22/08/2025 mondialisation.ca  13min #288089

Hommage à Mohamed Ayadi architecte de la réussite de la transsaharienne

Par  Chems Eddine Chitour

« Il dort. Quoique le sort fût pour lui bien étrange, – Il vivait. Il mourut ; La chose simplement d'elle-même arriva, – Comme la nuit se fait lorsque le jour s'en va. » Victor Hugo (Jean Valgean)

Mohamed Ayadi Secrétaire Général (SG) du Comité de liaison de la Route Transsaharienne (CLRT) nous a quittés sur la point des pieds dans l'indifférence de l'Algérie, et la réelle tristesse de ses amis nombreux à lui rendre un dernier hommage. Cette contribution est justement un hommage à ces pionniers, ces pionniers du développement, qui pendant toute une carrière qui ont pris à bras le corps le destin de l'Algérie à l'indépendance Il fallait pour cela avoir le feu sacré chevillé au corps ; Ce fut le cas de Mohamed Ayadi, mon ami mon frère de combat pour une visibilité intemporelle de l'Algérie toi qui a représenté dignement le pays dans les instances internationales et africaines.

Qui est Mohamed Ayadi ?

Mohamed Ayadi, est natif d'El Ouricia (wilaya de Sétif), il a vécu à Sétif et a suivi ses études au lycée Mohamed Kerouani. Après son baccalauréat mathématiques, il rejoint par concours l'Ecole Nationale Polytechnique d'Alger. Il termina ses études en tant qu'ingénieur de génie civil au moment où l'Algérie mettait en œuvre ses plans triennal et quadriennal. Il fut de ce fait, l'un des pionniers de l'Algérie sur le dur chemin du développement. Il fallait en effet, dans cette Algérie indépendante et naissante innover, faire preuve d'imagination pour constamment maintenir le rythme du développement ; Les Moudjahidines du Développement étaient animés du feu sacré de l'obsession de réussir sans ménager aucun effort. Curieusement alors que le pays était exsangue du point de vue des cadres, aucun diplômés, n'a pensé à prendre le large,. Il fallait d'abord faire ses preuves dans le pays.

Parcours professionnels

Mohamed Ayadi eut plusieurs vies professionnelles, qu'il a réussies. a débuté sa carrière comme Ingénieur en infrastructures routières – au Ministère des Travaux Publics d'Algérie. Il sera ensuite Directeur du Laboratoire National de Travaux Publics Il mettra en place de systèmes de contrôle qualité sur les matériaux et les ouvrages d'art. Il participera à l'encadrement de jeunes ingénieurs et formation continue notamment à l'Ecole des Travaux Publics d'Alger

Les autorités du pays, ont a fait appel à lui pour un projet ambitieux à l'échelle du continent africain: Relier les pays entre eux Il sera ainsi, appelé dans le cadre de la conception de la route transsaharienne comme Secrétaire Général du Comité de liaison de la Route Transsaharienne (CLRT), chargé de coordonner la réalisation et la valorisation économique du projet de la Route Transsaharienne (RTS) qui traverse six pays africains (1)

Parmi les qualités de Mohamed Ayadi qui ont fait que son mandat a été reconduit à l'unanimité sa maitrise de la Conception et de la planification de réseaux routiers L'analyse économique des corridors logistiques et aussi la coordination intergouvernementale par une diplomatie technique

Les missions de Mohamed Ayadi en tant que Secrétaire Général du CLRT 

*D'abord assurer la coordination technique et institutionnelle entre les six pays membres : Algérie, Tunisie, Mali, Niger, Tchad, Nigeria.. Suivre l'avancement des travaux et harmoniser les normes techniques.

*Superviser la mise en œuvre et la coordination entre les pays membres (Algérie, Tunisie, Mali, Niger, Tchad, Nigeria)

*Promouvoir la transformation du projet en corridor économique, via des mécanismes de coopération régionale et d'intégration commerciale (2)

*Réaliser des études de faisabilité en partenariat avec des institutions internationales (BAD CNUCED, BID) pour renforcer la viabilité économique du projet.

Les Réalisations notables

Conçu au cours des années 1960 à l'initiative de l'Algérie et de la Commission des nations unies pour l'Afrique (CEA), le projet de la Transsaharienne s'est tracé pour objectif l'intégration régionale et le désenclavement des zones déshéritées. Conduit par un Comité de coordination composé des représentants de six pays ((Algérie, Mali, Niger, Tunisie, Nigéria, Tchad), il est lancé sur le terrain au début des années 1970 et relie aujourd'hui les six capitales des pays concernés sur un linéaire proche de 10 000 km dont plus de 8000 km sont bitumés et livrés à la circulation.

*Le travail réalisé par Ayadi Mohamed l'ingénieur sorti de l'Ecole Polytechnique d'Alger pendant plus de 20 ans pour l'essor de la coopération des pays irrigué par la transsaharienne est remarquable. Son parcours d'ingénieur et son rôle stratégique dans la coopération interafricaine autour de la Route Transsaharienne.

*Mis en place d'un plan d'aménagement concerté pour renforcer le développement économique entre l'Algérie, le Mali et le Niger, ciblant les régions frontalières et leurs richesses naturelles

*Encourager la création d'un corridor économique à travers des décisions ministérielles collectives, notamment lors d'une réunion tenue le 27 juin 2022 le taux d'avancement du projet dépasse les 90 %, selon des estimations récentes, avec plus de 25 000 km réalisés sur environ 27 940 km, et un impact majeur dans la désenclavation régional »

* Mis en avant les gains significatifs en temps et les possibilités économiques nouvelles pour les zones sahariennes Mohamed Ayadi a participé plusieurs fois depuis au moins dix ans à vulgarisé sur les ondes de la Chine 3, l'importance de la transsaharienne et l'état d'avancement. Sa dernière interview avec Radio Algérienne du 11 décembre 2024 » (3).

Les Réalisations majeures sont à la dimension du continent :

Sans être exhaustif nous pouvons citer les prouesses suivantes :

*Achèvement à plus de 90 % de la Route Transsaharienne (plus de 25 000 km construits .

*Réduction du temps de transport entre l'Algérie et le Nigeria de plusieurs jours (jusqu'à 11 jours gagnés sur certains trajets commerciaux). Cela veut dire que cette transsaharienne a permis de réduire de moitié la quantité de carburant cela veut dire, aussi, que par cette initiative l'Afrique a réduit la pollution de plusieurs dizaines de millions de tonnes de CO2

* Mise en place de plans d'aménagement concertés pour dynamiser les régions frontalières et relier les zones productrices de matières premières aux marchés.

* Création d'un cadre ministériel commun pour lancer le corridor économique transsaharien.

Plus largement c'est la Valorisation de la coopération Sud-Sud : échanges techniques, formation d'ingénieurs, projets conjoints dans la logistique et les télécommunications.

Mohamed Ayadi au nom de l'Algérie a donné une dimension à la coopération africaine. Sa réélection plusieurs fois Le 25 Avril 2022 Le secrétaire général du Comité de liaison de la route transsaharienne (CLRT) Mohamed Ayadi, a indiqué que le comité de Liaison va passer à un corridor économique. « Nous sommes un à moment extrêmement important, je suis heureux d'annoncer la tenue d'une rencontre, le 27 juin prochain, qui réunira les ministres des six pays membre, à savoir l'Algérie, la Tunisie, le Mali, le Tchad, le Niger et le Nigeria pour se prononcer sur la transition ou l'évolution de ce comité vers un corridor économique », a-t-il déclaré lors de son intervention à la radio chaine 3 (4).

Vision de Mohamed Ayadi sur les possibilités de cette réalisation

Il répétait souvent :« La Route Transsaharienne n'est pas seulement un ruban d'asphalte. C'est une artère de vie, de commerce et de rapprochement entre peuples. Elle relie nos économies comme elle relie nos destins. »

L'axe principal Alger – Lagos : 4 500 km est, aussi, un atout qui permet d'accompagner parallèlement le projet du gazoduc Alger Lagos Les branches vers Tunis, Bamako, N'Djamena In Salah, Tamanrasset seront d'un apport certain au fur et à mesure du développement de la coopération interafricaine S'y ajoute des zones de désenclavement :, Agadez, Kano.

L'impact est évident les échanges commerciaux transfrontaliers vont en profiter Il y a +40 % d'échanges commerciaux transfrontaliers sur certains tronçons. Le Développement de zones logistiques et marchés frontaliers. L'Augmentation de la sécurité et baisse du coût du transport par camion. Les idées exprimées par Mohamed Ayadi, à l'occasion de son passage en tant qu'Invité de la rédaction sur la Chaîne III de la Radio Algérienne le 11 décembre 2024, ainsi que lors d'interventions connexes :

Points clés de ses déclarations tout au long de sa carrière

Mohamed Ayadi explique que ce projet ne repose pas seulement sur une infrastructure routière, mais s'appuie sur une gouvernance solide. Il évoque des instances comme le Conseil des ministres, des comités spécialisés (transports, routes, finances, commerce), ainsi qu'un SG coordinateur pour garantir la cohérence entre les six pays membres .

Il souligne l'importance de l'informatisation des procédures frontalières et douanières. Cette modernisation permettra de réduire les coûts logistiques, de fluidifier les échanges et de renforcer la compétitivité des entreprises Sur les quelque 4 800 km entre Alger et Lagos, l'Algérie a réalisé plus de 500 km d'autoroute, et le Nigeria a accompli une portion équivalente. Il met en avant des réalisations techniques impressionnantes, notamment le chantier entre Chiffa et Berraguia, où des ponts et tunnels ont permis de gagner plus de 30 minutes sur certains trajets Cela va aider à terme à mieux appréhender le train Alger –Tam qui passera par le même relief

Mohamed Ayadi met en lumière les efforts considérables de l'Algérie, rappelant que le projet est globalement achevé à 90 %, bien que la participation des autres pays varie selon leurs capacités financières Il insiste sur l'idée que les infrastructures seules ne suffisent pas : (douane, banques, etc.) Il appelle à éliminer les blocages administratifs au plus vite pour que les opérateurs économiques puissent vraiment tirer parti du nouveau corridor Les capacités financières étant inégales entre les pays, Mohamed Ayadi souligne les difficultés rencontrées par certains d'entre eux, L'Algérie et le Nigeria, en revanche, ont pu avancer plus rapidement Un bilan plus récent, daté de mars 2025, évalue le taux d'avancement à 95 %, confirmant que le projet est quasiment achevé dans tous les tronçons essentiels

Vision de Mohamed Ayadi pour l'intégration régionale

« Comment résumer en quelques phrases le sacerdoce de cinquante ans de bons et loyaux services au service du pays et plus encore de l'Afrique ? Au-delà de la route, Mohamed Ayadi perçoit la Transsaharienne comme un levier d'intégration économique et commerciale, un catalyseur pour les échanges Sud-Sud, notamment dans le cadre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). » (5)

Il y a des hommes dont le travail se mesure en kilomètres, mais dont l'héritage se compte en rapprochements humains et en perspectives économiques. Mohamed Ayadi, ingénieur de l'École Nationale Polytechnique d'Alger, fut de ceux-là. Dans ses interventions, notamment à l'émission Invité de la rédaction de la Chaîne III en décembre 2024, il rappelait que l'intégration régionale ne se décrète pas, elle se construit. Pour lui, l'ouvrage devait être accompagné d'un cadre institutionnel solide, de procédures frontalières modernisées et d'une volonté politique partagée. Sous sa coordination, plus de 25 000 kilomètres ont été réalisés, portant le projet à plus de 95 % d'achèvement. Ce n'était pas seulement une réussite technique : c'était un signal d'espoir pour des millions de personnes vivant dans les régions sahariennes et sahéliennes, longtemps marginalisées. Il savait que chaque pont, chaque tronçon, chaque poste frontière modernisé était une victoire contre l'isolement, un pas vers une Afrique mieux connectée. Son engagement a permis de réduire de plusieurs jours le temps de transport des marchandises entre Alger et Lagos, et d'ouvrir de nouvelles perspectives commerciales dans le cadre de la Zone de libre-échange continentale africaine ».(6)

« Visionnaire, il plaidait pour que la Transsaharienne ne soit pas seulement un ruban de bitume, mais une artère vivante, irriguant l'économie, la culture et les échanges humains. Il appelait sans relâche à l'harmonisation des règles et à la levée des barrières inutiles. Aujourd'hui, alors que la Route Transsaharienne touche à son terme, son nom restera indissociable de cette œuvre collective ».(6)

« Aujourd'hui, lit -on dans un article de Africa News l'Algérie et l'Afrique pleurent la disparition d'un de leurs plus dévoués et visionnaires leaders, Monsieur Mohamed Ayadi, La carrière distinguée de Monsieur Ayadi a été marquée par un engagement incessant en faveur de l'intégration régionale et du développement durable. Avec un leadership exemplaire et une vision stratégique hors pair, il a transformé le désert du Sahara d'une barrière en un pont, reliant des communautés et stimulant la croissance économique. Monsieur Ayadi s'est imposé comme une figure incontournable dans de nombreux forums continentaux et internationaux. Il a toujours affirmé que la Route Transsaharienne incarne des liens historiques séculaires entre le Nord et l'Afrique subsaharienne et symbolise la coopération économique et politique entre les six États membres, Africa News, exprime sa profonde tristesse face à cette perte » (7).

C'est un fait, l'Algérie et l'Afrique perdent une figure majeure, son héritage résonnera à jamais sur chaque kilomètre de la Route Transsaharienne et dans chaque projet de développement qu'il a porté avec passion. En rendant hommage à Mohamed Ayadi un condisciple au lycée de Sétif et à l'Ecole Polytechnique d'Alger, je salue un ingénieur, un bâtisseur, un gardien de l'éthique et l'intransigeance dans le travail et un artisan infatigable de la réussite de l'Algérie et de l'image de marque qu'elle donne en Afrique. Son héritage est tracé dans le sable et le bitume, il vivra surtout dans la mémoire de ceux qui croient dans le destin du pays et de sa visibilité dans le concert des nations.

Je souhaite que l'ambition actuelle de mettre en place une Transharienne électrique qui met Tamanrasset à huit heures d'Alger avec des vitesses de 250km/heure puisse être portée d‘une façon pleine entière et dans la durée comme le fut le sacerdoce de Mohamed Ayadi. pour la réussite de la Transaharienne

« L'Algérie du million de martyrs, t'est reconnaissante pour le combat de cinquante ans que tu a mené, contre l'ignorance. Ta rigueur professionnelle restera gravé dans les mémoires. Puisse ton combat être perpétué. Tu es parti, mais ta joie de vivre contagieuse résonnent encore en nous..Puisse nous en souvenir longtemps … Repose en paix Mohamed.

Professeur Chems Eddine Chitour

Ecole Polytechnique Alger

Notes :

1. Algérie Éco moroccomail.fr aps.dz.

2.«  lesenjeuxeco.dz lalgerieaujourdhui.dz aps.dz.

3. الإذاعة الجزائرية

4. Algérie Éco aps.dz الإذاعة الجزائرية.

5. Le Jeune Indépendant maghrebaujourdhui.com.

6  chatgpt.com

7. africanews.dz

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