23/04/2024 reseauinternational.net  34 min #247286

L'épidémiologie se rend malade à cause de ses mauvaises études «cas-témoins»

À tous ceux qui imaginent les rédacteurs de l'AIMSIB comme un ramassis d'obsédés de la dénonciation d'études bidonnées, rédigées à dessein pour promouvoir des produits de santé sans intérêt... Ce n'est pas toujours vrai : nous savons aussi dénoncer des résultats invalides même quand ils paraissent servir notre propos. Faisons place à notre mathématicien d'enfer, Bernard Guennebaud, l'homme qui avale les cols de montagne comme les lois de Poisson, il nous explique aujourd'hui pourquoi une ancienne étude devrait être mise au rebut malgré sa conclusion qui nous arrangeait bien, ou comment se saisir de ses données pour pouvoir les exploiter correctement. Dans ce cas-là, on pourrait être très surpris du résultat...

Bonne lecture !

AIMSIB

*

par Bernard Guennebaud

Résumé

La célèbre étude de Hernán qui donnait un lien entre la vaccination contre l'hépatite B et la sclérose en plaques propose 13 tests tous en cas-témoins. Aucun de ces tests n'est valable en tant que test. Les questions que Hernán prétendait étudier devraient toutes être étudiées autrement comme je vais le montrer. En conséquence, Hernán n'avait apporté aucune preuve que son signal existait. La responsabilité première à une telle situation n'est pas l'auteur mais la discipline elle-même, c'est à dire l'épidémiologie internationale. C'est un naufrage.

L'exemple de l'étude de Hernán sur la vaccination hépatite B

Sortie publiquement en août 2004 1 et connue des experts un an auparavant, l'étude de Hernán avait fait très grand bruit à l'époque 2. Elle ne fut sans doute pas étrangère à la tenue, les 10-11 septembre 2003, d'une première réunion à Paris, dite de consensus, sur le lien éventuel entre la vaccination contre l'hépatite B et la sclérose en plaques 3. Elle en provoquera très certainement une seconde, à la demande du ministre Philippe Douste-Blazy, en novembre 2004 après sa publication en septembre. Présidée par Marc Brodin elle conclura, comme la précédente, qu'il n'était pas possible d'exclure un lien mais que, s'il existait, sa fréquence était très faible (4 p.6) :

«L'ensemble des données mondiales épidémiologiques, physiopathologiques et immunologiques n'exclut pas la possibilité d'un risque chez l'adulte, mais les éléments de preuve disponibles à ce jour sont insuffisants pour démontrer un lien de causalité entre vaccination contre le VHB et affections démyélinisantes centrales».

Cette conclusion impliquait que cette vaccination ne pouvait produire suffisamment de cas pour générer un signal statistique. Aussi, l'existence d'un signal en faveur d'un tel lien va provoquer de très nombreuses et vives réactions ( Académie de médecine), d'autant plus que Hernán n'était pas le premier venu. Si Hernán est Américain, les données étaient britanniques. Voici tout d'abord quelques extraits de cette publication :

«Résultats : les analyses ont porté sur 163 cas de sclérose en plaques et sur 1604 témoins. L'OR de sclérose en plaques pour les patients vaccinés dans les trois ans précédant la date index par rapport aux patients non vaccinés était de 3,1 (IC de 95% : [1,5 6,3])».

C'est ce fameux signal qui déclencha toute la polémique. Pour le vocabulaire, OR désigne l'odds ratio et IC l'intervalle de confiance. La date index désigne la date retenue pour le début de la maladie considérée, c'est à dire ici pour la première atteinte démyélinisante centrale dont la sclérose en plaques est une complication. Hernán commente ainsi ses résultats :

«Ces résultats sont cohérents avec l'hypothèse selon laquelle le vaccin recombinant de l'hépatite B est lié à un risque accru de développement de sclérose en plaques et ils remettent en cause l'idée selon laquelle la relation entre le vaccin de l'hépatite B et le risque de sclérose en plaques est bien comprise».

«Notre étude n'est pas à même d'établir si le vaccin contre l'hépatite B accélère l'apparition de la sclérose en plaques chez des sujets destinés à présenter les symptômes dans les années qui suivent où s'il est à l'origine de nouveaux cas de sclérose en plaques chez les individus sensibles. Cependant, la similitude d'âge à l'apparition des premiers symptômes entre les sujets vaccinés et non vaccinés ne plaide pas en faveur de la première hypothèse».

Sur ce dernier point Hernán raisonne ainsi : si la vaccination était seulement un accélérateur, les premiers symptômes apparaitraient à des âges plus précoces chez les vaccinés que chez les non vaccinés.

Compte tenu de l'importance que cette étude a pu prendre pour la défense des victimes de la vaccination contre l'hépatite B je n'avais pas cherché, pendant longtemps, à en contester la mise en œuvre des tests statistiques. Cette étude date aujourd'hui de 20 ans et son impact semble être devenu très modéré. Mes récentes interventions sur l'invraisemblable usage des tests statistiques en épidémiologie 5 m'ont conduit à regarder à nouveau cette publication de ce point de vue.

Le premier constat que j'ai pu faire est que tous les tests statistiques utilisés (13) sont des tests cas-témoins pour lesquels l'épidémiologie et les logiciels d'épidémiologie proposent deux utilisations très différentes mais qui ne sont pas toujours bien identifiées, même par les épidémiologistes et les commentateurs. Aussi il faut d'abord bien comprendre la distinction entre ces deux types.

Type 1- Le facteur d'exposition est un produit comme par exemple un médicament, un vaccin, le mercure, la radioactivité, la chaleur... Les cas sont les personnes atteintes d'une maladie ou d'un trouble de santé bien défini. Il y aura les cas dits exposés qui seront ceux qui avaient été exposés au produit choisi. Ce sont donc des études rétrospectives. Les cas dits non exposés sont ceux chez qui la maladie est apparue alors qu'ils n'avaient pas été exposés au produit.

Le principe du test consiste à comparer la proportion d'exposés parmi les cas avec la proportion correspondante dans la population d'où ils proviennent. Mais comme cette exposition n'est pas toujours homogène et qu'il ne serait pas aisé de l'estimer, on associe à chaque cas un certain nombre de personnes dites témoins qui n'ont pas la maladie étudiée et qui sont du même sexe, du même âge et de la même proximité géographique que le cas auquel ils sont ainsi associés. Ces témoins constituent alors une population restreinte où les exposés seront ceux qui l'auront été avant le début de la maladie du cas auquel ils ont été associés (la date index). Il y a ainsi des témoins exposés et des témoins non exposés.

Mais attention, l'on comparera cette fois-ci la proportion de cas exposés par rapport aux cas non exposés avec la proportion de témoins exposés par rapport aux témoins non exposés. Ces proportions sont nommées odds.

D'une façon plus explicite, avec 50 cas exposés et 35 non exposés, l'odd relatif aux cas sera 50/35. Avec 250 témoins exposés et 150 non exposés, l'odd relatif aux témoins sera 250/150. L'odds ratio, noté généralement OR, sera le quotient des deux odds soit 50×150 divisé par 35×250 soit ici 0,857.

Type 2- Un deuxième usage du test cas-témoins s'est malencontreusement répandu en l'appliquant lorsque le facteur d'exposition est de la forme «nombre de cas apparus au cours, par exemple, de l'année qui suit l'exposition». J'ai établi sans discussion que cet usage ne pouvait pas être considéré comme étant un test statistique. Il n'est que du charabia sur des objets mathématiques ([5] CSI 139). En pareil cas, l'objectif est de rechercher s'il existe une durée privilégiée entre l'exposition au produit et l'apparition de la maladie. Cette durée serait alors la durée d'incubation qui correspond à la durée de gestation chez la souris par exemple.

La bonne méthode est de calculer les délais écoulés entre l'exposition au produit et l'apparition de la maladie pour chacun des cas exposés puis de rechercher s'il existe une concentration de ces nombres autour d'une même valeur où si, au contraire, ces nombres se répartissent de façon aléatoire dans le temps. On utilise alors des lois de Poisson qui ont été construites pour cela. Poisson était un mathématicien français du premier tiers du XIXe siècle.

Siméon Denis Poisson

La première raison pour laquelle le test cas-témoin est pour le moins inadapté dans cette situation est que les témoins, par construction du test, ne sont pas atteints par la maladie que l'on veut étudier.

Utiliser de tels tests pour cet usage reviendrait à utiliser des souris stériles (témoins non malades) pour étudier une durée de gestation ! De plus, pour décider si un témoin a été exposé ou pas, on calcule la durée qui s'écoule entre l'exposition du témoin (s'il a été exposé) et le début de la maladie du cas auquel il a été associé, les témoins, par définition, n'étant pas affectés par cette maladie.

Que penser d'un expérimentateur qui, pour étudier la durée de gestation chez la souris, utiliserait des souris stériles pour lesquelles il retiendrait la durée écoulée entre l'insémination de cette souris qui se révèlera stérile et la date des naissances pour une autre souris !!! Ce procédé, qui provoquerait à coup sûr l'hilarité générale, est pourtant considéré par l'épidémiologie comme étant de la science et est accepté ainsi à l'international par tous les auteurs et commentateurs ([5] CSI 135).

La raison de cette acceptation passive est qu'en réalité personne ne comprend vraiment ce qui se passe avec de tels tests, d'autant plus qu'ils sont pratiqués avec «un ajustement par régression logistique conditionnelle» qui laisse au tapis les meilleures volontés, y compris chez les épidémiologistes qui, ayant fait 7 années de médecine auparavant, ce qui est tout à fait honorable, ne sont pas vraiment préparés à l'assimilation de ces questions mathématiques relativement complexes.

Disons le fermement, les tests en cas-témoins sur des délais ou fenêtres temporelles ne sont pas des tests statistiques mais du charabia sur des objets mathématiques. Je l'ai expliqué complètement au CSI 139 du 14 mars 2024 [5].

Or, le principal résultat présenté par Hernán, et que j'ai rappelé plus haut, est justement un test sur un délai ou fenêtre temporelle : on s'intéresse au nombre de scléroses en plaques (SEP) apparues dans les 3 années qui suivent la dernière vaccination reçue contre l'hépatite B.

La bonne méthode pour étudier cette question serait donc de calculer les délais écoulés entre la vaccination hépatite B et l'apparition de la maladie considérée puis d'étudier leur répartition dans le temps au moyen des lois de Poisson. Les seules personnes utiles pour cela sont celles qui ont été vaccinées contre l'hépatite B et qui ont fait la maladie en question, donc celles désignées comme étant les cas exposés au sens du premier type.

Le test cas-témoins sur des délais est non seulement un non sens mathématique, il est délirant sur le plan médical. Pour en prendre conscience il suffit d'écrire le calcul direct de l'odds ratio qui, étant le quotient de l'odd des cas soit 11/152 par l'odd des témoins soit 39/1565 s'écrit (11×1565)/(152×39)=2.90 un peu différent de 3,1 qui est l'odds ratio ajusté. On voit ainsi très clairement que c'est le nombre 1565 qui écrase tous les autres nombres et qui, étant en numérateur, permet d'obtenir un OR élevé et donc significatif. Or que représente ce 1565 ? Les témoins qui ne sont ni vaccinés contre l'hépatite B ni atteints de sclérose en plaques. En clair, ce sont ceux qui sont ni vaccinés par le vaccin dont on veut étudier les effets ni malades de la maladie en cause qui décident pour ceux qui ont été vaccinés par ce vaccin et qui ont été frappés par cette maladie !!!

Oui, on en est arrivé là et personne n'y trouve rien à dire : c'est LA SCIENCE !!!

On constate ainsi que la meilleure opportunité pour découvrir cela est d'écrire ces 4 nombres sur une feuille de papier ! OUI, à l'heure des logiciels et des données informatisées, le meilleur moyen, le seul peut-être, est d'écrire le calcul sur du papier. La démonstration en est faite puisque ceux qui restent subjugués par les productions des logiciels n'ont pas vu cette évidence alors que la publication date de 20 ans, qu'elle a été épluchée par d'innombrables experts et commentée à l'infinI.

Puisqu'il faudrait étudier les données autrement, peut-on le faire avec les seules données publiées par Hernán ? On ne dispose malheureusement pas de toutes les données nécessaires. Je vais cependant présenter maintenant ce qu'il est possible de faire malgré ces carences qui impliqueront que Hernán n'a apporté aucune preuve de l'existence d'un signal se rapportant à ces 11 cas. Une telle conclusion peut paraître sévère, elle est seulement exacte et implacable.

Les victimes de cette vaccination comme ceux qui les soutiennent, et je pense en faire partie, pourraient se sentir très déçus par mes propos. Non, ne le soyez surtout pas ! Ce signal a depuis longtemps fait long feu alors qu'il est au contraire possible de le recycler, si j'ose dire, en l'utilisant pour contester voire ridiculiser l'expertise qui s'est montrée et persiste à se montrer incapable de travailler correctement sur cet aspect de la question, Hernán compris, aussi prestigieux soit-il.

La publication indique qu'il y a eu 11 cas vaccinés hépatite B apparus au cours des 3 années qui ont suivi leur vaccination. Pour chacune de ces 3 années successives il y eut 3 puis 4 cas, puis à nouveau 4 cas. Aucune indication explicite n'a été apportée pour les années suivantes.

Le premier constat évident est qu'il ne peut y avoir de différence significative entre ces 3 années comparées les unes aux autres. C'est une évidence ! Cependant, si on voulait pratiquer un test statistique pour évaluer si l'écart entre les 3 cas de la première année et les 4 cas de la seconde était significatif on utiliserait bien sûr une loi de Poisson dont le verdict est sans appel, la probabilité d'un tel écart étant de plus de 35% donc parfaitement compatible avec des variations aléatoires. On s'en doutait !!! Bien que ce soit absolument évident sans calculs, Hernán y a vu des différences importantes :

«Le risque s'est avéré plus important, mais pas de manière significative, lorsque la vaccination est intervenue au cours des deuxième ou troisième années précédant l'apparition des premiers symptômes au lieu de la première année (tableau 3)».

Voici un extrait du tableau 3 :

Il y a une incohérence manifeste entre les données du tableau et le commentaire d'Hernán : les IC pour les années 2 et 3 étant au-delà de 1 ils sont significatifs ! Bien sûr les tests en question ne sont pas des tests mais du charabia sur des objets mathématiques. Hernán ne le sait pas, convaincu que ce sont des tests parfaitement valables. Pour nous il s'agit ici d'apprécier la cohérence interne. Pour les 3 années cumulées, l'IC [1,5 6,3] a été déclaré significatif pour cette raison et personne ne conteste cela. Pourquoi Hernán n'applique-t-il pas la même règle pourtant parfaitement connue et reconnue ?

Mystère !

Ce n'est pas la première fois que je constate des contradictions entre les données d'un tableau et les commentaires qu'en font les auteurs. Le problème a été très mal posé par les auteurs. La question ici était de se demander s'il pouvait exister des différences significatives entre les nombres de cas apparus au cours de chacune de ces 3 années. La réponse est immédiate sans calculs, les auteurs l'ayant sans doute vu aussi bien que chacun de nous ! En testant ainsi en cas-témoins, ce qui est un procédé invraisemblable en pareille situation, ils pensaient sans doute à cela tout en testant si les 4 cas de la troisième année pouvaient être significatifs par rapport à toutes les autres données c'est à dire 163-4=159 cas non exposés et 1604-11=1593 témoins non exposés (ici ce 11 correspond aux 11 témoins exposés associés aux 4 cas de la seconde année). Ne comprenant pas l'origine du résultat anormal de leurs tests mais réalisant malgré tout l'incohérence, ils auraient préféré ne pas faire de vagues en les présentant comme non significatifs pour les laisser dans l'ombre.

En fait la raison profonde à l'origine de ces résultats est que les tests utilisés n'étant pas des tests, ils peuvent, selon les circonstances, produire n'importe quoi comme je l'avais montré avec le non moins fameux test sur les «observants au calendrier vaccinal» qui défraya la chronique fin septembre, octobre 2008 ([5] CSI 139).

Hernán ne s'arrête pas là puisque dans le même tableau 3 il propose deux autres tests toujours en cas-témoins. Ils sont relatifs au nombre d'injections contre l'hépatite B reçues par les 11 cas retenus. Il commente ainsi :

«Aucune corrélation bien définie entre un plus grand nombre de vaccinations et une augmentation du risque n'a pu être mise en évidence».

Pourtant, pour au moins 3 injections, le test est significatif (borne inférieure 1,3 >1) et à la limite avec 1,0 pour au plus 2 injections. Là encore ces tests n'ont aucune valeur. De plus leur usage dans cette situation très particulière révèle une totale incompréhension de la part des auteurs. Constatant que 6 des 11 cas avaient mangé une pizza aussitôt après leur vaccination, va-t-on étudier de cette façon l'influence de la pizza sur l'apparition de la maladie ?

Comment étudier plus sérieusement l'influence du nombre d'injections sur la maladie ? D'abord calculer les 11 délais entre la dernière injection vaccinale et l'apparition des premiers symptômes (date index) puis comparer les 5 délais associés à ceux ayant eu au plus 2 injections avec les 6 délais associés à ceux ayant reçu au moins 3 injections.

Supposons par exemple que les 3 cas de la première année aient tous reçu au moins 3 injections ; que les 3 autres soient apparus au début de la seconde année et que les 5 cas ayant reçu au plus 2 injections soient apparus à la fin de la seconde année pour l'un d'entre eux et au cours de la troisième pour les 4 autres. On aurait là une indication très forte en faveur de l'influence du nombre d'injections.

Si ces 11 nombres étaient imbriqués, ne permettant plus une appréciation immédiate, il existe alors des tests statistiques, les tests dits non paramétriques (test de Mann-Whitney et test de Wilcoxon) qui permettent de tester s'il existe une différence significative entre la répartition des 2 groupes de nombres 6. Force est de constater que les auteurs et plus généralement l'épidémiologie internationale sont incapables de travailler correctement. Ils ont l'air de ne connaître que le test cas-témoins qu'ils mettent à toutes les sauces. C'est affligeant pour ne pas dire plus compte tenu des immenses responsabilités qui sont les leurs et que nous leur accordons faute, pour nous aussi, de chercher à comprendre ces questions, confiant trop facilement notre santé à l'expertise.

L'erreur fatale de Hernán !

En fait, en plus des 4 tests significatifs que nous venons de voir, Hernán en avait publié 2 autres, soit 6 en tout pour ne pas dire 6,5 avec celui où la borne inférieure vaut 1 :

«L'OR de SEP pour la vaccination par rapport à la non vaccination était de 2,4 [1,2 - 4,8] lorsque l'analyse a inclus les cas possibles de sclérose en plaques (188 cas et 1838 témoins) et de 2,6 [1,2 - 5,4] lorsque l'analyse a été restreinte aux sujets sans indication connue pour le vaccin contre l'hépatite B».

Hernán explicite ici très clairement sa démarche par rapport aux tests qu'il utilise : c'est la vaccination par rapport à la non-vaccination. C'est là son incompréhension fatale :

À partir du moment où il restreint la durée à 3 ans pour la vaccination, il ne comprend pas que le facteur d'exposition n'est plus «avoir été vacciné» mais «nombre de cas apparus dans les 3 années qui suivent la vaccination». Ce n'est pas du tout la même chose !!!

Il n'est pas le seul à ne pas avoir compris cela... Je le répète encore sans doute mais de tels tests ne sont que du charabia sur des objets mathématiques, ce ne sont pas des tests statistiques !

Introduire dans les calculs des témoins qui, par construction, ne sont pas atteints par la maladie étudiée reviendrait à utiliser des souris stériles pour étudier une durée de gestation. Laisser dans les calculs des cas et des témoins non vaccinés revient à utiliser des souris non fécondées pour étudier la durée de gestation. C'est un naufrage.

Comment étudier la significativité de ces 11 cas ?

Le test cas-témoins utilisé par Hernán pour affirmer qu'il existe un signal statistique en faveur d'un lien avec la vaccination contre l'hépatite B étant sans valeur, comment faudrait-il procéder pour étudier cette question ? Puisqu'il n'y a pas du tout de différence significative entre les 3 premières années, il faudra laisser obligatoirement ces 11 cas groupés pour voir si, dans les 3 années suivantes, il pourrait y avoir eu moins de cas vaccinés et si cet écart pourrait être significatif. On peut étudier cela a priori.

La limite de la signification étant 2,5%, on constate qu'il ne faudra pas plus de 3 cas vaccinés apparus au cours des 3 années 4, 5 et 6 cumulées pour que l'écart avec 11 soit significatif. Le moins que l'on puisse dire est que la marge de manœuvre est très étroite pour espérer obtenir un signal !

Pourtant, Hernán apporte à ce sujet cette information à première vue capitale : «Il convient de souligner que 93% des cas de sclérose en plaques inclus dans notre étude n'avaient pas été vaccinés».

Comme 93% de 163 c'est 152=163-11, on est conduit à conclure que les auteurs affirmeraient que seuls les 11 cas apparus dans les 3 années qui suivent la dernière vaccination HB reçue auraient été vaccinés. Je veux bien qu'il en soit ainsi mais alors il faut en accepter les conséquences avec un très fort signal en faveur d'un lien entre la vaccination HB et la SEP comme on vient de le voir !!!

Qu'il n'y ait aucun cas vacciné hépatite B au-delà des 3 premières années, ou même seulement 1 ou 2, doit nous interpeller car c'est très peu crédible. Par exemple dans la publication Mikaeloff-Tardieu de décembre 2007, il a été retenu 80 SEP vaccinées contre l'hépatite B avant l'apparition des premiers symptômes 7. Pour les 6 années successives, la répartition par année est 14, 14, 18, 16, 9, 3 et encore 6 au-delà des 6 premières années.

Il faut donc comprendre pourquoi Hernán ne déclare pas de cas vaccinés au-delà des 3 premières années.

1. D'abord ce 93% pourrait être un arrondi. Si la valeur exacte était 92,5% arrondie à 93%, 92,5% de 163 vaut 150,78 qui pourrait correspondre à 151 cas soit 1 cas vacciné au-delà des 3 ans. Allons jusqu'à 92% qui donne 149,96 soit 150 soit 2 cas vaccinés. Selon les écrits d'Hernán et en étant généreux pour l'arrondi, il y aurait donc au plus 2 cas vaccinés au-delà des 3 premières années. Il y aurait donc un signal.

2. Cela reste malgré tout très peu crédible. Il doit y avoir autre chose. C'est très certainement la collecte des données à partir du logiciel GPRD considéré comme très fiable. Cependant Hernán exigeait seulement que les cas aient été enregistrés dans ce logiciel au moins 3 ans avant l'apparition des symptômes. Par ce fait, les cas qui devaient occuper les années 4 et suivantes n'ont pas pu être collectés aussi sûrement que les cas associés aux 3 premières années. Il y a sans doute eu une lacune importante dans la collecte des données au-delà des 3 premières années. Aussi, le test que je propose ne peut pas être pratiqué valablement. Il aurait fallu pour cela que la collecte soit homogène sur les 6 premières années. On en est sans doute très loin. Alors faisons autrement ? Non, il n'y a pas d'autre méthode valable !

J'avais rencontré ce problème dans une autre publication américaine,  celle de Langer-Gould d'octobre 2014. Elle aussi travaillait en cas-témoins sur des fenêtres temporelles entre 14 jours et 3 ans, produisant ainsi 72 tests qui en fait ne sont pas des tests statistiques. C'est une publication, ce n'est pas une étude.

En 2018, Julie Mouchet, de Bordeaux, pilotée par Bernard Bégaud,  signe une méta-analyse cumulant les données de plusieurs publications dont celle de Langer-Gould. Les tests sont en cas-témoins mais, cette-fois ci ils ne portent pas sur des délais, ils sont donc recevables, du moins en tant que tests bien que d'autres conditions doivent être satisfaites pour que le résultat soit valide.

L'auteure écrit qu'elle a dû contacter certains auteurs des études incluses dans la méta-analyse pour compléter les données publiées. Je constate que pour Langer-Gould elle affiche 12 cas supplémentaires. Je contacte alors Julie Mouchet pour lui demander si elle a la répartition de ces 12 cas sur les années 4, 5, 6... Elle me répond qu'elle va regarder. Quelques jours plus tard elle m'annonce qu'elle ne dispose pas de cette information qui aurait pu être très intéressante pour trouver, le cas échéant, un signal par la chute du nombre de cas à partir, par exemple de l'année 4 ou 5 par rapport aux années précédentes.

Cela montre aussi que pour tester en cas-témoins de type 1, c'est à dire quand le facteur d'exposition est «avoir été vacciné contre l'hépatite B»par exemple, il est nécessaire de disposer de tous les cas vaccinés collectés sans se limiter à une durée car alors le facteur d'exposition change et le cas-témoins ne vaut plus rien. Il y a au moins une raison à cela : les cas non vaccinés n'étant pas limités par un délai débutant avec la vaccination, ils peuvent être plus nombreux. C'est sans doute une des raisons pour lesquelles le nombre de cas non vaccinés est particulièrement élevé chez Hernán.

Quand on décide de tester sur une durée comme les 3 premières années après une vaccination, il faut faire attention à couper au bon endroit ! Il faut comprendre que quand on forme la division (cas exposés)/(cas non exposés) le numérateur pousse en faveur d'un signal et le dénominateur est là pour le contrarier. L'exemple de la publication Mikaeloff-Tardieu de décembre 2007 est très intéressant : les auteurs avaient décidé de couper à 3 ans en copiant sur Hernán (ils le disent). Quand on regarde la séquence des incidences annuelles 14, 14, 18, 16, 9, 3 pour les 6 premières années, on constate qu'il y a une chute après la quatrième année et que les 4 premières années procèdent de la même mouvance. La bonne coupure serait à 4 ans et non à 3 ans.

Quand on coupe à 3 ans le 16 passe en dénominateur pour contrarier l'action des 3 premières années en faveur d'un signal alors qu'il va visiblement dans le même sens. C'est pourquoi il n'est pas légitime de fixer un délai arbitraire qui ne tient pas compte de la réalité des nombres. C'est pourquoi Hernán avait l'obligation de fournir aussi le nombre de cas vaccinés sur l'année 4. S'il y avait 3 ou 4 cas vaccinés cette année-là, il devait la conserver groupée avec les 3 précédentes pour rechercher s'il y avait une chute sur la cinquième année.

Cette nécessité correspond à une possibilité très importante. À savoir qu'on peut aussi, a priori, avoir été vacciné HB et faire une SEP sans que cette vaccination y ait joué un rôle. En pareil cas, la maladie pourra apparaître aussi bien au bout de 2 ans que de 5 ou 6 ans. C'est pourquoi il est indispensable de disposer aussi des cas vaccinés apparus plus tardivement.

En comparant par une loi de Poisson les 62 cas de la publication de Marc Tardieu apparus au cours des 4 années qui suivent la vaccination HB avec les 12 cas apparus au cours des 2 années suivantes, la probabilité d'avoir un écart au moins aussi grand que l'écart observé est 1,5/10 000 soit 0,015% qui est donc très significatif. Si on coupe à 3 ans, on compare les 46 cas apparus sur les 3 premières années aux 28 cas apparus sur les 3 années suivantes. La probabilité est 1,82% significative mais beaucoup moins fortement.

En fait, aussi invraisemblable que cela puisse paraître, quand Hernán a trouvé des cas vaccinés plus de 3 ans avant la date index - et il est pratiquement certain qu'il en a trouvé - il les aura tout simplement écartés de son étude. C'est sans doute l'explication principale que l'on puisse proposer. Je n'osais pas y croire, mais elle est devenue pour moi de plus en plus vraisemblable.

Quand un cas était découvert dans le logiciel GPRD, les auteurs contactaient les médecins qui l'avaient pris en charge pour leur demander tous les dossiers médicaux en leur possession. Les auteurs avaient constaté que ces dossiers remontaient souvent beaucoup plus en amont que les données enregistrées dans le logiciel, parfois jusqu'à la naissance. Ce fut à partir de ces données papier que les auteurs avaient déterminé la date index c'est à dire la date des premiers symptômes. Ils pouvaient aussi disposer des dates précises de vaccination contre l'hépatite B. Ainsi, les limites du logiciel pouvaient être dépassées.

Je l'ai expliqué, ce ne fut pas le choix de Marc Tardieu et al. dans leurs études sur les enfants. Ils avaient retenu tous les cas apparaissant entre le 1er janvier 1994 et le 31 décembre 2003. Pour chaque cas ils remontaient ensuite dans son dossier médical pour retrouver les vaccinations. Si l'enfant avait été vacciné contre l'hépatite B 7 ans auparavant ou en 1993 ils le gardaient à juste titre dans leur étude.

Ce qu'aurait fait Hernán en écartant les cas au-delà des 3 premières années, je réalise que c'est sans doute vrai mais j'ai du mal à y croire tant c'est énorme !

Des données intéressantes mais non exploitées !

Hernán écrit aussi :

«La proportion de cas ayant reçu une vaccination hépatite B après la date index était de 1,2% contre 2,3% pour les sujets témoins».

Or 1,2% correspond à 2 cas parmi 163 et 2,3% correspond à 37 témoins vaccinés après le début de la maladie du cas associé. Par construction des tests cas-témoins ces témoins doivent effectivement être considérés comme non vaccinés. Pour les cas c'est très différent car cette vaccination pratiquée après les premiers symptômes a pu amplifier et accélérer le processus de démyélinisation. On ne peut donc pas les négliger mais on ne sait pas s'ils sont dans les années 4, 5 et 6 ou au-delà. Il n'est pas impossible qu'ils aient été considérés comme non vaccinés.

Les auteurs français Mikaeloff, Tardieu et collaborateurs ont traité cette question d'une meilleure façon : ayant constaté qu'il y avait 33 enfants qui avaient été vaccinés HB après leur première atteinte, ils les ont étudiés à part avec une publication spécifique en février 2007. 8

Imaginez que ces auteurs ajoutent les 10 SEP observées chez ces enfants aux 63 SEP non vaccinées retenues dans la publication de décembre 2007, non vaccinés sous prétexte que leur vaccination était intervenue après leur première atteinte ! En cas-témoins, ces 10 cas de SEP s'opposeraient à un signal en intervenant dans le dénominateur de l'OR alors qu'ils seraient des illustrations de l'action du vaccin en faveur de leur SEP ! De ce point de vue, les auteurs français ont été plus pertinents que les auteurs américains.

Si l'objectif était d'affirmer qu'il y a un signal très fort, il suffirait de prendre Hernán au mot en disant «Vous écrivez qu'il n'y a aucun vacciné HB au-delà de la troisième année donc il existe un signal très fort en faveur du lien avec une probabilité de 0,05% soit 5 chances sur 10 000 d'avoir un tel écart par le seul fait du hasard !» TERMINÉ !!! Non, ce serait jouer sur les mots ! De plus ce serait très peu crédible.

En fait Hernán et autres n'ont pas compris que pour étudier valablement cette question il fallait collecter de façon homogène les données sur au moins les 6 années qui précédaient l'apparition de la première atteinte démyélinisante (date index) et non pas sur seulement 3 années.

C'est là le problème et nous ne pouvons rien y faire. Notons cependant qu'aucune des très virulentes critiques qui ont été prononcées à l'encontre de la collecte des données de cette publication n'avaient fait état de ce problème. La raison en est simple, ils n'ont aucune idée de la façon correcte de procéder, étant tous obsédés par le test cas-témoins pratiqué hors du seul usage qui lui correspond.

Une certitude

Hernán n'a apporté dans sa publication aucune donnée permettant d'affirmer qu'il existerait un signal statistique relatif aux 11 cas apparus au cours des 3 premières années.

Poursuivons cependant nos investigations laborieuses, rendues laborieuses en raison de la carence des données publiées, carence liée sans doute pour une large part à l'incompétence criarde de l'épidémiologie internationale pour traiter ces questions. Mal formés sur ces questions non médicales, les auteurs n'ont pas conscience de la nécessité de s'intéresser à certaines données qu'ils négligent et les commentateurs ne sont pas meilleurs. Il existe, malgré tout, une autre information intéressante mais non exploitée :

«L'intervalle de temps moyen (médian) entre les premiers symptômes et le diagnostic était de 5,0 ans (2,7 ans)».

Le diagnostic désigne celui se rapportant à la sclérose en plaques. Il s'agit donc du délai qui s'est écoulé entre la date retenue pour la première atteinte et celle de la SEP. Pour la moitié des 163 cas, elle ne dépasse donc pas 2,7 ans. C'est la signification du terme médian. Si les autres durées étaient réparties symétriquement par rapport à la valeur 2,7, la moyenne serait 2,7. Il faut donc que, pour cette seconde moitié, ces durées soient suffisamment nombreuses à dépasser largement 5 ans pour qu'au total la moyenne puisse atteindre 5 années. On peut proposer une hypothèse pour tenter d'expliquer cela.

Supposons que pour ceux qui ont été vaccinés contre l'hépatite B le délai serait fortement réduit par rapport à l'évolution normale de la maladie en l'absence de cette vaccination. Cette hypothèse avait effectivement été formulée par Lucien Abenhaïm qui fut directeur général de la santé pendant plusieurs années et Myriam Sturkenboom. Tous les deux avaient étudié des données britanniques dont ils avaient fait état le 21 septembre 1998 au cours d'une grande réunion de 40 experts internationaux à Paris pour étudier le lien éventuel entre la vaccination contre l'hépatite B et la sclérose en plaques. Un compte rendu de cette réunion avait été publié à l'époque sur le site du ministère. Il y disparaitra en 2011 à l'occasion de la refonte du site. Voici comment j'ai découvert ce fait :

Ayant trouvé ce document qui précise qu'il avait été mis en ligne sur le site du ministère à la demande du secrétaire d'État à la Santé Bernard Kouchner et de sa ministre de tutelle Martine Aubry, j'en avais pris une copie au cas où... Bien m'en a pris car en 2011 je découvre que le document a disparu du site en refonte. Sur la page d'accueil une note invite à prendre contact avec l'équipe qui s'occupe de cette refonte en cas de problèmes. Je signale la disparition du document en joignant des liens comme celui-ci :  sante.gouv.fr

Quelques minutes plus tard j'obtiens une réponse : «nous allons lancer une recherche !» Mais quelques jours plus tard «Nous n'avons rien trouvé...» Le document s'était envolé !

Autrefois on brulait les bibliothèques comme celle d'Alexandrie, aujourd'hui des documents très importants disparaissent d'un clic...

Ce document avait été constitué fin septembre 1998 pour que Bernard Kouchner puisse prendre une décision fondée. Voici en particulier ce qu'il avait pu y lire 9 :

«Point sur la vaccination contre l'hépatite B»
«Études sur les complications neurologiques susceptibles d'être provoquées par la vaccination contre l'hépatite B»
Par Lucien Abenhaïm et Myriam Sturkenboom

«Cette étude a permis d'observer que le délai entre le premier symptôme ou signe de démyélinisation et le diagnostic de sclérose en plaques était plus court chez les personnes vaccinées que chez les non vaccinées. Ceci peut être le résultat d'un meilleur suivi des personnes vaccinées ou la conséquence d'une forme accélérée de la maladie chez les personnes vaccinées».

En conséquence, revenant sur les propos d'Hernán après cette parenthèse, il aurait pu (dû) préciser les données en indiquant comment se répartissaient les vaccinés par rapport à la médiane 2,7. Si pour les vaccinés ces délais étaient tous ou presque tous inférieurs à 2,7 il aurait eu là une information capitale. Il aurait pu aussi calculer la moyenne de ces délais pour les vaccinés et la comparer à la moyenne pour les non vaccinés. Rien de cela n'a été fait ou publié alors que ce furent des interrogations partagées par tous les experts qui furent nombreux à se pencher sur le lien éventuel entre la vaccination contre l'hépatite B et la SEP. Les auteurs auraient aussi pu utiliser les tests non paramétriques.

D'autres auteurs avaient aussi voulu étudier cette question. Il s'agit de Yann Mikaeloff et Marc Tardieu qui, en décrivant la collecte des données pour les enfants ayant fait une première atteinte démyélinisante centrale pouvant évoluer en SEP, indiquent qu'un médecin référent avait été attribué à chacun des 349 enfants retenus dans l'étude. Sa mission était d'informer immédiatement les auteurs lorsqu'un enfant convertissait en SEP. C'est la preuve qu'ils ont cherché à collecter cette donnée. Ils n'ont jamais fait état des résultats obtenus.

On est ainsi conduit à s'interroger. Ces auteurs savent-ils travailler ou ont-ils peur des réponses ? À cette réunion internationale du 21 septembre 2009, le représentant de l'OMS, le Dr Mac Kane dira, selon le compte rendu 10 :

«Pour ce qui concerne les actions de santé publique à mener, deux positions ont été exprimées : «La première émanant du responsable du programme de vaccination contre l'hépatite B à l'OMS, le Dr Mac Kane, visant à surtout ne rien modifier à la politique vaccinale pour éviter de mettre en péril la campagne de vaccination universelle. La seconde proposition plus consensuelle a été de réévaluer le rapport bénéfices-risques en prenant en compte dans les différents pays à la fois l'épidémiologie de l'hépatite B et la politique vaccinale nationale. Le rôle du groupe n'était pas d'évaluer le bénéfice»».

Bernard Kouchner a pu prendre connaissance, entre autres, de cela. Il disposait même des adresses et numéros de téléphone des 40 experts internationaux présents. Il aurait ainsi pu les contacter directement s'il l'avait souhaité. Le 1er octobre 1998 Bernard Kouchner annoncera, dans une célèbre conférence de presse, l'arrêt de la vaccination contre l'hépatite B dans les collèges. Ce document disparu en 2011 du site du ministère démontre qu'il n'avait pas pris sa décision à la légère. D'ailleurs le signal très fort contenu dans les données des publications Mikaeloff-Tardieu sur ces enfants dix ans plus tard est là pour le confirmer.

RAPPEL : parmi les 349 enfants ayant fait une première atteinte démyélinisante centrale, 52% des 154 enfants vaccinés contre l'hépatite B avaient converti en SEP dans la période d'observation (30 juin 2006) contre seulement 32% parmi les 195 enfants non vaccinés. Avec une chance sur 10 000 d'observer un tel écart par le seul fait du hasard, le signal est très fort. Il avait été trouvé par les auteurs qui ont publié les données sans pour autant expliciter ce signal. Voir les CSI 135 (pour la description du signal) et 139 (pour l'affaire autour de ce signal dérangeant) [5]. Voir aussi sur l'AIMSIB mon article Mentir ou travestir pour ne pas faillir, le coup du signal fort qu'on préfère oublier. 11

Conclusion

C'est devenu très clair, l'épidémiologie est essentiellement tournée vers la collecte des données médicales. Cette collecte pose d'ailleurs beaucoup de problèmes, y compris éthiques. Comme pour les élections, il y a la collecte des données quand les électeurs vont déposer leur enveloppe dans l'urne. Le moment venu, l'urne sera close, mettant fin à la collecte même si tous n'ont pas pu voter.

Puis c'est le dépouillement, l'analyse des données contenues dans le logiciel. Là, il faut en convenir et le reconnaître, l'épidémiologie se montre dangereusement nulle pour rester modéré dans le jugement. Il faut aussi reconnaître que la contestation n'a su faire mieux de ce point de vue.

Pourquoi ? Nous avons tous été formés de la même façon en fréquentant l'école, le collège, le lycée, l'université puis en exerçant une profession. Nous avons tous été formatés par les mêmes schémas généraux. Nous sommes tous les fruits d'un même arbre, nourris par la même sève. Aussi nous reproduisons les mêmes réponses générales : les experts en santé publique ne cherchent pas à comprendre les tests statistiques dont pourtant ils font grand usage. Les opposants font de même. Chacun ne regarde que les résultats des tests significatifs, les uns pour les casser sans pour autant pouvoir en nier l'existence et les autres pour en faire la promotion sans s'interroger davantage sur eux. Ni les uns ni les autres ne cherchent à savoir comment ils ont été construits ni ce qu'ils testent en réalité, s'ils testent quelque chose.

Il y a eu deux orientations opposées relatives à cette étude de Hernán, la première nourrie par les forces qui voulaient casser ce signal très dérangeant et la seconde qui voyait là enfin une confirmation que ce vaccin faisait des victimes, notamment par la sclérose en plaques. Pour ces victimes et leurs défenseurs, cette étude était l'espoir et ils acceptaient mal qu'elle soit critiquée et que le résultat principal puisse être remis en cause. Un cabinet d'avocats avait d'ailleurs traduit cette étude en français et c'est leur traduction soignée que j'utilise pour écrire cet article.

Ces deux orientations radicalement opposées ont toutes les deux validé, les yeux fermés, des tests statistiques qui ne sont que du charabia sur des objets mathématiques. À ce jeu-là c'est toujours le plus fort qui gagne. Quand on joue à petit Goliath contre gros Goliath, on perd à coup sûr. Si on boxe un boxeur on ira au tapis. Que fait David face à un boxeur ? Il le chatouille sous les bras !

J'ai rencontré des victimes de cette vaccination. J'avais été très ému par les œuvres artistiques réalisées par certaines. Elles avaient été regroupées pour des expositions dans plusieurs villes de France. Quatre fois j'y suis allé pour y faire une conférence (Lisieux, Angers, Grenoble, Niort) et, à deux reprises, pour une conférence à l'assemblée générale du Revahb. Pour ces victimes, l'étude de Hernán fut longtemps l'espoir d'une reconnaissance toujours repoussée. Je ne voudrais pas que les victimes qui me liront pensent que je les aurais trahies. Non, bien au contraire.

Nous n'avons plus le choix : il nous faut changer de paradigme, tourner notre regard vers la méthodologie utilisée même si c'est un bien grand mot pour désigner cet amoncellement de calculs dépourvus de toute signification.

Hernán enchaine les tests cas-témoins sans jamais se demander ce qu'ils testent ni sans jamais poser les problèmes correctement. Quand il trouve des tests significatifs invraisemblables il choisit de les déclarer non significatifs plutôt que de s'interroger sur l'origine des contradictions qu'ils soulèvent. Ceux qui ont voulu contester son résultat principal n'ont pas fait mieux car aucun n'a vu les problèmes que je soulève ici.

Il y a un autre signal qui fut contesté, celui des «observants au calendrier vaccinal» sorti le 8 octobre 2008. Il m'a permis de montrer ce que valaient les tests cas-témoins sur des délais : du charabia sur des objets mathématiques et c'est valable pour tous ces tests même s'ils ne donnent pas de signal. Pour les 3 publications Langer-Gould, Mikaeloff-Tardieu de décembre 2007 et d'octobre 2008, j'ai dénombré au moins 162 tests, tous en cas-témoins dont 160 sur des délais et qui ne sont donc que du charabia. Seuls 2 sont des tests statistiques. Mais ils ne respectent pas une condition essentielle : les cas n'ont pas tous une même probabilité d'avoir été exposés à la vaccination hépatite B. Il faut impérativement dissocier judicieusement les données. Pour l'un, cette dissociation permet de trouver un signal très fort rappelé ci-dessus. Pour l'autre il faut dissocier selon les âges. J'ai exposé tout cela oralement [5]. J'avais trouvé cela fin 2009 mais nous étions en pleine pseudo-pandémie et tout le monde regardait ailleurs...

J'ai constaté aussi qu'il n'était pas facile de faire comprendre la nécessité d'entrer dans la mécanique des tests pour construire une nouvelle forme de contestation. Cela rebute mais fait aussi l'objet de refus obstinés soutenus par la croyance bien enracinée que les mathématiques ne peuvent servir à rien sur ces questions. Un test statistique c'est une loi de probabilité appliquée à des nombres. Il est impossible de commenter valablement les résultats de ces tests si l'on ne comprend pas comment ils sont construits. J'ai montré que l'épidémiologie et les commentateurs autorisés ne comprennent pas eux-mêmes. Il y a là une opportunité à saisir pour marquer des points.

NOUS N'AVONS PLUS LE CHOIX !

IL FAUT CHANGER DE PARADIGME !

source :  AIMSIB

 reseauinternational.net

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