29/05/2025 ssofidelis.substack.com  8min #279500

 Le Premier ministre britannique terrorise les partisans de la Palestine

Starmer se soumet aux exigences d'Israël et rejette les « ingérences » de l'Onu

Richard Medhurst, journaliste syro-britannique connu pour son travail sur le Moyen-Orient & "premier reporter arrêté en vertu de l'article 12 de la loi sur le terrorisme de 2000". Photo : domaine public

Par  Craig Murray, le 29 mai 2025

Le gouvernement britannique s'incline devant l'ambassade d'Israël concernant les arrestations de journalistes pour "terrorisme".

Le contraste est saisissant entre d'une part, les facilités accordées par le Royaume-Uni à l'ambassade d'Israël pour influencer les poursuites contre des journalistes et des manifestants anti-génocide et, d'autre part, le rejet par le Royaume-Uni des objections soulevées par les Nations unies contre ces poursuites. Le Royaume-Uni a reproché à l'ONU son "ingérence dans les affaires intérieures".

Je ne saurais trop insister sur le caractère exceptionnel de la décision du Royaume-Uni d'accorder à l'ambassade d'Israël un accès direct à la police et au Crown Prosecution Service (service des poursuites pénales) afin que le gouvernement israélien puisse s'immiscer dans les poursuites engagées contre des citoyens britanniques. Il ne s'agit pas d'une extradition, pour laquelle des accords peuvent prévoir des contacts directs entre les procureurs. Il n'est tout simplement pas normal ni légitime qu'une ambassade s'immisce de la sorte dans des poursuites judiciaires nationales.

Une série d'e-mails fortement censurés, consultés par le Guardian, Middle East Eye et les avocats de Palestine Action, montrent que le gouvernement israélien a pu exercer une influence directe sur la police et les procureurs britanniques afin de les inciter à poursuivre des citoyens britanniques qui ont manifesté au Royaume-Uni contre le génocide dont Israël est accusé devant la Cour internationale de justice et pour lequel ses dirigeants ont été inculpés devant la Cour pénale internationale.

Il n'existe aucun précédent britannique dans ce domaine, et cela va à l'encontre des pratiques internationales, même si l'on peut établir des comparaisons avec l'influence exercée par l'Allemagne nazie ou l'Union soviétique sur les décisions judiciaires dans la France de Vichy ou dans le bloc communiste d'Europe de l'Est, où des cas de résistance ont toutefois été observés. En revanche, le système britannique est ouvertement influencé par les Israéliens.

Le gouvernement britannique n'hésite pas à se faire l'écho d'Israël. Bien que l'ensemble de la correspondance rendue publique ait été largement censurée, il est clair que des cas individuels ont  été discutés avec les Israéliens, y compris ceux de  Palestine Action.

Les Nations unies  ont écrit au Royaume-Uni au sujet du traitement réservé aux manifestants et aux journalistes pro-palestiniens et de l'abus de la législation antiterroriste. Certains des cas cités par l'ONU impliquent l'ambassade d'Israël. On ne pourrait imaginer traitement plus différent de celui réservé par le Royaume-Uni aux Israéliens et aux Nations unies. Les Israéliens sont les bienvenus, tandis que le régime Starmer désavoue les Nations unies.

C'est d'une hypocrisie stupéfiante. Selon le gouvernement britannique, il serait dans l'intérêt des victimes de persécutions par le Royaume-Uni et Israël d'empêcher "l'ingérence d'organisations internationales" telles que les Nations unies. Cela va bien au-delà de l'imagination d'Orwell ou de Kafka. On imagine les auteurs ricaner en l'écrivant.

Mais la vérité est exactement contraire à la ligne du gouvernement britannique. Contrairement à l'ambassade d'Israël, les Nations unies sont bel et bien habilitées à interférer. Les mécanismes des procédures spéciales par lesquels les Nations unies ont approché le Royaume-Uni sont solidement ancrés dans le droit international, et le Royaume-Uni les a ratifiés. Ils ont été institués par le Conseil des droits de l'homme, et le Royaume-Uni a toujours considéré que toutes les nations y sont soumises.

En outre, le Royaume-Uni est depuis 1971 parte prenante à l'International Covenant on Civil and Political Rights [Pacte international relatif aux droits civils et politiques], supervisé par le Comité des droits de l'homme, et aux dispositions auxquelles les rapporteurs spéciaux de l'ONU ont  spécifiquement fait référence lorsqu'ils ont questionné le Royaume-Uni sur ses actions dans cette affaire.

L'ambassade d'Israël s'est donc permis d'intervenir, en violation de la loi, et de s'ingérer dans les affaires d'un autre État, ce qui est tout à fait inacceptable. C'est l'exemple parfait de la mainmise du sionisme sur les institutions publiques britanniques et de la profonde emprise sioniste sur le New Labour.

On ne peut être surpris par la révélation faite hier selon laquelle David Lammy a menti au Parlement et au pays au sujet de la  suspension des négociations commerciales avec Israël, alors que l'"envoyé britannique pour le commerce", Lord Austin, se trouve actuellement sur place

Et l'hypocrisie ne s'arrête pas là. Le Royaume-Uni a été l'un des pays les plus virulents lorsqu'il s'est agi d'utiliser les procédures spéciales de l'ONU contre ses propres ennemis désignés, tels que la Russie et la Chine. En rejetant aujourd'hui ces enquêtes de l'ONU comme étant une "ingérence", le Royaume-Uni adopte exactement la posture des États qu'il a longtemps combattus.

Je ne doute pas un instant que cela ait été dûment noté par toutes les dictatures que le Royaume-Uni pourrait chercher à critiquer à l'avenir.

Je tiens à rappeler que je fais partie des journalistes dont la détention en vertu de la loi sur le terrorisme et la saisie du matériel électronique, et donc de la correspondance, ont fait l'objet d'une demande d'informations de la part des Nations unies au Royaume-Uni. Vous pouvez lire la réponse complète du gouvernement britannique ici.

Depuis que l'ONU a fait part de ses préoccupations, d'autres journalistes ont été arrêtés, notamment Sarah Wilkinson et Asa Winstanley. La réponse du Royaume-Uni reste la même : pas d'ingérence de l'ONU. Mais un détail mérite d'être souligné. Les détentions et confiscations telles que celles dont j'ai fait l'objet en vertu de la loi sur le terrorisme n'exigent pas "de motifs raisonnables de crainte" de la part de la police.

Quel genre d'État donne à sa police le pouvoir d'agir de manière aussi arbitraire ?

Mais lisez la suite du communiqué du gouvernement britannique :

J'ai été détenu et mes appareils électroniques ont été saisis en vertu de l'article 7. Le gouvernement britannique prétend donc que j'étais "impliqué dans la commission, la préparation ou l'incitation à commettre des actes de terrorisme". Méditez cela un instant.

Je dirais que rien dans mon interrogatoire - qui portait autant sur Wikileaks que sur la Palestine - n'avait le moindre lien avec la commission potentielle d'actes terroristes. Le gouvernement prétend-il vraiment que, alors que je rentrais chez moi après une réunion en faveur d'Assange en Islande, je préparais un acte terroriste ? C'est grotesque.

On a souvent fait remarquer que malgré l'arrestation de Sarah Wilkinson, Asa Winstanley, Richard Medhurst, Johanna Ross, John Laughland, Vanessa Beeley, Kit Klarenberg, Ernest Moret, Richard Barnard, Tony Greenstein et Natalie Strecker dans le cadre d'une campagne contre les journalistes au cours des deux dernières années, les médias grand public britanniques n'ont jamais mentionné l'arrestation d'un seul de ces journalistes en vertu de la loi sur le terrorisme.

Même après l'intervention des Nations unies pour interpeller le Royaume-Uni sur l'arrestation de journalistes, le Royaume-Uni n'en a pas fait mention. Même les rares voix anti-génocide autorisées dans les médias mainstream britanniques, comme Owen Jones, n'en ont jamais parlé.

Hier, Asa Winstanley a remporté une importante  victoire juridique à Old Bailey [tribunal de Londres], où un juge a statué que la perquisition de son domicile et la saisie de son matériel par la police étaient illégales. Il s'agit d'une victoire juridique rare et importante, que je suis tenté d'attribuer en partie au revirement de l'opinion de l'establishment, qui refuse désormais de sacrifier tous les principes du droit aux intérêts d'Israël.

Vous ne serez peut-être pas surpris d'apprendre que cette victoire n'a pas non plus été relayée par les médias mainstream. Cette conspiration du silence autour des abus extrêmes de la police à l'encontre des journalistes est extrêmement préoccupante.

Traduit par  Spirit of Free Speech

* Craig Murray est écrivain, journalist et militant des droits de l'homme. Il a été ambassadeur britannique en Ouzbékistan d'août 2002 à octobre 2004 et recteur de l'université de Dundee de 2007 à 2010.

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