joints en toute impunité. Dans le train Paris-Calais, j'ai personnellement vu des contrôleurs laisser voyager gratuitement des migrants alors qu'ils contrôlaient tous les autres passagers.

Un régime qui applique le droit selon son bon plaisir, c'est une tyrannie, conclut Alexandre Cuignache.

youtube

Gaza : Rima Hassan rend hommage à Larbi Ben M'hidi, symbole éternel

Une eurodéputée française d'origine palestinienne, Rima Hassan, a embarqué avec Greta Thunberg pour briser le blocus israélien sur Gaza. Ce geste fort s'inspire directement de Larbi Ben M'hidi, figure emblématique de la révolution algérienne.

Leur navire a été intercepté par les autorités israéliennes, provoquant une vague d'indignation en France et ailleurs. Cette vidéo revient sur cette opération symbolique, le message puissant de Rima Hassan, les réactions politiques en France et en Algérie, et les parallèles frappants entre les luttes de libération passées et les combats actuels.

En hommage à Gaza, voilà, pour finir, la Dabke palestinienne

Pendant longtemps, j'ai parlé avec admiration de la résilience des Palestiniens, qui réussissaient à survivre sous la botte cruelle et sans merci de l'occupant israélien, mais maintenant j'ai l'impression que ce n'est plus possible de parler de résilience à un peuple livré par mon pays, entre autres, à des colons déchaînés et surarmés par nos soins, des colons acharnés à détruire le peuple dont il a volé la terre par tous les moyens possibles et imaginaires, des colons dont le fanatisme, la perversité, le sadisme et la férocité n'ont pas de limites.

La résilience suppose un minimum de liberté de choix, un espace de volonté, quelques moyens de résistance, un peu d'espoir de délivrance. Mais ils n'ont plus rien de tout ça, ils sont réduits à l'état de squelettes ambulants pourchassés par les bombes, des gangs et des soldats assoiffés de sang dans un camp de concentration qui n'a rien à envier à ceux des nazis, qui, au moins, ne parlaient pas ouvertement d'exterminer les juifs jusqu'au dernier comme le fait ouvertement cette  Israélienne.

Et pourquoi se priverait-elle puisqu'elle est assurée de l'impunité par des puissances occidentales déterminées à maintenir coûte que coûte leur proxy israélien au Moyen Orient, pour tenter de garder, sur les flux d'énergie, un contrôle qui leur échappe. L'illusoire hégémonie occidentale vaut bien un génocide, sans doute !

Il y a d'ailleurs de grandes chances que la plupart des jeunes qui dansent la dabke dans la vidéo soient morts… (Voir la vidéo en cliquantICI )

Danseurs palestiniens devant le Mur à Gaza. Inscrit en 2023 ( 18.COM) sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité : « La dabkeh est une danse de groupe en Palestine qui s'accompagne d'instruments à vent traditionnels et de chants populaires. La dabkeh est interprétée par onze danseurs, indépendamment de leur genre et de leur âge, lors de festivals, de célébrations et d'événements tels que les mariages et les remises de diplômes. » ( Unesco)

Dominique Muselet

Montreuil, le 12 juin 2025

Image en vedette : Jeune fille gazaouie dansant la dabkeh devant le mur entre la bande de Gaza et Israël. (Capture d'écran de la vidéo)

La source originale de cet article est Mondialisation.ca

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