15/07/2021 mondialisation.ca  5 min #192174

Berlin: Washington veut une contrepartie pour Nord Stream 2

Par  Olivier Renault

La décision allemande de continuer et de terminer la construction du gazoduc de la mer Baltique entre la Russie et l'Allemagne continue d'agacer les stratèges de Washington. Le résultat lié à la prochaine visite d'Angela Merkel aux Etats-Unis et très attendu.

Le Süddeutsche Zeitung  discute dans un article écrit par Daniel Brössler de l'approche stratégique de l'Allemagne vis-à-vis des Etats-Unis concernant l'accord allemand envers Nord Stream 2 ou mieux de ce que devrait demander les Etats-Unis à Berlin.

Juste avant l'arrivée de la chancelière allemande ce jeudi 16 juillet, Jen Psaki, la porte-parole du président américain, Joe Biden, a déclaré qu'il s'agit d'une «visite prospective», signalant qu'il n'y a aucun signe d'adieu. La publication précise que la visite d'Angela Merkel porte sur des affaires inachevées qui devraient, si possible, encore être clarifiées avec la chancelière. Daniel Brössler s'amuse à évoquer la peur de la chancelière envers la Covid-19 car elle «continue à prendre au sérieux les dangers du corona, ce qui complique tous les processus», rajoutant que «le fardeau de l'histoire accompagne ce voyage» avant d'attaquer le sujet principal. On ne pourra pas reprocher au journaliste du Süddeutsche Zeitung d'écrire, «après 16 ans, la chef de gouvernement mondialement respectée approche de la fin de son mandat, ce qui peut conduire à obscurcir le noyau politique de ses voyages d'affaires par des émotions». Mondialement respecté? Il suffit de discuter avec simplement des Allemands ou d'écouter certains politiques, comme, par exemple, Floriant Philippot, ou des citoyens français ou surtout grecs, pour comprendre que ce respect ne fait pas l'unanimité. Passons.

Oui, passons. La question principale ici est Nord Stream 2. Le journaliste, écrit, citant Jen Psaki, que les Etats-Unis considèrent toujours le gazoduc germano-russe comme un «mauvais accord», expliquant que, durant son dernier déplacement, l'ex-citoyenne de la RDA devra affronter le sujet dans sa discussion avec Joe Biden. Daniel Brössler avertit déjà que «le différend sur le gazoduc est devenu encore plus compliqué» pour Angela Merkel depuis l'arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche, rappelant que «la relation avec Donald Trump a été, de toute façon, brisée» et que, «Joe Biden, recherche un partenaire en l'Allemagne», mais que «Nord Stream 2 rend ce nouveau départ difficile» et que, donc, «Washington et Berlin négocient depuis des semaines pour savoir comment résoudre ce problème», et «si possible jusqu'avant la venue d'Angela Merkel à la Maison Blanche».

Le journaliste est clair en affirmant qu' «elle (Angela Merkel) ne pense pas qu'il y aura un accord au moment de sa visite à Washington, informant qu'elle a provoqué un froid ce lundi le jour de la visite du président ukrainien, Volodymyr Zelensky, à Berlin. Celui-ci attendait encore beaucoup de l'Allemagne, notamment l'intervention militaire de Berlin en Ukraine et une prise de position solide et claire sur Nord Stream 2 au profit de Kiev. La ARD a  souligné que «bien sûr, (durant cette visite du président ukrainien) il s'(agissait) également du désir de l'Ukraine d'obtenir une aide militaire de l'Allemagne» et «de savoir que le futur gouvernement fédéral allemand continuera de se tenir aux côtés de l'Ukraine (aussi sur la question de Nord Stream 2)». Selon le journal allemand, «pour Volodymyr Zelensky, Nord Stream 2 constitue une menace potentielle pour la sécurité de l'Ukraine et de la région et il exige des garanties de l'UE, de l'Allemagne et de la France» et «l'Ukraine craint que Nord Stream 2 ne la rende superflue pour le transit du gaz, ce qui entraînerait des pertes de revenus importantes et affaiblirait davantage le pays stratégiquement vis-à-vis de la Russie».

Ainsi, «l'Ukraine attend des garanties de l'Allemagne» et Daniel Brössler laisse entendre que «l'Allemagne prend les inquiétudes ukrainiennes au sérieux et fera tout ce qui et en son pouvoir pour indiquer très clairement que Nord Stream 2 ne remplace pas les livraisons de transit promises à travers l'Ukraine», comme assuré par Angela Merkel: «Pour l'Allemagne, il est très clair et également important que l'Ukraine reste un pays de transit du gaz». La chancelière a fait référence à un accord de transit russo-ukrainien, qui, à son instigation, a été prolongé jusqu'à fin 2024 et devrait continuer à courir jusqu'en 2034 si possible et la future chancelière à la retraite a dit que «l'Allemagne appliquera cela, également pour l'avenir», affirmant que «nous l'avons promis à l'Ukraine, et nous nous y tiendrons».

Le Süddeutsche Zeitung explique que Volodymyr Zelensky aimerait voir des engagements précis. Daniel Brössler confirme que «l'idée, d'intervenir avec compensation lorsque les frais de transit russes sont annulés, a rencontré peu d'enthousiasme au sein du gouvernement fédéral» et qu' «avant le voyage d' (Angela) Merkel à Washington, il n'était pas clair non plus si Nord Stream 2 pourrait être équipé d'un «kill switch» - un dispositif d'arrêt d'urgence politique au cas où la Russie viderait le pipeline ukrainien».

Pendant ce temps, le patron de Stream 2, Matthias Warnig a  déclaré: «Nous supposons que les travaux de construction seront terminés fin août». Selon le ministère allemand des Affaires économiques, la réception technique est déjà en cours. Joe Biden et Antony Blinken, le ministre des Affaires étrangères, ont longtemps supposé qu'ils ne pourraient pas empêcher l'achèvement de Nord Stream 2, c'est pourquoi ils renoncent dans un premier temps aux sanctions directes contre la société.

Aussi, ils attendent quelque chose en retour «(Joe Biden voudra parler à (Angela Merkel d'une position plus dure envers la Chine, peut-être aussi de l'approbation des vaccins corona».

Olivier Renault

Photo en vedette :Empilement de tuyaux/tubes pour le gazoduc North Stream 2 au port de Mukran, septembre 2020. Source :  commons.wikimedia.org

La source originale de cet article est  Observateur continental
Copyright ©  Olivier Renault,  Observateur continental, 2021

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