© Nina Zotina / Ria Novosti
Des billets de banque et des pièces en euros (photo d'illustration).
La directive CRD VI, adoptée cette année par l'Union européenne, suscite des inquiétudes au sein des autorités marocaines et des banques du pays. Abdellatif Jouahri, wali de la banque centrale du Maroc, la Bank Al-Maghrib (BAM), a exprimé ces préoccupations lors d'une conférence de presse le 24 septembre, à la suite d'une réunion du conseil de la BAM.
Élaborée par la direction générale de la stabilité financière de la Commission européenne (FISMA), cette législation vise principalement à restreindre l'activité des banques britanniques après le Brexit. Cependant, sa portée générale affecte également les banques d'autres pays extra-communautaires, dont les banques marocaines qui possèdent des filiales et des succursales dans sept pays européens, ainsi que plusieurs bureaux de représentation à travers le vieux continent. Cela soulève, d'après le site d'information e 360, des questions sur leur avenir dans le marché européen.
La directive en question consistera à retreindre la commercialisation de plusieurs services, ce qui aura des répercussions sur la diaspora marocaine et africaine en Europe.
Les importations marocaines risquent d'être paralysées
Ces flux financiers, provenant des Marocains résidants à l'étranger (MRE), profitent autant aux banques locales qu'à l'économie marocaine.
Leur montant a même atteint un niveau record en 2023, s'élevant à 115,3 milliards de dirhams (11 milliards d'euros), contre 110,8 milliards de dirhams (10,3 milliards d'euros) en 2022, soit une hausse de 4,1%, selon les données communiquées en aout dernier par l'Office marocain des changes.
Une tendance qui se poursuit en 2024, où les transferts ont dépassé 68 milliards de dirhams (6,3 milliards d'euros), au cours des sept premiers mois de l'année, en hausse de 3,3% par rapport à la même période de l'année dernière, selon les chiffres fournis par la BAM.
Celle-ci a également notifié le 24 septembre que ces transferts devaient s'accroitre de 3% pour atteindre 121,8 milliards de dirhams (11,3 milliards d'euros) en 2025.
La diminution des transferts financiers des MRE aura des répercussions significatives sur l'économie marocaine. Ces transferts jouent un rôle crucial en soutenant les importations, en particulier dans les secteurs alimentaires et de consommation.
En réduisant les flux financiers entrants, de nombreuses familles dépendant de ces aides pour couvrir leurs besoins quotidiens et investir dans des projets locaux pourraient se retrouver également en difficulté.
Mobilisation stratégique des autorités marocaines
Pour protéger les flux financiers des MRE face aux nouvelles directives européennes, les autorités marocaines, en collaboration avec les banques, ont lancé une mobilisation stratégique. Selon les propos d'Abdellatif Jouahri rapportés par Le 360, cette initiative implique des négociations approfondies avec plusieurs acteurs clés, notamment la Commission européenne et sa direction FISMA, ainsi que les gouvernements de pays européens tels que la France, l'Espagne, l'Italie, la Belgique et les Pays-Bas.
Cette démarche collective inclut la participation active de la Banque centrale, ainsi que des ministères des Affaires étrangères et de l'Économie et des Finances, soulignant l'importance de la coopération interinstitutionnelle. L'objectif ultime, selon la même source, est de garantir que les transferts des MRE restent fluides et soutiennent l'économie marocaine, tout en atténuant les effets potentiels des réglementations européennes sur les familles marocaines dépendantes de ces fonds.
Un nouveau round de négociations entre les autorités marocaines et les banques centrales européennes débutera en octobre et se poursuivra jusqu'à la fin de l'année en cours.
Ce processus, selon le wali de Bank Al-Maghrib vise à obtenir des clarifications sur les interprétations nationales d'une directive communautaire qui sera transposée en droit national, ce qui pourrait varier d'un État membre à l'autre. Jouahri a également exprimé des préoccupations face à la montée de l'extrême droite en Europe, qui pourrait aggraver la situation.