28/10/2022 infomigrants.net  4 min #218008

Plus de 16 000 Tunisiens arrivés en Italie depuis le début de l'année

Des Tunisiens près du hotspot de Lampedusa. Crédit : Mehdi Chebil pour InfoMigrants

Depuis le début de l'année, 16 292 migrants tunisiens sont arrivés en Italie, selon des chiffres du ministère de l'Intérieur italien annoncés par le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES)  dans son rapport mis à jour le 26 octobre.

Alors que nous sommes encore en octobre, c'est déjà un record annuel. En 2021, les autorités italiennes dénombraient 14 342 Tunisiens arrivés sur leurs côtes, et 11 212 en 2020.

La période estivale a été, comme chaque année, la plus propice aux traversées. Plus de 3 000 Tunisiens sont parvenus à traverser la Méditerranée pour atteindre l'Italie en juillet, et plus de 4 000 en août. Cela revient, en moyenne, à plus d'une centaine de personnes par jour.

De plus en plus de mineurs et de familles

Parmi les exilés tunisiens arrivés en Italie, on compte 3 430 mineurs, relaie le FTDES. Soit près de 20% des migrants ayant tenté cette dangereuse traversée de la Méditerranée centrale. Là encore, c'est davantage que les années précédentes : on en comptait 2 492 en 2021, et encore un peu moins, 1 607, en 2020.

Jusqu'ici, les Tunisiens prenant la mer étaient essentiellement de jeunes hommes, subissant le chômage de plein fouet. Aujourd'hui, "ce qui est nouveau, c'est que des familles entières, avec des enfants, partent aussi, pour tenter d'atteindre l'Italie, la France... Il y a un changement socio-démographique des personnes qui prennent les embarcations", alertait Jamel Msallem, président de la Ligue tunisienne pour la défense des droits de l'Homme, auprès d'InfoMigrants mi-octobre.

De fait, le nombre de femmes est en augmentation. Depuis début 2022, 828 sont arrivées sur le sol italien, selon le rapport du FTDES. Elles n'étaient que 523 en 2021, et 307 en 2020.

Surtout, leur proportion augmente légèrement au fil des années. Elles sont deux fois plus nombreuses parmi les migrants arrivés en Italie en 2022 (un peu plus de 5%) qu'en 2020 (2,7%).

Ces statistiques restent, dans une certaine mesure, sous-estimées, rappelle FTDES. L'organisation interpelle sur les "chiffres invisibles", à savoir "le nombre de migrants qui atteignent les côtes européennes sans passer par les autorités locales ou les structures internationales et ne se retrouvent pas dans un recensement", explique-t-elle dans son rapport. "Ce sont des chiffres importants et qui diffèrent selon les tactiques des réseaux des passeurs de migrants."

Au moins 544 décès et disparitions depuis le début de l'année

En outre, le FTDES comptabilise 544 personnes décédées ou disparues sur cette route depuis le début de l'année, toutes nationalités comprises. Le printemps a été la période la plus meurtrière, avec un pic à 145 décès et disparus au mois d'avril.

En parallèle, les autorités tunisiennes ont empêché 29 129 migrants de quitter les côtes tunisiennes en direction de l'Italie, depuis le début de l'année. Pour tenir ce décompte, le FTDES s'est basé sur les rapports du ministère de l'Intérieur tunisien ainsi que sur les déclarations du porte-parole de la Garde Nationale dans la presse. En octobre, pas moins de 4 109 exilés ont déjà été interceptés ainsi.

Jamel Msallem appelle plutôt, lui, à agir sur les causes socio-économiques de ces départs. Parmi les raisons qui poussent les Tunisiens à prendre tous les risques pour rejoindre l'Europe :  une crise économique aigüe, qui empêche nombre d'entre eux d'y envisager un quelconque avenir. La Tunisie compte quatre millions de pauvres, sur une population de près de 12 millions d'habitants.

"L'Union européenne doit changer sa politique migratoire et stabiliser la situation avec le gouvernement tunisien, en injectant notamment des capitaux afin de créer des emplois, et donc diminuer ce flux migratoire", soutenait le responsable de l'ONG mi-octobre à InfoMigrants.

 infomigrants.net

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