21/03/2023 arretsurinfo.ch  6 min #225868

Objectif atteint dans le conflit en Ukraine?

President Biden with Chancellor Scholz, 3 mars 2023. Crédit photo: The White House

Par MARC Jean, le 21 mars 20223 -  Arretsurinfo.ch

Dans une récente contribution James Howard Kunstler observait : « Ne cherchez pas plus loin que le fiasco en Ukraine, conçu par les génies du service extérieur américain dans un exercice stupide visant à montrer au monde qui est qui et à quoi il est bon. Et, rappelez-moi : quelle était l'idée de base ? Paralyser et ligoter la Russie au point que son peuple renverse le seul chef d'État rationnel de la chrétienté » (1).

Je ne partage pas sur ce point l'opinion de James Howard Kunstler. Il ne faut pas s'imaginer que les « génies de service » soient stupides. En réalité, ils sont très intelligents et rusés. Le conflit en Ukraine est l'aboutissement d'une préparation minutieuse pendant des années, parfaitement et patiemment mise en œuvre, selon un agenda précis. Le but principal était de provoquer une scission irrémédiable entre l'Allemagne et la Russie. De repousser la Russie vers les steppes de l'Est, de détruire l'idée portée par le général de Gaulle d'une «  Europe de l'Atlantique à l'Oural ». Le Général (2s), Jean-Bernard Pinatel, vice-président et membre fondateur de Geopragma écrit (2):

« Cette guerre contre la Russie va ériger un nouveau rideau de fer en Europe et contraint les Européens à se détourner de ce pays qui est pourtant proche de nous par les intérêts notamment face à l'islamisme, la culture, qui a été notre allié lors des deux guerres mondiales et qui est plus complémentaire sur le plan économique que les États-Unis ».

La réussite est totale. Sans avoir engagé un seul militaire otanien, sans aucune perte, les « proxénètes de guerre »(3) ont réussi à allumer la mèche d'un baril de poudre, et à provoquer un conflit fratricide entre deux peuples que tout devait au contraire réunir. Non, ces individus ne sont pas stupides, et leur projet a nécessité beaucoup d'habileté, de manipulation et de désinformation. Il leur a fallu pour réussir d'abord subvertir l'ensemble des médias occidentaux, et ensuite mettre sous pression les dirigeants occidentaux pour les contraindre à marcher au diapason.

Ce plan a été conçu de longue date, et on peut supposer qu'il a germé dans les sphères des autorités états-uniennes dès la chute du rideau de fer et la disparition de l'Union Soviétique. Comment expliquer, sinon, la poursuite inlassable par l'Otan de son expansion vers la Russie. Cette dernière, dans les années 90, ne présentait aucun danger pour le bloc occidental. Le pays était affaibli, appauvri, mis en pièces par les oligarques russes et les groupes étrangers qui mettaient main basse sur les richesses de la Russie. Racket facilité par le dirigeant de l'époque, un certain Boris Eltsine, ivrogne notoire.

Ce plan a nécessité une mise à œuvre progressive. Le but étant toujours de diaboliser le maître du Kremlin. Loin de lui reconnaître le moindre mérite dans la reconstruction de la Russie, les dirigeants occidentaux l'ont continuellement accusé des pires turpitudes, sans jamais apporter la moindre preuve de leurs allégations. Citons :

  • le soi-disant empoisonnement des Skripal à Londres
  • le soi-disant empoisonnement de l'opposant Navalny(4)
  • les prétendus crimes de guerre commis par l'armée russe en Syrie, entre autres les bombardements du dernier hôpital d'Alep.(5)

Toutes ces accusations infondées ont permis aux médias de se déchaîner et de présenter le président russe comme un monstre, capable du pire. Un nouveau Hitler, en quelque sorte. Il suffit pour s'en convaincre de parcourir les titres de la presse internationale (6).

« Dan Cohen, correspondant de "Behind the News", a démonté les mécanismes sophistiqués de la propagande ukrainienne et les raisons de son succès colossal dans nos pays. Un commandant de l'OTAN a décrit cette campagne dans le "Washington Post" comme « une formidable opération de stratcom (de communication stratégique) mobilisant médias Info Ops et Psy Ops ». En gros, il s'agissait de mobiliser les médias et d'hypnotiser le public par un jet continu de vraies nouvelles, de fake news, d'images et de narratifs propres à sidérer les gens afin de garder un haut niveau émotionnel et d'oblitérer la capacité de jugement du public» selon Guy Mettan, journaliste, député à Genève (7).

Il est évident qu'une « pareille opération de stratcom » a nécessité au préalable l'élaboration minutieuse d'une stratégie d'envergure associant l'ensemble des médias. D'énormes moyens ont été utilisés pour réussir pareille opération, et sa prolongation dans la durée. De nombreuses officines de création de fakes news ont été mises à contribution. Elles avaient déjà fait leurs preuves dans des conflits précédents (8).

Le plan était machiavélique, et le dirigeant russe, pourtant réputé pour ses capacités de joueur d'échec, n'a pas été en mesure de le déjouer. Malgré tous ses efforts pour trouver une solution négociée, il a été acculé au fond du ring. Les stratèges à la manœuvre ont été des virtuoses de la manipulation et de la désinformation. Ils ont préparé et provoqué ce conflit pendant des années, patiemment et minutieusement. Leur victoire est totale. Les objectifs sont largement atteints, sans qu'une goutte de sang états-unien ne soit versée. La Russie s'est détournée de l'Allemagne et de l'Occident, pour de nombreuses années. Tout espoir d'un partenariat Europe-Russie est écarté désormais. Les stratèges anglo-saxons peuvent sabler le champagne. Dès lors, on peut s'interroger sur les raisons de la poursuite du conflit. La guerre est la solution ultime lorsque la diplomatie a échoué. Elle n'a plus aucune utilité lorsque les buts de guerre ont été réalisés. Rien ne s'oppose donc à un cessez-le-feu et à l'ouverture de négociations. Avant que le conflit ne dégénère...

MARC Jean

(1)  Intermezzo allégorique

(2)  Ukraine : la guerre sans contact entre les Etats-Unis et la Russie

(3)  Chris Hedges: The Pimps of War

(4)  Navalny : suite du feuilleton

(5)  Retour sur la bataille médiatique d'Alep

(6)  Le rôle des médias dans le conflit avec la Russie

(7)  La Zelenskimania et l'image ravagée de la Suisse

8)  Quand des sociétés de communication fabriquent des fake news

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