Le président, le gouvernement et des députés de la majorité avaient promis ces derniers mois que le pass sanitaire ne serait pas étendu aux restaurants, cinémas ou centres commerciaux. C'est pourtant la mesure que vient d'annoncer le chef de l'État.
L'art de se contredire mentir. Qu'il s'agisse du président Emmanuel Macron ou de plusieurs députés de la majorité, de nombreuses figures de La République en Marche avaient promis ces derniers mois que le projet de pass sanitaire contre le Covid-19 serait réservé aux grands rassemblements et ne s'appliquerait pas aux lieux de la vie courante.
Mais le 12 juillet, le chef de l'Etat a annoncé que ce pass sanitaire (attestant d'une vaccination complète ou d'un test négatif) serait finalement demandé à partir de début août à l'entrée de la plupart des lieux publics. La vaccination pour les soignants et ceux au contact des personnes fragiles a également été rendu obligatoire avant le 15 septembre, sanctions à la clef. Les forces de l'ordre ne seraient en revanche pas concernées par l'obligation vaccinale.
«Je l'ai dit, je le répète : le vaccin ne sera pas obligatoire», assurait pourtant le président le 27 décembre 2020.
La vaccination n'est effectivement toujours pas obligatoire, mais les prochaines restrictions pour ceux qui n'ont pas reçu la double injection ressemblent bien à une obligation vaccinale déguisée, ou du moins à un «petit coup de pression» pour franchir le pas, selon les termes ce 13 juillet sur RTL du chef des députés LREM Christophe Castaner.
Des élus LREM avaient certifié qu'il n'y aurait pas d'extension du pass sanitaire
Emmanuel Macron avait aussi promis le 29 avril, au moment de présenter son nouveau plan de déconfinement, que le pass sanitaire «ne saurait être obligatoire pour accéder aux lieux de la vie de tous les jours comme les restaurants, théâtres et cinémas, ou pour aller chez des amis».
Quelques jours plus tard, son ministre de la Santé Olivier Véran se voulait rassurant, affirmant notamment au sujet du pass : «Ce n'est pas du tout quelque chose qui vise à exclure ou qui vise à contraindre. Si je ne suis pas vacciné je pourrai toujours [me rendre au café ou au cinéma].»
Quant au secrétaire d'Etat chargé du Numérique Cédric O, il assurait lui aussi fin avril sur Europe 1 que pour «aller dans un restaurant, aller dans un cinéma, aller dans un théâtre, aller faire son shopping, on n'utilisera pas le pass sanitaire, c'est sûr», expliquant que l'exécutif avait écarté «le quotidien car cela ne correspond ni à la culture française ni à la temporalité de l'épidémie».
Lors de l'examen du projet de loi de sortie progressive de l'état d'urgence sanitaire, le 11 mai, le rapporteur LREM Jean-Pierre Pont avait vanté le pass sanitaire, un dispositif «entouré de garantie suffisante car il ne s'appliquera pas aux activités quotidiennes», à savoir les restaurants, les cinémas ou les théâtres par exemple.
« Ce serait excessif, nous ne voulons pas d'une société à deux vitesses »
Le même jour, sa collègue marcheuse Yaël Braun-Pivet défendait son propre amendement empêchant le pass sanitaire de «concerner les actes du quotidien» : «Une inscription noir sur blanc dans la loi protectrice des droits et libertés de nos concitoyens», soulignait-elle.
Le lendemain, 12 mai, c'est le secrétaire d'Etat aux Affaires européennes Clément Beaune qui promettait qu'il n'y aurait «pas de pass sanitaire au quotidien, pour les cafés ou les restaurants, en France». «Ce serait excessif, nous ne voulons pas d'une société à deux vitesses», ajoutait-il sur France 2, reprenant alors l'un des arguments avancés par les opposants à la mesure.
Enfin, Adrien Taquet, le secrétaire d'Etat chargé de l'Enfance et des familles, rattaché au ministère de la Santé, certifiait le 25 mai à l'Assemblée nationale que «le pass sanitaire sera[it] réservé aux grands événements, en aucun cas pour aller dans un commerce alimentaire ou dans un restaurant».
Retraites : quand Macron assurait qu'il ne toucherait pas à l'âge de départ
Le chef de l'Etat a par ailleurs saisi l'occasion de son allocution consacrée à la crise sanitaire pour avancer ses pions sur les très décriées réformes de l'assurance-chômage et des retraites.
S'il n'a pas avancé de calendrier pour cette dernière, il a néanmoins promis de la mettre en œuvre «dès que les conditions sanitaires [seraient] réunies», affirmant notamment : «Nous vivons plus longtemps, il faudra donc travailler plus longtemps et partir à la retraite plus tard.»
En 2017 pourtant, Emmanuel Macron assurait dans son programme qu'il ne toucherait «pas à l'âge de départ à la retraite».
En 2019 encore, il affirmait : «Tant qu'on a pas réglé le problème du chômage dans notre pays, franchement, ce serait assez hypocrite de décaler l'âge légal [de départ à la retraite].»
Et le président de la République de poursuivre son raisonnement : «Quand aujourd'hui on est peu qualifié, quand on vit dans une région qui est en difficulté industrielle, quand on est soi-même en difficulté, qu'on a eu une carrière fracturée, bon courage déjà pour arriver jusqu'à 62 ans ! C'est ça la réalité de notre pays !»