23/08/2021  12 min #194046

La relativité générale

La relativité restreinte est limitée aux référentiels inertiels. Un référentiel inertiel est un référentiel qui se déplace en mouvement rectiligne uniforme. C'est un mouvement qui se fait en absence de toute force. La vitesse est constante et la trajectoire est rectiligne. Tous les référentiels inertiels sont en mouvement rectiligne uniforme les uns par rapport aux autres. Le référentiel inertiel satisfait au principe d'inertie qu'on peut formuler d'une manière générale sous la façon suivante : « dans le vide, si un corps matériel est isolé (n'est soumis à aucune force extérieure), alors il demeure au repos ou en mouvement rectiligne uniforme, éternellement, tant qu'il reste isolé ». Sa réciproque est également vraie.

La relativité restreinte n'intègre pas la gravitation. Celle-ci est le sujet de la relativité générale. La relativité générale est une théorie d'espace géométrique quadridimensionnel courbe. Dans sa théorie de la relativité générale, Einstein a physicalisé la géométrie non euclidienne, contrairement à Newton qui a géométrisé l'espace physique ordinaire (intuitif). Einstein a donné à un espace géométrique quadridimensionnel non euclidien un sens physique sous le concept de l'espace-temps au sein duquel la gravitation a trouvé une interprétation différente de celle de Newton. Einstein a généralisé la métrique de l'espace-temps de Minkowski (l'espace-temps de la relativité restreinte) en l'étendant à un espace-temps courbe. Il a transposé dans l'espace-temps de Minkowski les résultats obtenus par Riemann pour les espaces courbes. Le sens physique qu'a donné Einstein à la courbure de cet espace-temps est une interprétation physique de la gravitation dans le cadre de la relativité générale. Plus précisément, la force gravitationnelle de Newton est remplacée par un mouvement libre dans un espace-temps courbe. Au lieu de dire qu'un corps est soumis à une force gravitationnelle exercée, par exemple, par une étoile, on peut dire que ce corps est spontanément et librement en mouvement suivant une géodésique de l'espace-temps incurvé par cette étoile. La géodésique est le chemin le plus court entre deux points distincts. En d'autres termes, dans la relativité générale, le champ gravitationnel engendré par une masse est équivalent à l'incurvation de l'espace-temps par cette masse.

Pour aborder sa relativité générale, Einstein a commencé par élaborer deux principes de base, à savoir le principe de relativité générale et le principe d'équivalence.

1. Le principe de relativité générale
Le principe de relativité restreinte

Einstein a énoncé dans le fondement de sa théorie de la relativité restreinte le principe suivant appelé le principe de relativité restreinte : « les phénomènes de la nature se déroulent conformément aux mêmes lois physiques générales dans tous les référentiels inertiels ».

Le principe de relativité générale

Einstein a généralisé le principe de relativité restreinte sous la forme qu'on appelle le principe de relativité générale et qu'on peut énoncer de la façon suivante : « tous les référentiels, quel que soit leur état de mouvement, sont équivalents pour la description de la nature ». Ces référentiels peuvent être des référentiels inertiels ou des référentiels non inertiels.

2. Le principe d'équivalence

Nous allons formuler trois principes : le principe1 (le principe de l'égalité de la masse inerte et de la masse pesante), le principe2 (le principe de l'égalité du champ gravitationnel et de l'accélération) et le principe dit aussi principe d'équivalence.

2.1. Principe 1

Einstein a posé le principe suivant appelé le principe de l'égalité de la masse inerte et de la masse grave. On l'énonce comme suit : « la masse inerte est égale à la masse grave ». On écrit alors : m = mi = mg. Autrement dit la masse inerte et la masse grave sont deux aspects d'un même phénomène physique.

La masse inerte mi (ou la masse inertielle) est la masse que contient à la formule F=mi.a (le principe fondamental de la dynamique de Newton). Le nombre F est l'intensité de la force agissant sur un point matériel de masse inerte mi. Le nombre a est l'intensité de l'accélération que produit cette force sur ce point.

La masse grave mg (ou la masse gravitationnelle ou la masse pesante) est la masse que contient la formule P=mg.g. C'est une expression simplifiée de la loi de gravitation universelle de Newton (P=G mg Mg /d2). Le nombre P est l'intensité de la force exercée par la Terre sur un point matériel de masse mg. Le nombre g est l'intensité de la pesanteur (la gravitation terrestre). La masse mg est une charge gravitationnelle, en faisant une analogie avec la charge électrique q dans la force de Coulomb F = q.E, le nombre E étant l'intensité du champ électrique.
Remarques :

Grâce à son inertie, la masse peut avoir une vitesse ou être au repos même si aucune force ne lui est appliquée. La force ne fait que varier la vitesse, donc produire une accélération, d'où la formule F=mi.a.

Grâce à leur masse grave mp et Mp, deux corps s'attirent conformément à la formule (P=G mp Mp /d2). C'est-à-dire ils s'attirent en proportion de chacune de leur masse, suivant une force dirigée l'un vers l'autre le long de la ligne joignant leur centre de gravité, et en proportion inverse du carré de la distance qui les sépare. En particulier, l'attraction exercée par la Terre sur un corps est son poids.

L'égalité des masses inertes et des masses graves était une constatation expérimentale avant qu'elle soit admise par Einstein. Les mesures du rapport mg/mi étaient toujours très proches de un. D'où une égalité approchée des deux masses. Einstein a posé comme principe l'égalité des deux masses.

mi = mg implique qu'on tombe de la même manière (avec la même vitesse) en chute libre. Un corps en chute libre est un corps lâché sans vitesse initiale et qui tombe grâce à la pesanteur (la gravitation terrestre) qui est la seule force à laquelle est soumis ce corps. Un référentiel lié à un corps en chute libre est un référentiel inertiel. Un corps en chute libre est un exemple pratique de référentiel inertiel. Il n'existe aucune force dans le référentiel inertiel. Les corps qui s'y trouvent sont au repos ou en mouvement rectiligne uniforme quand ils sont libres (quand ils ne subissent aucune force).

2.2. Principe 2

Einstein a posé aussi le principe suivant que nous pouvons appeler le principe de l'égalité du champ gravitationnel et de l'accélération. Nous l'énonçons de la façon suivante : « un référentiel muni d'un champ de gravitation statique et homogène est équivalent à un référentiel soumis à une accélération uniforme, le vecteur représentant cette accélération étant opposé au vecteur représentant ce champ de gravitation ». Statique : n'évolue pas dans le temps.

Pour illustrer ce principe, faisons une expérience de pensée inspirée d'une expérience de pensée faite par Einstein. Soit (Rs) le référentiel lié au sol (le sol représente la Terre). Le sol possède un champ gravitationnel (la pesanteur g). Soit un ascenseur en chute libre. Soit (Ra) le référentiel lié à cet ascenseur. L'observateur qui se trouve dans (Ra) (dans l'ascenseur) ne peut pas détecter si l'ascenseur est soumis à la pesanteur ou s'il est soumis à une accélération opposée à la pesanteur. Par principe, Einstein pose que l'ascenseur soumis à la pesanteur (la force gravitationnelle terrestre dirigée vers le bas) est équivalent à l'ascenseur soumis à l'accélération opposée à la pesanteur, cette accélération étant dirigée vers le haut et ayant la même intensité que la pesanteur.

Remarques :

Par rapport au référentiel (Rs) (lié au sol) l'ascenseur est soumis à la pesanteur. Mais dans le référentiel (Ra) (lié à l'ascenseur en chute libre) il n'y a pas de champ gravitationnel. Les objets qui s'y trouvent sont au repos ou en mouvement rectiligne uniforme. Ils flottent. Si on les lâche sans vitesse initiale ils restent au repos. Et si on les lâche avec une vitesse initiale, ils se meuvent avec cette vitesse qui reste constante. Ils restent en mouvement rectiligne uniforme.

Dans un référentiel inertiel, les trajectoires sont des lignes droites.

Un référentiel muni d'un champ gravitationnel est équivalent à un référentiel sans gravitation mais accéléré.

2.3. Principe d'équivalence

A partir du principe2 (ou du principe1) et du principe de relativité générale, on formule le principe suivant appelé le principe d'équivalence : « dans un champ de gravitation, il est toujours possible, en tout point de l'espace, de choisir un référentiel inertiel (par exemple un référentiel en chute libre) dans lequel les lois de la physique sont localement identiques à celles en l'absence de champ gravitationnel ». Ce principe est le point de départ pour déterminer la physique de la relativité générale, en commençant par déterminer la métrique de l'espace-temps courbe, les géodésiques de cet espace et l'équation de la courbure de cet espace.
Remarques

Le principe 1 et le principe 2 sont des principes d'équivalence. Mais ce dernier (2.3. Principe d'équivalence) les résume et les combine avec le principe de relativité général, de façon à en donner une forme pratique qui permet de faire des calculs. C'est pourquoi on peut lui donner aussi le nom de principe d'équivalence.

Le principe d'équivalence permet de passer de la relativité restreinte à la relativité générale, en généralisant l'espace-temps de la relativité restreinte. Plus précisément, le principe d'équivalence permet de faire de la physique dans un repère inertiel et de faire par la suit un changement de référentiel en passant du référentiel inertiel au référentiel non inertiel, en admettant que le champ de gravitation est équivalent à la courbure de l'espace-temps.

3. Les équations des géodésique
La métrique et la géodésique dans un référentiel inertiel :

Soit un référentiel non inertiel (Rs). C'est par exemple un référentiel lié à la Terre qui possède un champ de gravitation. Ce champ est assimilé à un espace-temps courbé. L'espace-temps non euclidien (courbé) varient d'un point à un autre. Localement, au voisinage infinitésimal d'un point quelconque de cet espace-temps courbé, considérons un référentiel inertiel (Ra) conformément au principe d'équivalence. Dans le référentiel inertiel (Ra) on montre qu'on a la métrique suivante appelée la métrique de Minkowski :
ds² = dx0² + dx1² + dx2² + dx3², avec dx0 = ict. Les coordonnées (x0,x1,x2,x3) sont choisies dans le repère inertiel (Ra). On peut écrire aussi : ds² = -c²t² + dx1² + dx2² + dx3². On peut écrire encore cette égalité sous la forme d'une somme simplifiée suivante :

ds² = Mij dxidxj, les fonctions Mij sont les constantes : M00 = M11 = M22 = M33 = 1 et Mij = 0 si i et j sont différents. Ces constantes expriment que la courbure est nulle dans la métrique de Minkowski. En résumé, la métrique de Minkowski est caractérisée mathématiquement par la relation (1) ds² = Mij dxidxj (c'est une somme sur les indices i et j allant de 0 à 3). Cette métrique est une métrique d'un référentiel inertiel. Elle exprime l'absence de courbure dans ce référentiel. Les géodésiques dans ce repère sont des lignes droites. Il n'y a pas de gravitation dans le référentiel inertiel. Les géodésiques sont des droites. D'où la relation
(2) d²xi/ds² = 0 qui exprime ces géodésiques droites. C'est une dérivée seconde par rapport à la quantité ds qui représente un intervalle infinitésimal entre deux évènement. C'est l'intervalle exprimé par la métrique (1) ds² = Mij dxidxj.
Remarque :

La quantité ds² = Mij dxidxj est invariante par changement de référentiel inertiel (quand on passe d'un référentiel inertiel à un autre). Mais elle varie quand on passe à un référentiel non inertiel. Elle n'est constante que pour les référentiels inertiels.
La métrique et les géodésiques dans un référentiel non inertiel :

Nous venons de faire remarquer que dans le référentiel inertiel (Ra) on a la métrique (1) ds² = Mij dxidxj et la géodésique droite (2) d²xi/ds² = 0. On fait un changement de référentiel pour passer de (Ra) au référentiel non inertiel (Rs) lié à l'espace-temps courbe, sachant que l'espace-temps non euclidien (courbe) varie d'un point à un autre. Plus précisément nous passons des relations (1) ds² = Mij dxidxj et (2) d²xi/ds² = 0 aux relations homologues qui expriment la métrique et la géodésie dans le référentiel non inertiel (Rs). Un calcul différentiel permet d'obtenir à partir de ces deux relations les relations suivantes :
(1') ds² = gij dyidyj, avec gij = Mij.D, où l'expression D représente le produit de deux dérivées partielles des coordonnées xi dans (Ra) par rapport aux nouvelles coordonnées yi dans le référentiel non inertiel (Rs). Ainsi les expressions gij ne sont pas nulles. Elles expriment bien localement les courbures de l'espace-temps. Elles expriment la métrique dans un référentiel non inertiel.

En ce qui concerne les géodésiques dans le référentiel non inertiel (Rs) on obtient l'équation (2') d²yi/ds² = L.H, où l'expression H représente le produit de deux dérivées partielles des nouvelles coordonnées yi dans le référentiel non inertiel (Rs) par rapport à l'intervalle infinitésimal ds. L'expression L représente la courbure de Levi-Civita associée à gij (dans la métrique (1') ds² = gij dyidyj). En résumé, dans le référentiel non inertiel (Rs) on a la métrique (1') ds² = gij dyidyj et les géodésiques courbes (2') d²yi/ds² = L.H.

4. L'équation d'Einstein

L'équation d'Einstein ne possède pas de démonstration. On l'admet. Pour répondre à la question comment la masse crée la courbure, Einstein a d'abord crée un tenseur Gij pour la courbure et un tenseur Tij pour la masse et l'énergie. Puis il a fait l'hypothèse (il a posé) que ces deux grandeurs Gij et Tij sont proportionnelles l'une à l'autre. Cette proportionnalité est l'équation qui porte son nom. On l'écrit sous la condensée suivante : Gij = (8piG/c4)Tij. Le tenseur Gij s'appelle le tenseur d'Einstein. Il décrit la courbure de l'espace-temps. Le tenseur Tij décrit le contenu de l'espace-temps en matière et énergie. Le coefficient de proportionnalité (8piG/c4) est fixé de façon à ce qu'on retrouve les lois de Newton quand la gravité est faible. G est la constante gravitationnelle de Newton et c la vitesse de la lumière dans le vide. Cette équation (l'équation d'Einstein) lie l'espace-temps à son contenu. Voilà la réponse à la question comment la masse crée la courbure. L'expression de cette équation montre aussi que l'espace-temps n'est pas un contenant immuable mais il est une grandeur en évolution. Il agit sur ses objets et réciproquement ces derniers agissent sur lui. L'équation d'Einstein (Gij = (8piG/c4)Tij) est un système d'équation différentielles non linéaires qui permettent de trouver la géométrie de l'espace-temps autour de son contenu matériel. L'objectif de l'équation, c'est la détermination de la courbure de l'espace-temps. C'est l'objectif de la relativité générale (l'étude de la gravitation).

Le tenseur d'Einstein Gij s'écrit : Gij : Rij -(1/2)gijR. Le tenseur Rij est le tenseur de Ricci ; R est la courbure scalaire ; gij est la métrique de l'espace-temps courbe. En remplaçant cette expression dans la première équation Gij = (8piG/c4)Tij, on trouve l'expression courante de l'équation d'Einstein : Rij -(1/2)Rgij = (8piG/c4)Tij.

La forme (I) Rij -(1/2)Rgij = (8piG/c4)Tij est symétrique par permutation de ses tenseurs : le tenseur masse-énergie Tij va vers le premier membre de l'équation, tandis les tenseurs de courbure vont vers le deuxième membre. Et on prend l'inverse de la quantité (8piG/c4), c'est-à-dire on prend (c4/8piG) dans la deuxième expression. Alors l'équation (I) devient :

(II) Tij -(1/2)Tgij = (c4/8piG)Rij. Cette équation (II) est équivalente à l'équation (I). En écrivant l'équation (II) sous la forme condensée on obtient : T = k.R, avec k = c4/8piG. Nous pouvons comparer grossièrement cette forme avec la relation de Newton : f = m.a, où la force f est reliée à l'accélération a, le coefficient de proportionnalité étant la masse m. On peut lire : « la force f produit l'accélération a ». Parallèlement à cela on peut lire dans la relation T = k.R : « le tenseur T de la masse-énergie produit le tenseur R de la courbure de l'espace-temps ».

Mohamed Salihi 16/08/2021

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