24/03/2024 middleeasteye.net  6 min #245457

Guerre à Gaza : nouveau raid des troupes israéliennes sur l'hôpital al-Chifa

Des maisons « incendiées » avec leurs habitants à l'intérieur : le siège de la zone al-Chifa à Gaza racontée par les Palestiniens

Par  MEE

Les témoignages de Palestiniens et d'ONG se multiplient pour raconter l'horreur de l'offensive menée depuis six jours contre le plus grand hôpital de la bande de Gaza et les quartiers environnants

« Ils ont violé des femmes, kidnappé des femmes, exécuté des femmes et retiré des cadavres des décombres sur lesquels ils ont lâché leurs chiens. » Le  témoignage sur Al Jazeera de Jamila al-Hissi, une  Palestinienne assiégée pendant six jours dans un bâtiment près de l'hôpital al-Chifa, dans la  bande de Gaza, a fait le tour des réseaux sociaux.

Depuis sa cachette, elle a décrit en direct par téléphone, dimanche 24 mars, le quotidien, sans eau ni nourriture, à Gaza où, depuis le 18 mars, l'armée  israélienne assiège l'hôpital al-Chifa et les quartiers environnants, notamment al-Rimal et al-Chati, sur la base « d'informations indiquant que l'hôpital est utilisé par des terroristes haut-gradés du Hamas ».

“They raped women, kidnapped women, executed women, and pulled dead bodies from under the rubble to unleash their dogs on them.”
Jamila al-Hissi, a Palestinian woman who was besieged for six days in a building in the vicinity of al-Shifa hospital, told Al Jazeera that Israeli…

Depuis lundi, les habitants du quartier et personnels du complexe hospitalier, le plus grand du territoire palestinien, ont fait état de raids, de fouilles systématiques des maisons alentour, d'importantes destructions de bâtiments notamment à l'hôpital et d'hommes arrêtés par centaines.

Selon  Maha Hussaini, la correspondante de Middle East Eye à Gaza, il y avait mardi environ 30 000 Palestiniens assiégés à l'intérieur même de l'hôpital. Samedi, l'armée israélienne a rapporté avoir tué 170 « combattants palestiniens » et arrêté « des centaines de suspects ».

Depuis le 7 octobre, l' offensive israélienne sur la bande de Gaza a fait plus de 32 000 morts selon un dernier bilan donné dimanche 24 mars.

Elle accuse le Hamas de se servir de cet hôpital comme d'un centre de commandement et a publié des vidéos montrant des armes ou de l'argent liquide saisis selon elle sur place. Elle affirme aussi avoir mis en place une zone de traitement pour les patients.

Les Israéliens « ciblent les enfants malades, les blessés »

« Les forces israéliennes ont incendié des bâtiments résidentiels près de l'hôpital », a aussi  relaté l'Observatoire euro-méditerranéen des droits de l'homme basé à Genève. « Les forces israéliennes ont incendié des maisons alors que les occupants se trouvaient à l'intérieur, empêchant l'évacuation ou l'extinction des incendies. »

L'ONG a aussi  tweeté que les militaires israéliens avaient utilisé des civils palestiniens comme boucliers humains dans le cadre de l'opération à l'hôpital al-Chifa.

« Nous exhortons le secrétaire général de l'ONU et le commissaire de l'Union européenne [UE] à intervenir immédiatement, exigeant qu'Israël cesse ses graves violations contre les civils dans la ville de Gaza, notamment en incendiant des bâtiments résidentiels et en déplaçant de force les habitants vers le sud de Gaza. »

Another horrifying testimony from a woman who survived the vicinity of Al-Shifa Hospital... The Israeli forces entered our homes with dogs and killed the men, including my husband's uncle and brother. Bodies lay in the streets, homes were set on fire, and we were forced to flee…

Traduction : « Un autre témoignage horrible d'une femme qui a survécu à proximité de l'hôpital al-Chifa... Les forces israéliennes sont entrées dans nos maisons avec des chiens et ont tué les hommes, y compris l'oncle et le frère de mon mari. Des corps gisaient dans les rues, des maisons ont été incendiées et nous avons été contraints de fuir vers le sud. »

« Je ne peux même pas mettre de mots sur ce que nous vivons : la faim, la soif, la déportation, la destruction, les bombardements », poursuit Jamila al-Hissi sur Al Jazeera. Elle raconte que les Israéliens « ciblent les enfants malades, les blessés » et évoque « les gens que nous laissons derrière nous se vider de leur sang. »

« Les mère regardaient leurs enfants blessés en pleurant et les Israéliens les ont obligées à sortir. Une mère a vu son enfant saigner à côté d'elle, elle n'a pas pu le prendre avec elle. »

Un massacre.
Des blindés israéliens pénètrent dans l'enceinte du complexe hospitalier al-Shifa à Gaza où s'entassent 30000 réfugiés et 5000 blessés. Les snipers ont pris position autour de l'hôpital.
Les journalistes présents sur place parlent de dizaines de morts palestiniens.

Selon le ministère de la Santé du gouvernement du Hamas, plusieurs bâtiments de l'hôpital ont été touchés, notamment le service des maladies artérielles, incendié. Des arrestations ont eu lieu aussi parmi le personnel.

« Les immeubles, l'hôpital, tout est en feu. Nous n'avons nulle part à nous abriter [...] Les drones volent autour de nous, il y a des snipers partout », décrit encore Jamila al-Hissi en parlant de l'hôpital comme d'une « zone de guerre ».

« Cela ressemble aux zones de guerre que vous voyez dans les films d'action, mais c'est pire que ce que vous voyez à la télévision, que ce que vous entendez aux informations ou de la part de ceux qui implorent de l'aide. Ce à quoi nous assistons est bien pire. »

Pour échapper à la barbarie israélienne, des civils palestiniens réfugiés dans l’hôpital Al-Shifa obligés de fuir dans l’obscurité.
Le massacre et l’humiliation des Palestiniens continuent, avec la complicité des “civilisés” donneurs de leçons.

« Nous ne pouvons pas lever la tête, nous ne pouvons pas parler fort, nous pouvons à peine respirer. Je murmure en vous parlant pour que les [soldats israéliens] ne remarquent pas que nous sommes ici », a  témoigné Rawia al-Batrikhi, une Palestinienne, à MEE.

L'armée israélienne assiège également  deux autres hôpitaux de la bande de Gaza : l'hôpital al-Amal et l'hôpital al-Naser, à Khan Younès.

Selon le  Croissant-Rouge palestinien, les forces israéliennes ont demandé aux Palestiniens hospitalisés à l'hôpital al-Amal de quitter l'établissement « nus » après l'avoir encerclé. Cette demande a été formulée samedi via un drone haut-parleur alors qu'elles lançaient des fumigènes pour encourager le personnel à quitter l'établissement.

L'association caritative a aussi rapporté que l'un des Palestiniens blessés laissés à l'hôpital al-Amal avait également été abattu par les forces israéliennes.

« Quand on regarde Gaza, on dirait presque que les quatre cavaliers de l'Apocalypse galopent au-dessus, semant la guerre, la famine, la conquête et la mort », a déclaré dimanche le secrétaire général des Nations unies António Guterres. « D'un côté de la frontière, on voit des camions humanitaires à perte de vue, de l'autre une catastrophe humanitaire qui empire chaque jour. »

Samedi, il s'est rendu du côté  égyptien du poste-frontière de Rafah, a appelé à mettre fin au « cauchemar » vécu par la population et réclamé « un cessez-le feu humanitaire immédiat » ainsi que la libération de « tous les otages » retenus à Gaza depuis le début de la guerre le 7 octobre.

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