L’économiste Patrick Artus publie dans l’Expansion une tribune en forme de réquisitoire contre la mondialisation.
Contre Info, 7 juillet 2008
Les années de la « mondialisation heureuse » marquées par une forte croissance et une faible inflation sont derrière nous juge-t-il. La crise immobilière née aux USA a révélé en plein jour les « tendances insoutenables » de la mondialisation, au nombre de trois :
- Le partage des tâches entre pays développés et économies émergentes se traduit par une délocalisation des activités industrielles et de services « intermédiaires », avec pour résultat une « bipolarisation » des marchés de l’emploi. D’un côté, des compétences à forte valeur ajoutée, de l’autre des emplois de service déqualifiés, ce qui conduit à « une disparition de la classe moyenne », observe-t-il.
- Le modèle de croissance occidental, gourmand en énergie et matières premières et fortement émetteur de CO2, ne saurait être étendu à l’ensemble de la planète.
- La globalisation a submergé le monde de liquidités, qui croissent à un rythme de près de 20% par an depuis 2002. Comme le notait récemment Doug Noland, le recours massif des USA au crédit a amplifié les déséquilibres du commerce extérieur US, qui ont été refinancé par les réserves accumulées en Asie et au Moyen Orient. Pour Artus comme pour Noland, c’est la croissance « monstrueuse » des liquidités mondiales qui explique le surendettement et les bulles dans la valorisation des actifs.
L’éclatement de la bulle du crédit US a renforcé ces turbulences. Désormais, les capitaux spéculatifs qui ont abandonné le secteur du crédit US alimentent les tendances inflationnistes.
Comment en sortir, s’interroge Artus ? Il faudrait, préconise-t-il, remplacer les institutions internationales nées dans l’après guerre par de nouvelles organisations ayant en charge la régulation des « biens publics mondiaux » que sont l’environnement, la monnaie, les matières premières et les règes sociales.
Perspective peu vraisemblable, à laquelle les états préfèreront sans doute les solutions individuelles, ou régionales. Dans ce cas, « le pire est à venir », conclut-il.
Contre Info avec l’Expansion