par François Meylan
La disparition d'Emmanuel Nathi Mthethwa avait été signalée par son épouse, la veille. Il lui aurait envoyé un message dans la soirée du lundi 29 exprimant son intention de mettre fin à ses jours.
Emmanuel Nathi Mthethwa a été retrouvé sans vie ce mardi 30 septembre 2025, au pied de l'hôtel Hyatt, dans le 17ème arrondissement, à Paris, suite à une chute du 22ème étage. Son épouse avait signalé sa disparition après avoir reçu un message «inquiétant» de sa part. Le parquet de Paris a ouvert une enquête pour «recherche des causes de la mort», mais les premières constatations suggèrent un suicide. Il n'y a, pour l'instant, aucun lien établi entre la subite disparition de l'ambassadeur et la plainte de l'Afrique du Sud contre Israël auprès de la Cour internationale de justice (CIJ).
Enquête ouverte
Le parquet de Paris a confié une enquête à la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP) pour élucider les causes de sa mort.
Le contexte
Le parquet a indiqué que la fenêtre sécurisée (22ème étage) avait été forcée avec des ciseaux retrouvés sur place. Ce qui exclut la piste de l'accident mais pas celle de l'assassinat.
Le lien avec la CIJ
Pour l'instant, le décès de l'ambassadeur ne peut être considéré comme étranger au fait que l'Afrique du Sud ait déposé plainte contre Israël auprès de la Cour internationale de justice (CIJ). La plainte concernant l'accusation d'acte de génocide perpétré à Gaza. La temporalité est pertinente. Cette mort intervient alors que le président américain Donald Trump présente un plan de paix pour la cause palestinienne que personne ne semble pouvoir rejeter.
Pour rappel...
L'Afrique du Sud a déposé, en date du 29 décembre 2023, une plainte contre Israël de devant la Cour internationale de Justice (CIJ) qui est le principal organe judiciaire des Nations unies (ONU). Motif de la plainte : l'Afrique du Sud accuse Israël de violer la Convention sur la prévention du crime de génocide de 1948.
La procédure comprend deux phases principales
1. Demande de mesures conservatoires : c'est la phase urgente. L'Afrique du Sud a demandé à la Cour d'ordonner des mesures provisoires pour protéger les droits des Palestiniens pendant que l'affaire principale (sur le fond) est examinée, ce qui peut prendre plusieurs années.
• Décision de la CIJ (26 janvier 2024) : la Cour a rendu sa décision sur ces mesures. Elle n'a pas ordonné de cessez-le-feu comme l'avait demandé l'Afrique du Sud, mais elle a imposé plusieurs mesures importantes à Israël :
• Israël doit prendre toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir les actes de génocide à Gaza.
• Il doit permettre l'accès de l'aide humanitaire.
• Il doit préserver les preuves et soumettre un rapport à la Cour sous un mois pour montrer sa conformité avec ces ordres.
2. L'affaire sur le fond : c'est la phase principale où la CIJ examinera de manière approfondie si Israël a effectivement commis un génocide. Cette procédure est en cours et pourrait durer plusieurs années.
Quel serait l'objectif recherché par le biais de l'assassinat ?
C'est bien l'État sud-africain qui a engagé une action en justice contre Israël devant la plus haute juridiction des Nations unies, marquant une étape juridique et diplomatique majeure dans le conflit israélo-palestinien. Le cas échéant, le mobile de cet assassinat déguisé en suicide serait l'intimidation ou encore l'avertissement et l'encouragement à retirer la plainte en question. Le Mossad - les services secrets israéliens - n'en serait pas à son coup d'essai. 1
Qui était Emmanuel Nathi Mthethwa ?
C'était une forte personnalité et un interlocuteur d'intérêt. Il a été ministre des Arts et de la Cultute de l'Afrique du Sud, de 2014 à 2019. 2
Entre 2007 et 2022, il a été un haut responsable du Congrès national africain (ANC), la première force politique au pouvoir depuis les premières élections démocratiques en 1994. Il a également opéré dans la clandestinité, au sein de la branche militaire de l'ANC (le parti de Nelson Mandela, durant le régime de l'apartheid. Il avait notamment été arrêté pendant l'état d'urgence en 1989.
- Quelques assassinats du Mossad sur sol parisien :
- 8 décembre 1972 - Mahmoud Hamchari - Représentant du Fatah et de l'OLP ;
- 6 avril 1973 - Basil Al-Kubaïsi - Universitaire irakien, membre du FPLP ;
- 28 juin 1973 - Mohamed Boudia - Indépendantiste algérien engagé pour la cause palestinienne.
- Site internet de l'ambassade sud-africaine.