29/12/2025 elucid.media  3min #300249

Le grand fossé de l'accès aux soins en France : quand la santé devient un privilège

publié le 29/12/2025 Par  Alexandra Buste, Xavier Lalbin

C'est une singularité française. Tandis que l'espérance de vie de nos compatriotes se situe parmi les plus élevées de l'Union européenne, les inégalités d'accès à la santé sont parmi les plus marquées des pays de l'OCDE. Le récent  rapport de la commission d'enquête sur l'organisation du système de santé et les difficultés d'accès aux soins dresse un constat « alarmant » sur l'état de notre système de santé. Il soulève un problème d'« inégalités sociales, territoriales, statutaires et financières insupportables ». Les populations les plus pauvres et les moins éduquées en paient le prix fort, elles qui subissent la triple difficulté d'être davantage exposées aux risques socio-environnementaux, d'être plus sujettes aux comportements addictifs ou à risques et de pâtir d'un moindre accès aux soins et à la prévention. Ce marasme sanitaire est largement dû à des politiques délétères, responsables de la création des déserts médicaux, notamment via le numerus clausus. Et les campagnes de prévention ne sont guère plus vertueuses : elles rejettent la responsabilité sur les individus et occultent des facteurs externes tels que la pauvreté (qui entraîne le renoncement aux soins), le mal-logement, l'absence de mobilité ou encore les mauvaises conditions de vie favorisant les comportements à risque.

C'est une bonne nouvelle, la santé des Français s'améliore sur de nombreux critères. Notre « espérance de vie en bonne santé » s'est allongée ces dernières années, après une rupture due à la crise sanitaire. En 2022, l'espérance de vie sans incapacité à la naissance est de 63,8 ans pour les hommes et de 65,3 ans pour les femmes. Ces résultats placent la France au-dessus des moyennes européennes.

Toutefois, ces moyennes cachent une réalité plus contrastée. L'espérance de vie varie beaucoup en fonction de la catégorie sociale en raison des différences dans la pénibilité des activités professionnelles, des conditions de vie ou encore de la facilité d'accès aux soins de santé. Un homme parmi les 5 % les plus riches vit treize ans de plus qu'un homme parmi les 5 % les plus modestes.

Revers de la médaille de l'allongement de l'espérance de vie moyenne, le vieillissement de la population  contribue à une forte augmentation des pathologies chroniques qui demandent des soins pendant au moins plusieurs mois (maladies cardio-neurovasculaires, maladies psychiatriques, diabète, obésité et cancers).

Les affections de longue durée (ALD) ont en moyenne progressé de +2,8 % par an entre 2005 et 2022. Elles touchent une personne sur cinq, mais leur prise en charge, qui s'inscrit dans la durée, représente les deux tiers des dépenses totales remboursées par l'Assurance maladie. Selon  cette dernière, plus d'un patient sur deux est pris en charge depuis plus de 5 ans et près de trois sur dix le sont depuis au moins 10 ans.

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