16/07/2025 mrmondialisation.org  9min #284374

 François Bayrou dévoile un plan pour économiser 44 milliards d'euros et relancer la production

Austérité, jours fériés, santé... : Bayrou lance le bulldozer social

Ce mardi 15 juillet 2025, le Premier ministre, François Bayrou, a annoncé une cure d'austérité drastique afin d'« économiser 44 milliards d'euros » sur le budget de 2026. Pour y parvenir, le fondateur du MoDem entend plus que jamais mettre à contribution les classes populaires, en épargnant les plus riches. Le point sur son discours.

Dans le plan du locataire de Matignon, une série de propositions d'une rare violence à l'encontre des travailleurs a donc été dévoilée.

La suppression de deux jours fériés, le gel des retraites, des salaires des fonctionnaires et des allocations, le doublement de la franchise sur les médicaments ou encore la destruction de 3000 emplois publics ont ainsi été mis sur la table.

Nouvelle vague de violence sociale

« 2026 sera une « année blanche » au niveau budgétaire ».

François Bayrou n'a pas manqué de dramatiser la situation, brossant le portrait d'une France au bord de la ruine où des économies colossales seraient nécessaires. Pour y parvenir, comme à son habitude, le gouvernement Macron s'en est pris aux classes populaires et aux travailleurs et travailleuses.

À comparer aux 211 milliards offerts aux entreprises et tout particulièrement aux grands groupes qui se gavent d'aides publiques, d'exonérations...
(Je dis ça, je dis rien...)  pic.twitter.com/SOL8OcXJqU

- Jérôme Legavre (@LegavreJerome)  July 15, 2025

En premier lieu, il a ainsi exposé son souhait de voir l'année de 2026 devenir une « année blanche » au niveau budgétaire. Autrement dit, tout resterait figé par rapport à 2025, sans tenir compte de l'inflation.

Augmentation des impôts déguisée

En effet, habituellement, les retraites, les allocations et la plupart des postes de dépenses de l'État sont généralement indexés sur l'inflation afin de les réajuster. Si cette mesure est appliquée, tout restera figé au niveau de cette année, ce qui engendrera, de facto, une  augmentation fiscale déguisée, via le blocage du barème de l'impôt et celui de la CSG.

Un souhait assez ironique lorsque l'on se souvient que l'intégralité des médias et des politiciens de droite  avait utilisé la menace de cette conséquence perverse pour faire pression sur la gauche quand celle-ci avait censuré Michel Barnier. L'absence de vote d'un budget doit en effet entraîner la reconduction de celui de l'année passée.

La Macronie avait, à l'époque, dénoncé le possible gel des barèmes, oubliant sciemment qu'une loi rectificative pouvait être adoptée. Voilà qu'aujourd'hui, elle appelle à mettre en place volontairement ce contre quoi elle alertait.

Le système de santé encore en ligne de mire

Par ailleurs, dans la lignée de son action depuis 2017, Emmanuel Macron choisit également de s'attaquer à  la sécurité sociale. En plus des fonctionnaires qui seront supprimés dans le secteur de la santé (mais aussi de l'éducation), un nouveau coup sera porté au système de remboursement avec pas moins de  5 milliards d'économies.

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La franchise à payer par les patients sur les médicaments augmentera ainsi à 100 € contre 50 € aujourd'hui. Sur chaque boîte prescrite par un médecin, les Français doivent déjà débourser un euro. Il existe cependant un plafond à cinquante euros à partir duquel tous ces médicaments redeviennent remboursés à 100 %. Limite qui devrait donc doubler et inciter certaines personnes à ne plus se soigner.

Le coup du chiffon rouge

Mais la mesure qui a le plus retenu l'attention des observateurs et des médias est sans doute la suppression de deux jours fériés, à savoir le lundi de Pâques et le 8 mai. On notera d'ailleurs la symbolique catastrophique dans le choix d'en finir avec la commémoration de la victoire contre les nazis dans une période où l' extrême droite prolifère plus que jamais dans le monde.

Bon... On est d'accord que l'offensive de #Bayrou sur les jours fériés, c'est un contre-feu préventif non ? Le gars agite un chiffon rouge pour mieux faire passer le reste de la disquette. Prière de ne pas se fixer que sur ce sujets les confrères et consoeurs.

-  Martin Bodrero (@martinbodrero.bsky.social)  2025-07-16T06:55:45.166Z

Et pour amener cette mesure sur la table, la droite n'a pas hésité à nous resservir ses poncifs les plus éculés, pourtant démentis à de nombreuses reprises, comme le fameux «  les Français ne travaillent pas assez ».

En définitive, cette annonce volontairement excessive et polémique a surtout pour but d'élargir la fenêtre d'Overton et d'imposer ce type de discussions dans le débat public. Pire, en proposant une mesure-choc qui a peu de chance de se concrétiser, François Bayrou pourrait réussir à faire passer le reste. Il pourrait par exemple décider de ne supprimer qu'un seul jour férié en assurant qu'il fait ainsi une concession. Un procédé intellectuel malhonnête, et pourtant très courant. Emmanuel Macron l'avait déjà utilisé pour l'âge de départ à la retraite qu'il avait dans un premier temps annoncé à 65 ans.

Le PS et le RN continueront-ils à être les supplétifs de l'exécutif ?

Dans ce contexte, une motion de censure pourrait bien intervenir dès cet automne contre le gouvernement Bayrou, en particulier si celui-ci décide d'enclencher un 43.3. Jusqu'ici, le mandat du Premier ministre ne tenait d'ailleurs qu'aux volontés du Parti socialiste et du Rassemblement National.

La politique est faite par des professionnels. Ne tentez pas ces acrobaties chez vous.Pour soutenir la lutte dessinée, engagée et indépendante :▶️ ko-fi.com/allanbarte

-  Allan Barte (@allanbarte.bsky.social)  2025-07-16T09:40:51.417Z

Or, face à ces annonces, tous ont cette fois prévenu qu'ils pourraient voter la fin de ce gouvernement dès le mois d'octobre si jamais celui-ci s'obstine dans cette voie. Le mouvement d'extrême droite l'a même  invité à « revoir sa copie » s'il veut échapper au renvoi. Une ligne rejointe  par une partie du PS, notamment celle proche de François Hollande.

L'extrême droite reste la droite

Ce type de formule peut d'ailleurs faire doute de la volonté réelle des deux partis à censurer le gouvernement. Du côté du RN, il peut sembler que celui-ci cherche même à influencer la ligne austéritaire en direction de son obsession pour l'immigration.

Ainsi, Marine Le Pen a regretté que le gouvernement ne fasse pas « la chasse au gaspillage ». Autrement dit, elle s'inscrit elle aussi dans la ligne de François Bayrou qui affirme que le problème budgétaire de la France provient d'un excès de dépenses, et non pas d'un déficit de recettes.

Pour le RN comme pour Macron, le problème c'est donc l'excès de dépenses. Selon eux, il faut donc couper encore dans nos services publics plutôt que taxer les plus riches. Les milliardaires peuvent dormir tranquille.

-  (@simonelectus.bsky.social)  2025-07-16T09:59:26.329Z

De ce fait, elle appelle, elle-même, à faire des coupes dans l'éducation et dans la santé, pointant du doigt la « bureaucratie ». Laissant transparaître son idéologie raciste, elle s'en est, en outre, pris au coût de l'immigration : et pourtant ce phénomène rapporte de l'argent à l'État. Le spectre de la dissolution pourrait, de plus, convaincre le RN de ne pas voter la censure, puisque Marine Le Pen,  devenue inéligible, perdrait alors la possibilité de rester députée.

Les riches toujours tranquilles, la planète à l'abandon

Pendant ce temps, ni le gouvernement Macron ni l'extrême droite n'ont rejoint le constat de la gauche qui dénonce le manque de participation fiscale des plus aisés. Le RN s'était même dernièrement abstenue sur  le vote de la taxe Zucman, qui visait à mettre à contribution les plus riches.

- Taxe Zucman : 15 à 25 milliards - Revue des niches fiscales : 17 à 19 M - ISF rénové : 10 M - Supprimer la flat tax : 9 M - Taxation unitaire des multinationales : 18 M - Aides publiques aux entreprises : 211 M L'austérité n'a rien d'une fatalité !

-  Attac France (@attac.org)  2025-07-15T12:56:55.315Z

La politique austéritaire, présentée par François Bayrou comme une fatalité et une nécessité, relève donc en réalité d'un choix clair, qui défend les intérêts de l'élite financière à l'encontre de ceux de la majorité de la population.

Manque de volonté

Pour augmenter  le budget de l'armée, le gouvernement ne semble d'ailleurs pas éprouver de difficulté. Pendant la crise du covid-19, Emmanuel Macron avait, là aussi, pu trouver des dizaines de milliards d'euros.

Preuve, s'il en est, que le l'exécutif n'agit pas sous la contrainte comme il souhaite le faire croire, mais bien en étant guidé par une idéologie. Il existerait en effet une autre voie, consistant en particulier à mettre à contribution les plus fortunés,  stopper les aides aux grandes entreprises ou encore à prioriser des sujets cruciaux comme la santé, l'éducation ou l'écologie. Un chemin que le gouvernement a définitivement choisi de ne pas emprunter.

- Simon Verdière

Photo d'entête 2024 @ Ugo Bronszewski/Flickr

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