Les grilles des frontières de Ceuta et Melilla séparant le territoire marocain se sont ouvertes lundi 16 mai peu après 23h heure locale. Des dizaines de voitures et des piétons se sont pressés dans les deux sens, a observé un journaliste de l'AFP.
Au poste-frontalier de Fnideq, près de l'enclave espagnole de Ceuta, les transfrontaliers ne cachaient pas leur joie : des sourires extatiques éclairaient les visages des privilégiés qui retrouvaient leurs familles du côté marocain au son des youyous, dans une ambiance festive, a constaté l'AFP.
"J'étais bloqué depuis deux ans à Ceuta, je suis très content de rentrer au bercail", a expliqué Nourredine, pressé de retrouver le sol marocain.
Depuis deux ans, les frontières qui séparaient les enclaves espagnoles du Maroc étaient fermées. D'abord en raison des restrictions de déplacement liées à la pandémie de Covid-19 en 2020, puis à cause de la brouille diplomatique entre Rabat et Madrid, récemment dissipée, qui avait retardé leur réouverture.
Celle-ci reste cependant limitée, puisqu'elle ne concerne que les détenteurs de passeports et de visas des pays de la zone Schengen. Les transfrontaliers marocains, exempts de visas pour accéder à Ceuta et Melilla, devront encore patienter jusqu'au 31 mai pour y pénétrer. Les migrants, majoritairement originaires d'Afrique subsaharienne, qui essayent de pénétrer sur le sol espagnol illégalement ne sont pas concernés par cette réouverture.
Interdire la contrebande
En outre, les autorités marocaines ont décidé d'interdire la reprise de la contrebande, toléré jusqu'à l'automne 2019 entre Ceuta et la ville frontalière marocaine de Fnideq. Ce trafic irriguait l'économie locale mais privait les douanes marocaines d'importantes recettes : entre six et huit milliards de dirhams (550 - 750 millions d'euros) chaque année.
La fermeture des frontières avait plongé des milliers de personnes au chômage, l'économie urbaine de Fnideq et Nador (près de Melilla) se basant sur les échanges avec les deux enclaves. L'arrêt du commerce informel entre les territoires espagnols et marocains avait impacté de nombreuses familles du royaume vivant de ces revenus.
Pour pallier la fin de la contrebande et éviter une crise économique dans la région, les autorités avaient inauguré en février 2022 une zone d'activités économiques (ZAE) à Fnideq. Ce projet, qui a nécessité un investissement de 200 millions de dirhams (19 millions d'euros) prévoit la création de 1 000 emploi directs.
Ceuta et Melilla constituent les seules frontières terrestres de l'Union européenne sur le continent africain. Régulièrement, les exilés tentent d'escalader les clôtures de barbelés érigés entre les deux territoires, ou d'atteindre les enclaves à la nage. Début mars, un millier d'exilés avaient essayé d'entrer à Melilla mais ils en avaient été empêchés par les forces marocaines.
Lors de ces tentatives, beaucoup se blessent sur les grillages ou pendant des confrontations avec la police. D'autres meurent en mer. Le dernier drame remonte à début mai : un corps avait été retrouvé près d'une digue du port de Melilla.