par Mohamed Ghermaoui
Généralement dans les opérations militaires, pour conjurer le mauvais sort, détourner et dissiper les menaces et les dangers, on simule des dérivatifs et des diversions pour détromper l'ennemi et le détourner des vraies manœuvres. Le but est de l'embarquer dans l'embrouillement, l'emmêlement et l'incertitude et d'emporter son attention à la dérive des enjeux authentiques. Conscients de cette tactique, les deux protagonistes ont intérêt à bien réfléchir leur conception et leur mise en exergue pour assurer leur réussite. Ce n'est pas facile.
Il n'y a aucun doute qu'en parallèle, d'autres objectifs intermédiaires sont étudiés et établis dans la stratégie globale censée être cohérente. L'opération militaire spéciale (OMS) décidée par la Russie, sans aucun doute provoquée (l'encerclement de la Russie, l'opération Maïdan,...) et réfléchie par l'Occident téléguidé par les USA, n'échappe certainement pas à cette assertion.
En fait, la Russie s'est bien préparée à cette perspective, beaucoup plus intelligemment que les Occidentaux. La Russie a bien préparé aussi bien le plan militaire qu'économique. Le résultat est probant et les données de la situation actuelle le confirment. Les dernières déclarations de Poutine concernant la détention de la Russie de nouvelles armes beaucoup plus dangereuses que les armes nucléaires et qui n'obéissent nullement aux normes classiques de la physique ont fait trembler certains esprits.
Certes, la situation actuelle est très bien renseignée auprès des sources fiables et crédibles. Mais pour entrevoir l'évolution et les perspectives de cette guerre à travers le scénario qui nous paraît le plus probable, essayons de planter le décor via les faits qui nous paraissent les plus révélateurs. L'approche scénaristique l'exige.
1. Le train des sanctions imposées par les occidentaux pour affaiblir et émietter l'économie russe a eu des effets boomerang. Nous avons plutôt assisté à une performance sans égale de l'économie russe ces deux dernières années. Certes les premiers mois ont été plus ou moins durs, mais il a suffi d'implanter quelques ajustements pour réguler et désencrasser la machine.
2. L'OMS a divulgué l'inefficacité et la défaillance de l'armement occidental et en particulier celui des EU.
3. La dernière contre offensive s'est conclue sans réussite significative et a causé beaucoup de pertes humaines et matérielles aux Ukrainiens et leurs collaborateurs.
4. la quasi-totalité des pays ne font plus confiance aux USA et leurs larbins, ni à leur narratif (y compris leurs médias) ni à leurs promesses.
5. Des regroupements de nations se dessinent de plus en plus consistants dans le Monde (le BRICS élargi, l'OCS, l'UEE,...). Des préparatifs sont en demeure pour agréger toutes ces entités.
6. L'émergence de nouvelles économies de plus en plus performantes s'applique et s'impose en termes de choix géopolitiques et géostratégiques (l'Iran, la RPDC, la Turquie,...). En général, ces nouvelles nations sont en phase plutôt avec la Russie et la Chine.
7. L'excentricité, l'élucubration, le nombrilisme et la condescendance des occidentaux ont généré et provoqué des ulcérations et de la rébellion chez ceux qui ont subi longtemps leurs allégations. L'expression «on en a marre» s'entend fort et partout.
8. La confrontation de deux visions du monde radicalement opposées se profile et se manifeste amplement à tous les niveaux. La première lutte pour la souveraineté et l'émancipation des nations. La deuxième s'accroche à ses habitudes hégémoniques pour continuer à massacrer et à piller les moins forts pour les affaiblir et les mettre à genoux. Le premier bloc est animé par la Russie et la Chine. Le deuxième, of course, par les USA et leurs pantins/laquais.
9. Les Occidentaux et leur maître continuent à réfuter la réalité, concernant bien sûr ce qui se passe en Ukraine, et arrivent mal à la digérer. Pourtant la suprématie de la Russie à tout égard est plausible, mais apparemment les Occidentaux n'ont pas pu avaler la pilule et admettre cette réalité et du coup, arrivent mal à l'endogénéiser.
Certes d'autres fresques peuvent être relatées pour aider à concocter le scénario probable. Mais, nous avons essayé d'énumérer celles qui nous paraissent les plus pertinentes/déterminantes. Tout se discute bien sûr. Ça reste une lecture parmi d'autres. À chacun de forger sa propre opinion comme disait l'autre.
Comme chacun sait, dans une guerre, les objectifs stratégiques sont souvent tacites et camouflés. Mieux encore, et pour mener l'adversaire à des fausses supputations et l'induire en erreur, on simule des situations et des faits dérivatifs.
La Russie avance doucement mais sûrement, elle adopte ainsi la politique step by step. En arabe, on dit «اضرب وقيس», c'est à dire «frappe et jauge». Elle donne l'impression qu'elle n'est pas pressée. Elle ne l'est pas effectivement. Mais la question, c'est pourquoi? C'est ce qu'on va essayer d'expliquer ci-après.
Je pense tous simplement que l'objectif plutôt les objectifs majeurs de la Russie et de la Chine sont loin, très loin de ce qui se passe sur le terrain en Ukraine. Tout ce qui se passe en Ukraine n'est que du sous poudrage et de l'enfumage. Certes les deux blocs sont en train de se tester, de se jauger et du coup de s'évaluer, d'ajuster et de se perfectionner. Mais les enjeux sont ailleurs.
Les objectifs stratégiques de la Russie et de la Chine c'est essentiellement.
1. La dédollarisation de l'économie mondiale. La cible c'est Breton Woods et ses subsides (FMI, BM,...).
2. L'instauration d'un nouvel ordre mondial. Un ordre multipolaire basé sur de nouveaux critères.
3. La lutte contre l'hégémonie des USA. Cette hégémonie abusive qui est souvent utilisée pour saper les nations faibles et profiter de leur richesse.
La Russie sait que ces objectifs sont de nature lourde et de facto nécessitent du temps. Par ailleurs, la Russie ne veut pas écraser totalement l'Ukraine, l'étrangler complètement, comme le souhaitent pas mal de camarades sur ce site. La Russie est en mesure de le faire, mais ça ne fait pas partie de ces options stratégiques. La Russie n'a pas du tout envie d'envahir les régions antirusses. Ce n'est pas un hasard si la Russie n'a connecté que les régions prorusses.
La Russie va continuer sa guerre d'attrition, sans pour autant sacrifier ses hommes et ses citoyens. Elle va continuer sa politique step by step et ne va nullement enfoncer le clou. Le but est d'user l'adversaire sur tous les plans (militaire, économique, hégémonique,...) pour l'emmener à rebrousser le chemin et à capituler avec ses conditions.
De l'autre côté, les Occidentaux ne vont pas céder et baisser l'échine facilement. Au contraire, ils vont jouer la carte de l'escalade et ils vont sortir leurs crocs pour qu'ils puissent mordre et s'accrocher ardemment pour faire perdurer leur hégémonie. Leur narcissisme et leur orgueil vont les amener à faire des choix certainement irrationnels et catégoriques, voire même suicidaires. Et c'est ce qu'ils sont en train de faire, plus d'aides financières et plus d'armes sophistiquées et bien sûr plus d'engagement.
Nous avons en face deux antagonistes qui campent sur leur position. L'un ne peut pas accepter de perdre cette guerre. C'est une guerre existentielle pour lui. L'autre ne peut pas céder sa place hégémonique sous n'importe quel subterfuge. D'autant plus, qu'ils croient que leur hégémonie ne peut perdurer que par le déclenchement des guerres.
Selon ces appréciations, le scénario le plus probable, c'est que la guerre va durer longtemps, très longtemps. Mieux que ça, d'autres guerres vont bientôt se déclencher. Ces nouvelles guerres seront plus explosives, foudroyantes et frénétiques. Les prémices de ces guerres sont déjà en lice et laisse entrevoir une perspective cataclysmique.