Au moins 28 personnes ont été tuées et des dizaines blessées par l'explosion dans la nuit du 14 au 15 août d'une citerne d'essence dans un village de nord du Liban, où des résidents tentaient de s'approvisionner en carburant, en pénurie dans un pays en plein effondrement.
L'armée a indiqué dans un communiqué le 15 août, qu'une citerne de carburant qu'elle «avait été confisquée pour distribuer [son contenu] aux citoyens» avait explosé peu avant 2h00 locales (23h GMT) dans la région du Akkar, dans l'extrême nord du pays, faisant état de militaires parmi les dizaines de blessés.
L'explosion, qui avive le terrible souvenir de celle du port de Beyrouth le 4 août 2020 (plus de 200 morts), intervient alors que l'armée s'était déployée le 15 août dans des stations-service pour y stopper le stockage de carburant à des fins de spéculation, après la récente annonce de la décision de la Banque centrale de lever les subventions sur les carburants.
Selon un nouveau bilan communiqué par le ministère de la Santé, l'explosion a fait 28 morts. Parmi les victimes figurent des civils qui attendaient de pouvoir s'approvisionner en essence.
L'explosion aurait eu lieu, selon l'Agence nationale d'information, après des bagarres entre des résidents qui s'étaient attroupés pour se procurer de l'essence. A l'hôpital Geitawi à Beyrouth, où neuf personnes brûlées dont trois dans un état critique ont été transportées, la colère et la consternation dominent.
Des images dures circulent sur les réseaux sociaux
Sur les réseaux sociaux, des images montrent des scènes d'horreur. Au moins sept corps et des dizaines de personnes brûlées ont été transférés dans un hôpital du Akkar, a indiqué un employé, Yassine Metlej. «Les cadavres sont tellement carbonisés qu'on ne peut pas les identifier», a-t-il dit à l'AFP. «Certains n'ont plus de visage, d'autres plus de bras», a-t-il ajouté.
L'hôpital a dû refuser la plupart des blessés car il n'est pas équipé pour soigner les grands brûlés, a-t-il encore ajouté. Certaines victimes ont été emmenées à 25 km de là, à l'hôpital Al-Salam de Tripoli, le seul de la région équipé pour prendre en charge des personnes grièvement brûlées.
Le ministre intérimaire de la Santé, Hamad Hassan, a ordonné à tous les hôpitaux du pays «d'accueillir les blessés de cette douloureuse tragédie aux frais du ministère».
Le président Michel Aoun a appelé à l'ouverture d'une enquête sur les circonstances de l'explosion - celle du port de Beyrouth n'a abouti à aucun résultat à ce jour. Il a également appelé à une réunion urgente du conseil de défense du pays dans la journée, a indiqué son bureau.
Crise politique, économique et désastres ponctuent la vie au Liban depuis 2019
Le Liban connaît un effondrement économique depuis fin 2019, et subit des pénuries en tout genre, notamment en carburants, qui affectent l'approvisionnement en biens de première nécessité. Elle se double d'une crise politique sans fin : le gouvernement sortant a démissionné il y a un an, au lendemain de l'explosion dévastatrice du port de Beyrouth, et les forces politiques n'en ont toujours pas formé un nouveau, malgré les pressions internationales.
Les réserves de la Banque centrale ont fondu tandis que la livre libanaise a perdu plus de 90% de sa valeur face au dollar, rendant les coûts d'importation plus onéreux. Le billet vert s'échange aujourd'hui sur le marché noir à plus de 20 000 livres, contre un taux officiel maintenu à 1 507 livres.
Plusieurs établissements ont dû fermer leurs portes, faute de diesel pour alimenter les générateurs privés, tandis que les pannes de courant culminent à plus de 22 heures par jour.
L'hôpital de l'Université américaine de Beyrouth (AUBMC), un des principaux hôpitaux privés du pays, a mis en garde le 14 août contre un «désastre imminent», se disant contraint de cesser ses activités dans les 48 heures s'il n'obtenait pas de carburant. «Quarante malades adultes et 15 enfants, sous respirateurs, mourront immédiatement», s'est alarmé l'AUBMC dans un communiqué.
Des queues interminables se sont formées le 15 août devant des stations-service tandis que des camions de distribution de carburant étaient pris d'assaut par des citoyens en colère, selon des médias locaux. Certaines stations-service ont fermé pour conserver du stock de carburant en attendant une hausse des prix.
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