1 La programmation
Sans parler des Systèmes programmés (personnes ayant subi des sévices afin qu'ils adoptent des comportements planifiés qui se déclenchent sur simples stimuli) la manipulation mentale repose sur une programmation.
1.1 Les pactes
Lorsqu'il est question de passer un pacte (avec le diable) il s'agit d'une fausse liberté puisque le choix se résume à accepter ce qui est proposé, ou se retrouver dans la situation qui est une présentée comme une menace. C'est très binaire.
1.1.1 La liberté
La définition de la liberté doit toujours revenir à ce qui permet justement de s'extirper des situations conflictuelles. C'est le fait-même d'avoir opéré un choix libre qui permet cela, que le choix soit bon ou mauvais. Si on se trouve dans l'obligation de choisir, on n'est plus dans le cadre de la liberté mais du chantage. Quel que soit le choix, bon ou mauvais, il ne permet pas de s'extirper d'une situation conflictuelle, mais au contraire de l'entériner.
1.1.2 Le mauvais choix
Lorsque la liberté répond à des jugements, elle n'est que l'art de faire les mauvais choix ; de faire le mal. Même un escarbot sait qu'il faut se mettre à l'ombre quand il y a du soleil et qu'il peut sortir lorsqu'il pleut. En cela, il fait ce qu'il faut. La liberté n'est rien d'autre que de pouvoir faire ce qu'il faut. Cela ne répond pas à un jugement, mais aux faits. À la réalité.
1.2 Le chantage
Lorsqu'on est face à une obligation de choisir, on est face à un chantage, et ce qu'il faut faire à ce moment-là c'est s'extirper de cette situation dangereuse en se mettant en position de ne pas avoir à choisir ; en abolissant la nécessité, qui nous prive de liberté.
1.3 La manipulation
Pour manipuler quelqu'un, la manipe consiste à lui faire croire qu'il a le choix, mais en établissant un cadre étroit de la réalité qui va le conduire à choisir ce qui a été prédéterminé. D'abord on pose la programmation mentale comme une option possible ; on la place sur la pile des choses en mémoire. La personne rejette cette option comme étant absurde mais peu importe, elle est placée en haut de la pile de la mémoire et sera la première option choisie en cas de besoin.
1.4 L'appât
Ensuite il faut mettre la personne dans un état de stress où elle ne peut plus réfléchir, n'a plus le temps d'analyser la situation, plus assez d'énergie pour cela, qu'elle se renie elle-même, et soit forcée d'adopter la solution préalablement stockée en mémoire. Pour cela c'est simple, on lui fait miroiter un désir irréaliste. On l'incite à y croire, on lui explique qu c'est la solution à tous ses problèmes. On en fait le symbole de la réalisation de soi et de la liberté par excellence. Le bonheur, l'amour, la richesse, toutes ces choses sont autant d'appâts qui marchent bien.
1.5 Le piège
Lorsqu'un espoir irréaliste s'avère impossible, sous le poids des moqueries et du viol de la naïveté, il ne reste qu'à se rabattre sur la seule solution rationnelle connue, celle qui a été programmée. On n'a plus vraiment la tête à réfléchir aux questions philosophiques sur le sens des choses. C'est la colère, la peur, le désespoir qui activent la programmation préalablement entreposée en mémoire. La disjonction entre les espoirs et la réalité entraîne la recherche d'une nouvelle disjonction entre la situation désespérée actuelle et le monde tel qu'il était avant.
1.6 La remédiation
Il y a quelque chose de vicié dès le début de la démarche de l'espoir. Il consiste à répondre à un besoin irréaliste qui a été créé sciemment. Il y a une affirmation qui veut être démentie en cherchant cet espoir, mais cette affirmation est elle-même une illusion.
2. Les étiquettes
Et c'est à ce moment-là qu'on en arrive au sujet des étiquettes, c'est à dire au langage symbolique.
Ce que nous apprenons sur les étiquettes est que ce sont des consommables. Elles peuvent servir à véhiculer une motivation qui sera utilisée à mal-escient. Les étiquettes sont avant-tout des déclencheurs d'une programmation.
Une étiquette est une promesse qui vient conforter une croyance.
Imaginez une autoroute déserte en pleine nuit. Elle est correctement éclairée mais conduit vers un ravin. L'étiquette, dans cette configuration, est ce qui va éteindre l'éclairage de quelques portions de route, de sorte à habituer à l'idée qu'on puisse conduire tout droit dans le noir.
La croyance est construite par l'idée selon laquelle la route est toujours là, même si on ne la voit pas, grâce à ce jeu d'éclairages. Sans ce jeu d'éclairages, le conducteur se serait méfié en se retrouvant dans le noir.
De la même manière, la désinformation consiste à rendre inintéressante une information vitale ou déterminante. L'étiquette qui est posée sur une anomalie consiste à éconduire la curiosité, et à l'habituer à ne pas s'inquiéter. On dit "ce n'est pas parce qu'il n'y a pas de preuve que c'est faux". Mais en fait on ne nous laisse pas d'autre choix que de croire que c'est vrai.
Ici ce sont des étiquettes positives, qui consolident la cécité mentale.
Une étiquette négative au contraire aura pour vocation de donner un éclairage nouveau à une réalité. Elle va dire "ceci est mal", et tant qu'à faire, "tous les 'ceci' équivalents sont forcément mal".
En tout étant de cause, les étiquettes sont utilisées pour la programmation mentale. Elle permette d'induire des réactions conditionnées.
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Dans sa définition la plus rigoureuse dont nous sommes capables, les étiquettes sont des mots-valises qui permettent de véhiculer des émotion en accompagnement à des réalité. En réalité, tous les mots et toutes les idées, toutes les choses existantes on une empreinte affective, positive ou négative.
Pour être plus précis, l'empreinte émotionnelle associée à un objet, en fait un sujet. Ce n'est plus une réalité mais un symbole. En faisant d'un objet un symbole, on crée un appel d'air, un vide, qui est comblé par l'approbation de toutes les personnes qui, pour des raisons aussi variées qu'il n'y a de personnes, acceptent d'externaliser leur pensée avec ces même mots, et en ciblant cet objet.
C'est pour cela que nous désignons le plus souvent les étiquettes comme un ordre de frapper quelqu'un. Si on affuble une personne d'une étiquette, elle devient une cible. Et tous ceux qui ont une pierre à la main, ont l'idée de tirer sur lui. Même si c'est leur ami.
La psyché humaine est si facile à manipuler.
Ce sont des enfants.
On leur fait gober ce qu'on veut.
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Il est notable que la conversion d'un objet en sujet, marche aussi dans l'autre sens, lorsqu'on convertit un sujet en objet. Ceci a lieu lorsqu'on déshumanise quelqu'un toujours à l'aide d'une étiquette. Considérer les humains comme des objets est un sujet central pour définir notre époque.
Dans le premier cas, on accole un jugement à un objet et il devient un sujet. Dans le second on accole un jugement à un sujet, et il devient un objet. Dans les deux cas, le jugement préempte sur la réalité.
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En terme général, tous les mots en "-isme" sont des étiquettes. C'est un "étiquettisme", qui transforme une propriété en symbole de quelque chose de relatif - le plus souvent péjoratif. Toute personne employant des mots en "-isme" devrait normalement être étiquetée comme sensible à la manipulation, cherchant à abuser des autres personnes sensibles à la manipulation.
C'est une belle étiquette, n'est-ce pas ?
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Dans une meute, les étiquettes servent à concentrer la haine de foule contre un ennemi déterminé, qu'il soit innocent ou coupable. Elles peuvent se renforcer et en appeler d'autres encore plus violentes, sans pour autant que le sujet n'ait fait quoi que ce soit pour cela.
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Des fois il y a des étiquettes auxquelles on refuse d'être identifiés et dont on se défausse par anticipation.
Imaginons que "ceux qui ont une voiture *sale* sont des menteurs". Amusant. Une personne dont la voiture est sale qui ne veut pas être accusée d'être un menteur, niera que sa voiture est sale. Il entre dans un mécanisme de déni de la réalité, poussé par le poids des étiquettes. Il refuse qu'on l'assimile à un menteur, mais n'a pas la force de s'opposer au poids des étiquettes. Il est dans un conflit intérieur. Ce genre de conflit est la cause première des troubles anxieux généralisés (TAG).
Il est donc placé en situation de faiblesse, et devient une cible privilégiée pour la manipulation mentale. L'étiquette dont il veut se dédouaner, elle, n'est jamais remise en question, parce que pour cela il faudrait s'opposer au poids phénoménal que représentent toutes les personnes qui y croient ; y compris lui-même.
Il peut aussi s'embourber dans un trouble obsessionnel compulsif (TOC) en astiquant sa voiture cinq fois par jour de fond en combles. Dans son esprit il fait cela pour se prouver à lui-même qu'il n'est pas un menteur, car ce serait sa perdition. Dans ses cauchemars, on il est enfermé dans une voiture sale et n'arrive pas à sortir. Mais d'une manière sous-jacente il ne fait que se mentir à lui-même.
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C'est l'étiquette qui prédomine pour transcrire la réalité, et non plus les faits. Les gens vivent dans un monde d'étiquettes, où tout est rattaché à une symbolique. Rien que l'argent est un symbole. Si on en a, on mérite le respect, et le groom de l'hôtel cinq étoiles est poli avec nous. Sinon on peut nous marcher sur les pieds impunément.
Si le président dit qu'il posé un mouchoir sur la table, même s'il n'a pas le nez qui coule, que c'est un maniaque de la propreté, et qu'il a torturé un pays entier pendant deux ans pour qu'ils ne répandent pas le microbe du rhum - allant jusqu'à les incarcérer chez eux pendant deux mois pour ce-même motif - on le croira sur parole, parce que c'est la parole présidentielle, et qu'il est inconcevable qu'elle puisse dire l'inverse de la réalité.
Bon, on a saisi l'image.
Mais le jour où cette étiquette est trop usée, qu'elle a trop servi, elle devient elle-même l'étiquette d'autre chose, d'incontrôlable. Et c'est là que se déclenchent les révolutions.
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Dire la vérité, être sincère - nous disions dans notre livre (1) que si les médias s'y mettaient il leur faudrait des décennies pour apprendre à le faire - est un acte courageux car il s'agit d'affronter "les mensonges dont peuvent être porteurs" la vérité. C'est à dire une grande somme d'étiquettes qui la construisent.
Finalement, la plupart des propos ont une façade "étiquette". L'exacerbation des étiquettes fait de la réalité un simple support pour les jugements. Les jugements priment. N'importe quoi suppose autre chose. Les débats ne portent le plus souvent que sur la façade des choses.
Par exemple en vouloir à la Russie, pour l'état français, est une autoroute du mensonge qui permet de se positionner de façon à ne pas être accusé de mensonge. C'est un mensonge qui sert à se défausser d'être un menteur. Quand la narration va s'effondrer, tout le pop-corn va jaillir de la machine à grains de maïs.
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Nous parlions du nazisme, stupidement caractérisé par sa façade, au lieu de l'être par sa psychopathologie. Mais sa psychopathologie, tant qu'elle n'est pas établie, tant qu'elle n'est pas NOMMÉE, a tout le loisir de muter et changer de façade. On la retrouve, ne serait-ce qu'aujourd'hui, quand on a donné une part des actifs russes confisqués à l'Ukraine pour qu'elle s'achète des armes pour tuer des russes. C'est cynique et vicieux : on utilise l'argent de l'ennemi pour acheter les armes qui vont le tuer. Elle est là, la psychopathologie ; il n'y a aucune dignité, aucune honorabilité, seulement le désir sourd de faire devenir réalité un jugement délirant. Un espoir irréaliste.
Alors, quelle est la seconde partie de l'équation ?
Sur quoi allons-nous nous rabattre quand la vérité viendra percuter les illusions ?
Sur le radeau d'autres étiquettes ? En rendant coupable tous les chevelus ?
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En un mot comme en cent, il faut en revenir aux concepts.
Les étiquettes sont des adjonctions de sentiments et d'objets réels, froids et dénués de sens.
Lorsqu'une personne se montre colérique, vindicative, méprisante, ou vaguement négative, il n'y a aucun doute qu'elle cherche à se défausser d'une étiquette. Et il n'y a aucun doute qu'elle n'a pas la capacité intellectuelle pour séparer, opérer le discernement salvateur, entre l'objet et l'émotion, dont résulte le sujet.
L'émotion, est réelle, et parlante. L'objet, est réel, et innocent. La fusion des deux permet d'établir quelle croyance idiote cimente les deux.
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Le fait est que la réalité telle qu'on la perçoit n'est pas la réalité telle qu'elle existe. Et si le jugement préempte sur la réalité, la réalité se dissout et perd sa substance. Elle n'est plus assez fiable pour supporter un jugement. On en arrive à créer des raisonnements circulaires, qui flottent dans l'absurde.
C'est une question de santé mentale d'opérer le discernement entre la réalité et le jugement optionnel et facultatif qu'on peut porter sur elle à l'intérieur d'un certain cadre de réalisme. Et c'est une question de survie pour l'humanité de comprendre les ressorts de la psychologie, dont elle est sans cesse victime.