03/07/2025 palestine-solidarite.fr  7min #283035

 Gaza : Trump annonce un cessez-le-feu de 60 jours accepté par Israël

Près de 100 Palestiniens tués dans la bande de Gaza à la veille d'une rencontre entre Nétanyahou et Trump à Washington

Des Palestiniens pleurent les victimes de frappes israéliennes devant l'hôpital Shifa, à Gaza, le lundi 30 juin 2025. [AP Photo/Jehad Alshrafi]

Par Kevin Reed

Lundi, les attaques militaires israéliennes dans la bande de Gaza ont tué au moins 95 Palestiniens, dont des dizaines dans un café en bord de mer à Gaza et plusieurs autres qui cherchaient désespérément de l'aide alimentaire.

Ce dernier massacre, rapporté en détail par l'Associated Press et Al Jazeera, souligne la violence implacable et systématique dirigée contre une population civile assiégée, alors même que les Nations unies et les agences humanitaires mettent en garde contre une catastrophe humanitaire en cours.

Dans un des incidents les plus meurtriers, la marine israélienne a frappé un café populaire en bord de mer près du port de la ville de Gaza, tuant plus de 30 personnes, dont beaucoup de femmes, d'enfants et de journalistes. Le café, connu sous le nom d'Al-Baqa, était un refuge rare pour les étudiants, les journalistes et les travailleurs à distance qui cherchaient à accéder à Internet et à échapper brièvement à la misère des camps de déplacés.

Hani Mahmoud, journaliste d'Al Jazeera, a rapporté depuis les lieux :

L'attaque, qui a frappé sans avertissement, a transformé le café, lieu essentiel pour accéder à Internet et se détendre, en une scène d'horreur : tables maculées de sang, chaussures éparpillées et morceaux de corps enveloppés dans des nappes. Les survivants ont condamné cette frappe, la qualifiant de « guerre systématique contre la vie » à Gaza.

Des images vérifiées par CNN ont montré une épaisse fumée s'élevant des ruines, et des corps emportés sur des civières. Le Dr Mohammad Abu Silmiya, directeur de l'hôpital Al-Shifa, a confirmé qu'au moins 31 personnes avaient été tuées et 70 blessées, dont beaucoup d'étudiants et d'enfants.

Soulignant la pénurie critique de lits en soins intensifs et d'anesthésiques, le Dr Silmiya a déclaré :

Nous soignons les blessés sur le sol de l'hôpital en raison du manque de chambres et de lits disponibles.

Parmi les morts figurait le journaliste indépendant Ismail Abu Hatab, portant à 228 le nombre total de journalistes tués par les forces israéliennes à Gaza depuis octobre 2023.

Mahmoud, journaliste à Al Jazeera, a décrit plus en détail le chaos et le carnage :

Cet endroit sert de refuge à de nombreuses personnes traumatisées et déplacées, leur offrant un répit face à la chaleur insupportable des abris de fortune. Le café n'avait aucun lien avec l'armée, il n'y avait que des civils déchiquetés par ce que les témoins ont qualifié de « bombe étrangère imprévisible ». Avec des morceaux de chair encore accrochés aux meubles brisés, cette attaque symbolisait la réalité quotidienne de Gaza sous le siège.

Au même moment, les forces israéliennes ont ouvert le feu sur des foules de Palestiniens qui tentaient d'obtenir une aide alimentaire d'urgence dans le sud de Gaza. Selon l'Associated Press, au moins 22 personnes ont été tuées et 20 blessées alors qu'elles revenaient d'un point de distribution d'aide géré par la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), dirigée par Israël et les États-Unis.

L'hôpital Nasser de Khan Younis a reçu les dépouilles de 11 personnes abattues alors qu'elles revenaient du centre d'aide. Dix autres personnes ont été tuées dans un centre d'aide de l'ONU dans le nord de Gaza. Ces incidents s'inscrivent dans le cadre des massacres en cours sur les sites de distribution de la GHF, où 500 Palestiniens ont été tués au cours du mois dernier.

Le témoin oculaire Yousef Mahmoud Mokheimar a décrit les meurtres :

Ils ont tiré sur nous sans discernement. J'ai été touché à la jambe et un autre homme a été abattu alors qu'il essayait de m'aider.

Mokheimar a également vu des soldats appréhender six personnes, dont trois enfants, déclarant : « Nous ne savons pas s'ils sont encore en vie. »

L'attaque s'est produite alors que des civils empruntaient l'un des rares itinéraires disponibles pour revenir du centre de la GHF. Beaucoup avaient parcouru de longues distances, risquant leur vie pour obtenir des moyens de subsistance de base.

Lundi, l'armée israélienne (IDF) a reconnu les informations faisant état de «dommages causés à des civils » sur les sites d'aide humanitaire. Un représentant de l'IDF a déclaré dans un communiqué :

À la suite d'incidents au cours desquels des dommages causés à des civils arrivés dans des centres de distribution ont été signalés, des enquêtes approfondies ont été menées au sein du commandement sud et des instructions ont été données aux forces sur le terrain à la lumière des enseignements tirés.

Cette déclaration creuse était la réponse de l'armée au  reportage publié vendredi par Haaretz, qui présentait des interviews de soldats israéliens affirmant avoir reçu l'ordre d'ouvrir le feu sur des foules non armées venues chercher de l'aide, dans le cadre d'une opération dont le nom fait apparemment référence au jeu meurtrier « feu rouge, feu vert » de la série télévisée de fiction Squid Games.

L'armée israélienne a justifié à plusieurs reprises ces meurtres en affirmant qu'elle tirait des « coups de semonce » pour disperser les foules qu'elle considère comme des « terroristes présumés » ou des menaces. Elle ajoute désormais qu'elle s'efforce d'améliorer sa « réponse opérationnelle » en installant des clôtures et des panneaux de signalisation dans les zones d'aide humanitaire.

Johnnie Moore, directeur de la GHF, qui est également commissaire de la Commission américaine sur la liberté religieuse internationale et cofondateur et président du Congrès des leaders chrétiens, a défendu les opérations de l'organisation et accusé l'ONU et d'autres agences de diffuser des informations non fondées. Le premier ministre israélien Benjamin Nétanyahou a rejeté les informations faisant état d'attaques délibérées sur des civils, les qualifiant de « mensonges malveillants », tandis que l'armée israélienne a nié avoir donné l'ordre à ses troupes de tirer sur des personnes non armées venues chercher de l'aide.

Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a déclaré que « la recherche de nourriture ne doit pas être une condamnation à mort » et a qualifié l'opération d'aide humanitaire actuelle d'« intrinsèquement dangereuse », appelant à un cessez-le-feu immédiat. D'autres ont qualifié l'opération de piège mortel délibérément créé pour abattre des civils palestiniens non armés.

Lundi soir, les Nations unies ont publié une déclaration condamnant les attaques israéliennes contre les Palestiniens qui attendent de la nourriture, ainsi que les frappes contre les maisons, les écoles et les hôpitaux qui abritent des familles déplacées. Le Conseil de sécurité des Nations unies a entendu des appels urgents en faveur d'un cessez-le-feu et pour qu'Israël autorise un accès humanitaire sans restriction.

L'UNICEF a signalé que plus de 5000 enfants de moins de cinq ans ont été admis pour malnutrition aiguë rien qu'au mois de mai, soulignant la crise humanitaire catastrophique. Une déclaration de l'UNICEF indique :

Les souffrances à Gaza sont effroyables et ne peuvent continuer. Nous avons besoin d'un cessez-le-feu immédiat. Israël doit laisser l'ONU sauver des vies, ouvrir toutes les voies d'accès et autoriser l'entrée de carburant à Gaza.

Les frappes israéliennes de lundi ont également visé la cour de l'hôpital Al-Aqsa à Deir el-Balah, où des milliers de personnes avaient trouvé refuge. Tareq Abu Azzoum, journaliste à Al Jazeera, a rapporté que l'armée n'avait donné aucun avertissement avant l'« immense explosion » qui a détruit les tentes abritant des familles déplacées.

« Ce n'est pas la première fois que la cour de l'hôpital est touchée. Les forces israéliennes ont attaqué cette installation au moins dix fois », a-t-il déclaré, soulignant les attaques répétées contre des centres médicaux qui fonctionnent à peine.

Alors que les tueries quotidiennes se poursuivent, le premier ministre Nétanyahou prévoit de se rendre à Washington la semaine prochaine pour rencontrer le président Donald Trump. La Maison-Blanche présente cette visite comme s'inscrivant dans le cadre des « pourparlers de cessez-le-feu », mais cette rencontre est largement considérée comme une réunion de planification de la prochaine étape de l'opération de nettoyage ethnique menée par Israël à Gaza.

La preuve en a été apportée dimanche lorsqu'Israël a ordonné aux Palestiniens d'évacuer certaines parties du nord de Gaza avant l'intensification des opérations militaires. Les habitants des quartiers de la ville de Gaza et de Jabalia ont reçu l'ordre de se diriger vers le sud, vers la zone côtière d'al-Mawasi, alors que les opérations militaires israéliennes «s'intensifient et s'étendent vers l'ouest ».

(Article paru en anglais le 1er juillet 2025)

Source : WSWS
 wsws.org

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