
Par Richard Drake, le 15 novembre 2025
Les sanctions américaines contre Francesca Albanese témoignent de son courage à défendre la cause palestinienne.
Le 9 juillet dernier, l'administration Trump a imposé des sanctions à Francesca Albanese. Le décret 14203 a inscrit la rapporteure spéciale des Nations unies sur les droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés par Israël, âgée de 48 ans, sur la liste des "ressortissants faisant l'objet de mesures restrictives" et a ainsi interdit aux citoyens et aux entreprises américains d'entretenir tout lien avec elle. Le secrétaire d'État Marco Rubio a déclaré que :
"La campagne de guerre politique et économique menée par Albanese contre les États-Unis et Israël n'est plus tolérée. Nous soutiendrons toujours nos alliés dans leur droit à l'autodéfense".
Le même mois, la huitième édition du livre d'Albanese, J'accuse, publié en 2023, a été publiée. Disponible uniquement en italien, le livre présente les accusations d'Albanese sur les crimes de guerre israéliens en cours à Gaza, qui ont déclenché l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023. Son titre est inspiré du célèbre article publié en 1898 par le romancier français Émile Zola. Ce dernier appelait à "la vérité avant tout" dans l'affaire du capitaine de l'armée juive Alfred Dreyfus, faussement accusé de trahison. Albanese formule la même exigence de vérité concernant le génocide actuel à Gaza.
Titulaire d'un diplôme en droit international et en droits humains de l'université de Pise et de la London School of Oriental and African Studies, berceau du décolonialisme, elle a vécu en Palestine de 2010 à 2012. Elle a écrit de nombreux articles sur la question israélo-palestinienne, notamment dans l'ouvrage Palestinian Refugees in International Law, qu'elle a coécrit avec Lex Takkenberg. Sa nomination au poste de rapporteure spéciale des Nations unies, en mai 2022, l'a quotidiennement confrontée à la détérioration de la situation à Gaza.
Droit international
Dans J'Accuse, elle replace la guerre de Gaza dans son contexte historique en remontant à la déclaration Balfour de novembre 1917, lorsque le gouvernement britannique a annoncé son soutien à la création d'un "foyer national pour le peuple juif". Elle se concentre sur la période qui s'étend de 1948, année de la fondation d'Israël - pour les Palestiniens, la Nakba, soit la catastrophe - à nos jours. Un autre point chronologique essentiel porte sur l'occupation des territoires palestiniens par Israël à partir de 1967. Le blocus de Gaza par Israël pendant seize ans fait également l'objet d'une analyse approfondie pour mieux saisir l'ampleur de l'agression actuelle.
Le livre s'articule autour de l'interview de Francesca Albanese par le journaliste Christian Elia, et évoque notamment le terrorisme. Francesca Albanese rappelle qu'il n'existe pas de consensus sur la signification du terme. Plus de 150 définitions y ont en effet été consacrées. Le terrorisme est généralement considéré comme une violence criminelle ou immorale dont le but est politique, mais qui décide de ce qui est moral ou immoral ? Les victoires militaires et politiques ont toujours conféré un avantage aux vainqueurs pour établir la distinction entre terroristes et combattants de la liberté.
Albanese condamne le Hamas pour avoir massacré des non-combattants innocents et pris des civils en otage. Elle réitère ces accusations à plusieurs reprises dans le livre.
Évitant le terme "terrorisme" en raison de ses connotations politiques, elle évalue les événements du 7 octobre à la lumière du droit international consacré dans les conventions adoptées à Genève et à La Haye. Sur cette base, elle condamne le Hamas pour avoir perpétré ces actes. Elle réitère ces accusations à plusieurs reprises dans son ouvrage.
En vertu des mêmes normes juridiques, les attaques militaires aveugles d'Israël contre la population civile palestinienne sans défense à Gaza constituent indubitablement des crimes de guerre. Les crimes du Hamas auraient dû être jugés par un tribunal indépendant et non punis par le déploiement de la puissance de feu israélienne contre des civils. De plus, immédiatement après l'attaque du Hamas, Yoav Gallant, alors ministre israélien de la Défense, a déclaré que l'aide humanitaire essentielle serait coupée, notamment l'électricité, la nourriture, le carburant et l'eau, pour les habitants de Gaza. Israël ferait face à des "animaux humains", a déclaré Gallant, et réagirait en conséquence.
J'Accuse témoigne de la vision déshumanisante des Palestiniens sous la domination israélienne, tant à Gaza qu'en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Ils ont subi divers degrés de persécutions de la part du gouvernement et des colons israéliens radicaux établis dans les colonies. Elle cite le secrétaire général de l'ONU, António Guterres, qui affirme que les déprédations du Hamas "ne sont pas le fruit du hasard". Cinquante-six ans d'occupation impitoyable ont pavé la voie au 7 octobre. Guterres a également condamné le Hamas pour ses crimes contre des civils innocents, mais personne n'aurait dû être surpris par l'explosion inévitable de colère résultant de l'occupation illégale d'Israël et de son système cauchemardesque de checkpoints militaires.
Les Palestiniens vivent manifestement dans des conditions d'apartheid, les citoyens juifs bénéficiant de lois et de privilèges spéciaux. Deux systèmes juridiques différents sont en vigueur dans les territoires palestiniens : la juridiction civile pour les colons et les soldats, et la juridiction militaire pour les Palestiniens. Les Arabes israéliens vivant en Israël proprement dit ne jouissent pas non plus des mêmes droits que les citoyens juifs du pays. Selon Mme Albanese, aucune alternative rationnelle ne saurait se concevoir sans le démantèlement de l'hégémonie sioniste au profit d'une véritable démocratie, laquelle doit garantir l'égalité des droits pour tous.
Elle a pris ses fonctions à l'ONU l'année précédant l'attaque du Hamas. Elle a été témoin d'une "intensification alarmante de la fréquence et de la brutalité des attaques militaires israéliennes". Elle donne la parole aux deux ministres les plus extrémistes du gouvernement de Benjamin Netanyahu, Itamar Ben-Gvir et Bezalel Smotrich, à propos de leurs activités illégales liées à l'expansion des colonies et aux projets d'annexion pure et simple des territoires palestiniens.
Israël définit sa sécurité en termes justifiant une occupation permanente et une domination raciale sur l'ensemble des terres situées entre le Jourdain et la mer. La suprématie juive, toujours implicite dans le projet sioniste pour la Palestine, est désormais présentée sans ambiguïté comme le credo officiel d'Israël.
J'Accuse rend compte de la déshumanisation subie par les Palestiniens sous occupation israélienne, y compris en Cisjordanie et à Jérusalem-Est.
Bien avant les massacres en constante augmentation depuis l'attaque du Hamas, Gaza s'apparentait déjà au Neuvième Cercle de l'Enfer de l'occupation israélienne. Elle a été au cœur de la première intifada en 1987. Puis vinrent les invasions militaires successives, ponctuant les souffrances quotidiennes du blocus. Albanese aborde rapidement l'actualité de Gaza, soulignant qu'au lendemain du 7 octobre, le gouvernement israélien a arrêté des milliers de Palestiniens sans procédure régulière. Eux aussi doivent être considérés comme des otages. Le livre s'arrête là.
Dans une postface, la philosophe Roberta De Monticelli poursuit le récit jusqu'aux premières étapes de la guerre de Gaza. "Gaza n'existe plus", écrit-elle. "Ce n'est plus qu'un amas de misère et de ruines". Le droit international et l'ordre tant vanté par l'Occident gisent également sous les décombres de Gaza, avec l'incapacité à condamner Israël pour ses crimes de guerre. Elle relate les violentes campagnes de diffamation menées contre Mme Albanese en Italie. Là-bas, Israël bénéficie d'un soutien massif de la part du gouvernement et des médias, à l'image de la réaction générale de l'Occident face au massacre de plus de soixante mille Palestiniens, pour la plupart des femmes et des enfants.
Intimidations
Depuis J'Accuse, Mme Albanese n'a cessé de publier des rapports pour l'ONU, de donner des conférences, de diffuser des messages sur les réseaux sociaux et d'accorder des interviews pour appeler à un cessez-le-feu immédiat et mettre en garde contre le nettoyage ethnique des Palestiniens à Gaza et dans tous les territoires occupés. Dans son rapport intitulé Anatomy of a Genocide, publié le 25 mars 2024, elle a été la première à fournir à l'ONU une analyse détaillée de l'intention d'Israël d'exterminer les Palestiniens de Gaza. Dans un rapport publié l'année suivante, elle affirme que ce génocide se poursuit en partie en raison des profits réalisés par des entreprises telles que Microsoft, Google et Amazon.
À ce stade, l'administration Trump a ouvertement exprimé sa colère envers Mme Albanese en signant le décret 14203. Son hostilité envers elle est allé croissant dans les cercles du pouvoir américain depuis février 2023, lorsque dix-huit membres du Congrès ont demandé son éviction de son poste à l'ONU en raison de son parti pris anti-israélien. En 2024, après la publication en ligne d'un message de Francesca Albanese comparant Netanyahu à Adolf Hitler, l'ambassadrice américaine à l'ONU de l'époque, Linda Thomas-Greenfield, nommée par Joe Biden, a exigé sa destitution. Linda Thomas-Greenfield a bloqué par veto et à plusieurs reprises toute mesure s'opposant à Israël au motif de son droit à la légitime défense. L'administration Trump a redoublé d'ardeur et de rhétorique pour soutenir Israël à l'ONU, mais l'engagement de Washington en faveur de l'État hébreu demeurait inchangé, quel que soit le parti au pouvoir.
Quelques semaines après les sanctions américaines dont elle a fait l'objet cet été, Mme Albanese s'est exprimée à Bari, dans le sud de l'Italie, où le maire de la ville lui a rendu hommage pour avoir dénoncé le sort tragique des Palestiniens. Selon elle, ces sanctions ne sont pas un simple geste symbolique. Ses avoirs financiers ont été gelés et elle est désormais interdite de séjour aux États-Unis et empêchée d'exercer ses fonctions à l'ONU. Ces mesures, qui portent gravement atteinte à ses activités professionnelles, sont comparables aux pratiques d'intimidation de la mafia.
Mme Albanese s'est dite honorée et bouleversée par cette cérémonie. Elle a ensuite lancé un avertissement à la communauté internationale :
"La Palestine nous appelle à l'aide, elle préfigure un avenir sans justice. Et le silence de l'Italie ne doit pas vous tromper. Nous sommes à la traîne, nous sommes véritablement les derniers vestiges de la violence colonialiste et impérialiste qui a caractérisé le siècle dernier. Un réveil des consciences s'impose. Ce n'est pas seulement l'Italie, mais la communauté internationale tout entière qui doit sortir du piège de ses doubles standards moralement destructeurs : les uns sont ses partenaires et alliés, comme Israël, les autres ses ennemis désignés, comme la Russie".
Flottille
Le 31 août, la flottille Global Sumud (sumud signifie "persévérance" en arabe), composée de plus de quarante bateaux, a quitté Barcelone pour apporter une aide humanitaire aux Palestiniens et briser le blocus israélien de Gaza. Mme Albanese a résolument soutenu cette initiative. À chaque occasion, elle a appelé les gouvernements européens à protéger la flottille et à s'opposer à la campagne génocidaire d'Israël à Gaza.
Parmi les plus de six cents militants embarqués, des travailleurs humanitaires, des médecins, des personnalités politiques et des artistes représentant quarante-quatre pays. Le gouvernement israélien les a qualifiés de sympathisants du Hamas. L'ambassadeur d'Israël en Italie a même affirmé avoir la preuve que le Hamas aurait dirigé la flottille dès le départ. Aucune preuve n'a été fournie.
La flottille Global Sumud a été attaquée par des drones le 9 septembre dans les eaux tunisiennes. Le navire principal, le Family Boat, a été touché et un incendie s'est déclaré. Aucun blessé n'a été déploré. La militante Greta Thunberg s'est ensuite exprimée devant la théâtre municipal de Tunis. Elle a accusé Israël d'avoir organisé cette attaque pour stopper la mission pacifique et légale de la flottille. Les articles de journaux consacrés à cet événement ont publié une photo d'Albanese embrassant et serrant Thunberg dans ses bras.
À 2 heures du matin, dans la nuit du 24 septembre, des drones ont de nouveau attaqué la flottille, alors au large des côtes de Crète. Quatorze bateaux ont été endommagés par des grenades assourdissantes et des produits chimiques non identifiés. Deux personnes ont été légèrement blessées. Albanese a immédiatement publié sur X :
"Alerte ! @gbsumudflotilla a été attaquée 7 fois en peu de temps ! Les bateaux ont été touchés par des grenades assourdissantes, des fusées éclairantes explosives et aspergés de produits chimiques suspects. Les radios ont été brouillées, les appels à l'aide bloqués. Alerte internationale immédiate, UNE PROTECTION est impérative. Ne touchez pas à la flottille !"
Alors que le gouvernement italien soutient Israël, Albanese n'est pas la seule à condamner ces actes. Lors de la première des deux grèves générales, un million de personnes à travers l'Italie ont manifesté en faveur de la Palestine et de la flottille, exigeant la fin de tout commerce d'armes et des relations commerciales avec Israël. Les autorités ont répondu aux manifestants avec des canons à eau. Les manifestations témoignaient aussi d'une colère plus générale en Italie face aux problèmes sociaux nationaux tels que l'absence d'avenir économique pour les jeunes et le fossé entre riches et pauvres. La Palestine a toutefois servi de catalyseur.
La Première ministre Giorgia Meloni, alors à New York pour l'Assemblée générale des Nations unies sur la guerre d'Israël à Gaza, s'en est prise aux organisateurs de la flottille, les qualifiant d'irresponsables et d'alarmistes. La dirigeante italienne de droite, fort appréciée par Trump, a critiqué Israël pour ses excès à Gaza, mais a retourné sa colère contre les militants de la flottille, les appelant à mettre fin à leur mission.
Le 1er octobre, dans une interview accordée à NBC News, Mme Albanese a condamné les États membres de l'ONU appelant la flottille à faire demi-tour. Ils doivent au contraire intervenir pour stopper les crimes d'Israël, protéger la flottille et briser eux-mêmes le blocus israélien de Gaza. La plupart des délégués, en particulier ceux du Sud, ont manifesté leur soutien aux Palestiniens en quittant la réunion de l'Assemblée générale des Nations unies la semaine précédente, lors du discours de Netanyahu. De toute évidence, Meloni n'a pas eu ce courage moral.
Le même jour, lors d'une conférence juridique à Milan, Mme Albanese a déclaré que le gouvernement italien viole la constitution du pays, qui exige expressément le respect du droit international. En vertu de cette exigence, Meloni se doit de condamner Israël, et non les militants. Nous assistons, a ajouté Albanese,
"non seulement au retour des partis de droite, mais aussi au retour des comportements fascistes, y compris dans la manière dont les forces de l'ordre se comportent avec la population, avec tous ceux qui protestent".
Le soir même, la marine israélienne a intercepté et arraisonné la flottille Global Sumud dans les eaux internationales et arrêté les militants. D'autres manifestations ont éclaté en Italie au cri de "S'ils touchent à la flottille, ils nous touchent tous. S'ils l'attaquent, on bloque tout". Le site web Arab News a évoqué une "intifada italienne". D'autres pays européens ont connu des manifestations pro-palestiniennes similaires, mais rien de comparable à ce qui s'est passé en Italie.
Tout bloquer
Une deuxième grève générale a intensifié le chaos en Italie pendant les trois jours suivants. "Blocchiamo tutto" [On bloque tout] est devenu le mot d'ordre du jour, paralysant les voies ferrées, les installations portuaires et les autoroutes. Les Italiens se sont massivement mobilisés, scandant des slogans de solidarité avec le peuple qui souffre à Gaza : "Palestine libre", "Israël sioniste, État terroriste", "Nous sommes tous palestiniens", "Arrêtez le génocide", "Libérez les héros de la flottille", dénonçant le gouvernement Meloni dans les rues et sur les places d'Italie.
Les informations faisant état de mauvais traitements infligés par Israël aux détenus de la flottille ont encore attisé la colère des manifestants en Italie comme ailleurs. Le ministre israélien de l'Intérieur d'extrême droite, Ben-Gvir, a qualifié les militants de "terroristes", affirmant que s'ils pensent "être accueillis avec le tapis rouge et les trompettes, ils se trompent". Ils ont été incarcérés dans la prison israélienne de Ketziot, célèbre pour ses conditions abusives. Ben Gvir a ajouté que leur arrestation les inciterait à réfléchir à deux fois avant de se lancer à nouveau dans une mission aussi irréfléchie.
Mme Albanese fait l'objet constant de controverses. Le 2 octobre, de nouvelles informations ont été révélées au sujet d'un événement impliquant Albanese, survenu le dimanche 28 septembre dans la ville de Reggio Emilia, dans le nord du pays. Une fois encore, elle a été honorée par une haute distinction pour son action en faveur des droits de l'homme. Lors de la cérémonie, le maire l'a félicitée pour son action remarquable en faveur des droits de l'homme, qualifiant son travail de remarquable, méritant la plus haute reconnaissance. De tels événements ne font généralement pas la une des journaux.
Cependant, le maire a également déclaré que la libération des otages israéliens détenus par le Hamas permettrait de faire avancer la cause de la paix au Moyen-Orient. Alors que le maire évoquait les otages israéliens, Mme Albanese a passé une main sur son visage et grimacé. Elle a rétorqué :
"Non, Monsieur le maire se trompe, ce qu'il a dit est inexact. Car la paix ne se négocie pas".
Le public pro-palestinien a hué et sifflé le maire.
Les personnalités politiques et médiatiques italiennes ont vivement débattu de la réaction d'Albanese aux propos du maire à propos des otages israéliens. Ses défenseurs s'accordent à dire que la paix doit être conclue sans délai, sans aucune condition préalable concernant les otages ou tout autre sujet. Ses détracteurs l'accusent d'être aveuglée par sa haine d'Israël et rejettent l'appel raisonnable du maire à la libération des otages.
Albanese était également à Reggio pour présenter son nouveau livre, intitulé Quando il mondo dorme: Storie, parole e ferite della Palestina [Pendant que le monde dort : histoires, mots et souffrances de la Palestine]. Ce récit de la vie quotidienne, basé sur les expériences individuelles incarnant la tragédie des territoires occupés, a été publié en mai 2025. Ce livre transpose en termes concrets son analyse juridique des crimes relatés dans J'Accuse. Il a déjà été réédité à neuf reprises.
Le véritable enjeu
Mme Albanese a de nouveau fait la une des journaux le 5 octobre, lorsqu'elle a décidé de quitter une émission de télévision italienne, après une vive altercation en direct sur la question du génocide à Gaza. Elle s'est opposée à la négation du génocide par certains participants. Deux jours plus tard, à l'occasion des deux ans de l'attaque du Hamas, l'annonce de sa participation à une réunion sur la Palestine à Gênes a provoqué une vague de condamnations de la part de groupes juifs en colère : "Organisez cet événement, mais un autre jour", ont-ils protesté.
Mme Albanese a notamment déclaré le même jour que le véritable problème à Gaza est "le génocide qui tue les Palestiniens", refusant de minimiser cette question morale centrale de notre époque. Elle a également déploré la mort des civils israéliens tués par le Hamas. Les victimes des deux communautés sont les victimes de dynamiques historiques complexes, engagées dans une lutte sans merci depuis 1917.
Pour Mme Albanese, le thème central de son livre J'accuse porte sur le rôle du contexte historique pour comprendre la crise palestino-israélienne actuelle. Où chercher l'origine véritable de cette crise dans une histoire aussi complexe ? Sa cause première remonte à la déclaration Balfour de 1917. Dans cette déclaration, le gouvernement britannique s'engageait à créer un foyer national pour le peuple juif,
"étant clairement entendu que rien ne sera fait qui puisse porter atteinte aux droits civils et religieux des communautés non juives établies en Palestine".
Le cessez-le-feu de la guerre à Gaza et le plan de paix signé à Charm el-Cheikh, en Égypte, le 13 octobre, ne mentionnent pas l'origine de la crise israélo-palestinienne. Aucun représentant du Hamas n'a participé au processus de signature. Reste à savoir comment un accord de paix dont un des protagonistes est absent pourra tenir. Netanyahu a même refusé de soutenir le rôle de Mahmoud Abbas, le dirigeant de l'Autorité nationale palestinienne anti-Hamas, dans la reconstruction de Gaza, et n'a toujours pas accepté le principe d'une rencontre avec un interlocuteur palestinien.
La deuxième phase du plan de paix prévoit la création d'un nouvel organe exécutif pour gouverner la bande de Gaza, des plans de reconstruction et la démilitarisation du Hamas. Toutefois, d'importants obstacles à une paix durable restent à surmonter. Alors que le prétendu cessez-le-feu menace de voler en éclats chaque jour qui passe, Mme Albanese continue d'exiger l'égalité des droits, de la sécurité, de la déradicalisation et de la démilitarisation d'Israël. Tant que les communautés non juives de Palestine n'auront pas obtenu de garanties complètes en matière de droits civils et religieux, rien de fondamental ne changera au Moyen-Orient.
Traduit par Spirit of Free Speech
* Richard Drake a obtenu un doctorat en histoire à l'UCLA en 1976. Il a commencé sa carrière d'enseignant à l'université du Montana en 1982, où il est devenu en 2017 le premier titulaire de la chaire de recherche Lucile Speer en politique et histoire. Il a publié quatre ouvrages sur l'histoire moderne de l'Italie, dont The Revolutionary Mystique and Terrorism in Contemporary Italy (1989), édition révisée en 2021). Il a publié deux ouvrages sur la politique étrangère américaine : The Education of an Anti-Imperialist: Robert La Follette and U.S. Expansion (University of Wisconsin Press, 2013) et Charles Austin Beard: The Return of the Master Historian of American Imperialism (Cornell University Press, 2018). Il travaille actuellement à un livre dont le titre provisoire est "Mark Twain and the Course of the American Empire" (Mark Twain et le cours de l'empire américain).