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Le patron de la CFDT Laurent Berger, avec les leaders des autres syndicats en arrière-plan, en juillet 2020 (image d'illustration).
Olivier Véran «n'a pas les bons capteurs dans le monde du travail», a déclaré le 12 janvier le patron de la CFDT, Laurent Berger, après les propos du porte-parole du gouvernement tenus la veille : ce dernier avait en effet affirmé ne pas se projeter «dans l'idée d'une mobilisation massive» contre la réforme des retraites, à une semaine de la première journée de protestation syndicale.
«Je crois qu'Olivier Véran []... n'a pas les bons capteurs dans le monde du travail. Ce que je peux vous dire c'est que ça [la réforme] provoque beaucoup de «colère», et beaucoup de ressentiment», a déclaré sur France Culture le dirigeant cédétiste. «Je trouve ça très imprudent que le porte-parole du gouvernement commence à dire "on n'y croit pas, ça va pas marcher, il n'y aura pas beaucoup de manifestants"», a-t-il poursuivi.
Sans s'engager sur le niveau de participation à la manifestation du 19 janvier, à laquelle appellent l'ensemble des organisations syndicales, Laurent Berger a jugé qu'il n'y avait pas besoin «dans cette période []... d' une forme de mépris, ou de condescendance, en disant "ça va râler un peu dans les coins, mais globalement ça va passer"».
Le secrétaire général de la CFDT a de plus mis en garde contre la colère du corps social, qui pourrait finir par faire le jeu de «l'extrême droite». «S'il n'y a pas une mobilisation dans la rue énorme, de toute façon le ressentiment s'exprimera différemment», a-t-il pronostiqué, estimant que cette colère «s'exprimera un jour ou l'autre dans les urnes et notamment du côté de l'extrême droite». Dans le monde du travail []... il y a un profond sentiment de délaissement», a-t-il conclu.
Borne appelle les syndicats à «ne pas pénaliser les Français»
En première ligne pour défendre le projet, la Premier ministre Elisabeth Borne a appelé de son côté les syndicats à «ne pas pénaliser les Français» dans le cadre de leur mobilisation, en leur lançant un «appel à la responsabilité» en marge d'un déplacement à Disneyland Paris.
« Il y a un droit de grève, il y a un droit à manifester», a-t-elle rappelé, mettant sur le même plan la nécessité de ne pas gêner les Français qui ne se joindront pas à la protestation, alors que les syndicats CGT de la branche pétrole font planer le risque d'un blocage des raffineries et d'une réédition des pénuries qui ont touché le pays à l'automne, à l'occasion d'un long conflit sur les salaires. «On peut faire grève mais il faut aussi être attentif au quotidien de nos concitoyens», a insisté le chef du gouvernement, invitant les syndicats à trouver d'autres «modes d'action» dans une période «compliquée».
Elisabeth Borne a présenté le 10 janvier son projet visant à reporter progressivement à 64 ans l'âge de départ à la retraite, au lieu de 62 ans actuellement, tout en accélérant l'allongement de la durée de cotisation. Les principaux syndicats sont unanimement opposés à cette réforme phare du programme d'Emmanuel Macron pour son second quinquennat, tandis que les sondages semblent montrer que les Français sont très majoritairement hostiles à ces mesures.
Ce qui n'a pas empêché la Premier ministre d'affirmer son souhait de «convaincre» que la réforme «est à la fois nécessaire pour rétablir l'équilibre de notre système de retraite par répartition», et que le projet est «également un texte de justice et de progrès». Elle a rappelé ce que le gouvernement considère être des «avancées sociales», sur les carrières longues, les métiers difficiles et la revalorisation des petites pensions.
L'appel commun des huit principaux syndicats (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, Solidaires, FSU) à la mobilisation le 19 janvier, dans une unité d'action inédite depuis 12 ans, touchera aussi bien le secteur privé que le public. Le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez a estimé le 11 janvier que la mobilisation serait «puissante».