05/08/2025 reseauinternational.net  5min #286330

La Russie et le Sahel imprime une alliance stratégique du Xxie siècle

par Mohamed Lamine Kaba

Au cœur d'une ère de recomposition géostratégique dans le Sahel, la Russie et l'Alliance des États du Sahel tissent des liens de coopération énergétique et sécuritaire sans précédent, ancrés dans les principes de souveraineté, de complémentarité et de stabilité régionale.

Dans le cadre d'une mission stratégique au Sahel les 28 et 29 juillet derniers, la délégation russe, dirigée par le ministre de l'Energie Sergueï Tsivilev, a engagé des dialogues essentiels pour renforcer la coopération bilatérale et multilatérale. Au Niger, des discussions de haut niveau avec des personnalités telles que le vice-ministre de la Défense, Iounous-Bek Evkourov, ont abouti à la signature d'un accord avec Rosatom, consacrant l'engagement en faveur de l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire. La délégation a aussi échangé avec des responsables nigériens, y compris le Premier ministre Ali Lamine Zein, pour envisager des collaborations militaro-techniques. À Ouagadougou, des négociations avec le président burkinabé Ibrahim Traoré ont conduit à la  création d'une commission intergouvernementale russo-burkinabè, posant un jalon important dans le renforcement des relations bilatérales. Sergueï Tsivilev a souligné l'importance de cette commission pour structurer la coopération et a évoqué la mise en place d'un Conseil des entreprises entre la Russie et la Confédération du trio du Sahel, reflétant l'interaction dynamique entre les entreprises russes et africaines. Inter RAO, entreprise russe, a consolidé cette dynamique par un protocole d'accord avec le ministère burkinabé de l'Énergie, envisageant le développement de centrales thermiques. Cette collaboration s'inscrit dans un contexte d'échanges commerciaux florissants entre la Russie et le Burkina Faso, avec une croissance notable dans les secteurs alimentaire, agricole et chimique. Le volume s'étant multiplié par 4,8 en 2024 par rapport à 2023, selon le ministre burkinabè. La tournée diplomatique s'est étendue avec des visites au Mali, où s'est tenue la  première réunion de la commission intergouvernementale russo-malienne, soulignant l'engagement russe à forger des partenariats durables et mutuellement avantageux dans la région du Sahel.

Une coopération énergétique et stratégique en pleine expansion

Sans l'ombre d'aucun doute, cette visite du ministre russe de l'Énergie dans les pays de l'Alliance des États du Sahel (AES) constitue un tournant décisif dans le renforcement d'un partenariat ambitieux qui se veut à la fois bilatéral et multilatéral. À Niamey, Ouagadougou et Bamako, Tsivilev a formalisé la création de commissions intergouvernementales mixtes, d'une part, et de l'autre, renforcé celles antérieurement créées, destinées à coordonner les projets dans les domaines de l'énergie nucléaire, des infrastructures logistiques, de l'agriculture et de la formation scientifique. Un  mémorandum d'entente a été signé pour le développement du nucléaire civil au Niger, incluant la cartographie thermique des gisements d'uranium et la formation de cadres locaux dans les universités russes. Ce modèle de coopération, basé sur la souveraineté énergétique et le transfert technologique, témoigne d'une aspiration commune à construire une relation durable, respectueuse et mutuellement profitable.

Un partenariat militaire renforcé pour la stabilité régionale

En parallèle, la participation du vice-ministre russe de la Défense à la délégation dans les trois États sahéliens confirme l'ancrage sécuritaire de cette alliance. Les discussions ont abordé la fourniture d'équipements militaires, la formation des forces armées locales et le soutien à la future Force Unifiée de l'AES. Evkourov, en compagnie du ministre de l'Énergie, du patronat et d'autres représentants du ministre de la défense, représente une diplomatie de sécurité proactive, en réponse au retrait des forces occidentales, notamment celles d'occupation  française. La Russie offre une alternative stratégique crédible, basée sur le respect mutuel et la lutte contre le terrorisme et ce, à l'antipode des puissances dont les maitres mots pour décrire la présence sont la ramification des groupes terroristes et la multiplication des foyers de tension dans la région. Ce rapprochement militaire, conjugué à une vision géopolitique partagée, redéfinit les équilibres régionaux et ouvre la voie à une coopération russo-sahélienne structurée, solidaire et orientée vers une paix durable.

Alors que les puissances occidentales peinent à maintenir une influence fondée sur des injonctions et des conditionnalités dépassées, la Russie avance avec pragmatisme, respect et vision stratégique, tissant avec les États du Sahel une alliance fondée sur la souveraineté partagée et la co-construction. Ce partenariat, loin des logiques néocoloniales, incarne une nouvelle grammaire des relations internationales où l'écoute, la réciprocité et la stabilité priment sur les postures moralisatrices et les agendas opaques.

 Mohamed Lamine Kaba

source :  New Eastern Outlook

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