17/07/2016 altermonde-sans-frontiere.com  3min #115324

 La chasse aux terroristes : avant ou après ?

État d'urgence : toujours Non

Par Paul Alliès

La preuve est hélas cruellement administrée : l'État d'urgence est inadapté à la protection des Français. Pourtant François Hollande, après l'avoir a demi admis lors de sa conférence de presse du 14 juillet vient d'en relancer l'usage pour trois mois.

Le pays sera donc resté onze mois dans un régime d'exception que la loi du 3 juin dernier a commencé à normaliser. L'inversion des principes fondamentaux du Droit est ainsi en train de se banaliser sans débat. Répétons-le, on passe dans un système gouverné par la suspicion. Depuis le 14 novembre 2015, ce sont près de 500 personnes qui ont été assignées à résidence sans que le moindre acte répréhensible puisse être relevé à leur encontre. Et elles n'ont « bénéficié » d'aucune procédure judiciaire leur permettant de faire valoir leurs Droits. Pour cela il a suffit que le gouvernement remplace le terme d'« activité » qui figurait dans la loi de 1955 par celui de « comportement » dans la loi du 20 novembre 2015.

Désormais « des raisons sérieuses de penser que (le) comportement d'une personne constitue une menace pour la sécurité et l'ordre public » sont la base particulièrement floue de mesures attentatoires aux libertés dont l'assignation à domicile est le fleuron. Le bilan de ces abus de Droit (3 600 perquisitions administratives, quelque 200 incarcérations, sans compter quelques centaines d'interpellations et contrôles judiciaires) a été jugé par les commissions parlementaires comme particulièrement inefficaces (5 enquêtes préliminaires et 3 mise en examen). Le prolongement de l'État d'urgence relève donc plus de la communication que de la lutte efficace contre le terrorisme.

En regard, l'accumulation des failles, incohérences, manquement des services de renseignement et de prévention des attentats est proprement spectaculaire. Il en devient scandaleux quand on voit comment le ministre de l'intérieur traite par le mépris le travail et les propositions concrètes des commissions d'enquête parlementaire, la première présidée par Jean Jacques Urvoas en décembre 2015 comme celle présidée par Georges Fenech en juin 2016. Mais n'est-on pas là dans la vérité d'un régime paradoxalement inadapté à la situation que nous vivons : Le Président et quelques ministres gouvernent au mépris de la souveraineté nationale représentée par le Parlement. L'enseignement est double : ce pouvoir accumule les preuves d'une incompétence générale et grandissante (depuis ses flottements sur la déchéance de nationalité jusqu'à ceux sur l'interdiction de manifester).

Avec son invocation toujours plus brouillonne de la guerre que nous vivrions, il fait s'installer une régression des Droits et Libertés fondamentales chèrement conquises au cours des siècles précédents. C'est un formidable cadeau à tous ceux qui voudraient diviser la société et attenter à la démocratie qui la fonde.

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