Par H16, le 1er octobre 2025
Si les Allemands ne sont pas parvenus à faire fonctionner l'éco-socialisme, personne n'y parviendra.
La situation allemande est catastrophique et si vous vous contentez des médias de grand chemin français, vous ne le savez probablement pas.
En effet, la presse française, arc-boutée sur les petits soubresauts de la politique nationale, ne semble guère préoccupée de ce qui se passe ailleurs dans le monde. Il y a bien, de temps en temps, quelques gros titres sur les frasques de Trump outre-Atlantique, mais décidément, l'économie n'est pas un sujet qui intéresse la presse française, ni, par conséquent, les Français.
Oh, il y a bien, pour ceux qui les cherchent, quelques articulets pour expliquer les mauvaises passes de l'une ou l'autre entreprise, les impacts éventuels d'une nouvelle législation inventive propulsée par une Union européenne en roue libre. Et bien évidemment, lorsqu'il s'agit de pousser la taxe Zucman et autres débilités socialistes, là, la presse est sur le pont.
Mais lorsqu'il s'agit d'expliquer que l'Allemagne est en train de s'effondrer économiquement, on trouve assez peu d'articles.
Pourtant, l'Allemagne a perdu 125.000 emplois industriels ces deux derniers mois. Ce chiffre, monstrueux en lui-même et surprenant par la rapidité avec laquelle il est atteint, ne donne pas forcément la mesure du désastre. Le détail permet de mieux se rendre compte de l'ampleur du problème puisqu'on apprend que, sur l'année écoulée, les constructeurs automobiles ont ainsi éliminé 111 400 emplois : Volkswagen 35 000, Mercedes-Benz 40 000, Audi 7500, Ford à Saarlouis 2900, Daimler Truck 5000, ZF Friedrichshafen Group (équipementier automobile) 14,000, Bosch avec Continental et Schaeffler 7000. Dans le rail et les transports, Deutsche Bahn s'est séparé de 30 000 employés, et DB Cargo de 5000. La Deutsche Post perd 8000 emplois, et la Commerzbank 3900. Signalons que SAP (logiciels de gestion) se sépare de 3500 salariés en Allemagne et 10 000 dans le monde.
Enfin, dans l'acier - et c'est particulièrement éclairant compte-tenu de l'histoire allemande - Thyssenkrupp a viré 11 000 personnes, soit environ 40% de leur masse salariale, rejoignant ainsi d'autres géants industriels comme Bosch ou Continental, tous âgés de plus de 100 ans. En réalité, c'est une véritable vague d'entreprises centenaires qui luttent actuellement pour leur survie : Ainsi, Mayer & Cie. (1905), Brüder Schlau (1921) et Gärtner Pötschke (1912) ont toutes déposé le bilan.
Galeria, dont les origines remontent au XIXe siècle, a échappé de justesse à la faillite.
La crise des "Traditionsunternehmen" allemandes (les "entreprises traditionnelles", ces entreprises qui existent depuis longtemps et peuvent se prévaloir d'une longue tradition, et se distinguent souvent par des valeurs telles que la qualité, la durabilité ou les liens familiaux et qui se différencient d'une jeune start-up) montre à présent que le patrimoine seul ne suffit pas à protéger contre les pressions structurelles globales liées aux coûts élevés de l'énergie, à la disruption numérique et à la concurrence mondiale.
En effet, ces entreprises et la bonne santé économique de l'Allemagne reposaient essentiellement sur deux principaux piliers, à savoir une énergie bon marché en provenance de Russie et une main-d'œuvre bon marché provenant d'Europe de l'Est. À cela s'ajoutait des perspectives de stabilité notamment géopolitique avec une "Pax Americana" garantie par le parapluie nucléaire américain.
Cependant, ces trois éléments viennent de disparaître assez rapidement : l'énergie bon marché n'existe plus, emportée par l'instabilité géopolitique. Et les vagues migratoires actuellement subies par l'Europe ont largement mis à mal les paradigmes ouvriers.
Et au-delà de la question géopolitique, on ne peut pas passer sous silence la "transition écologique" qui transforme une difficulté passagère provoquée par la guerre en Ukraine en véritable massacre industriel durable : c'est cette "transition" qui impose des choix énergétiques dont on s'aperçoit bien tard - malgré les avertissements répétés des libéraux qui, eux, comprennent quelque chose à l'économie - qu'ils se révèlent calamiteux.
Eh oui, une énergie verte, c'est une énergie extrêmement chère. Et une énergie chère, cela veut dire des produits plus difficiles à produire, beaucoup plus coûteux, une compétitivité plus faible et, à la fin, moins d'emplois.
Le bilan est sans appel : alors qu'en France, les industries sont démantelées ou simplement revendues à vil prix à l'étranger pour des raisons à la fois idéologiques et un coût du travail qu'on a conservé prohibitif pour tenter de faire tenir un modèle social à tout prix, en Allemagne les industries s'effondrent pour des raisons encore plus idiotes à base de greenwashing, poussant par exemple ThyssenKrupp à se faire racheter par des Indiens.
Ces choix politiques idéologiques suicidaires se traduisent d'ailleurs assez directement chez les particuliers puisqu'on observe une croissance alarmante du nombre d'Allemands ayant maintenant des difficultés à payer leurs factures de gaz et d'électricité.
Pour un pays qui, de surcroît, doit maintenant faire face à une véritable "falaise démographique", voilà qui ne laisse augurer rien de bon.
L'Allemagne était peu ou prou le moteur industriel de l'Europe mais elle a choisi le pari de vieillir, de se désindustrialiser, de rater le tournant de la robotique et de l'IA pour garantir que leurs grues de construction sur des chantiers immobiliers à l'arrêt seront superbement carbone-neutres. Audacieux, n'est-ce pas ? À présent, les prévisions de la Bundesbank ressemblent à une pochette d'un album de black métal avec 0% de croissance, 0% de sourire et 100% de serrage de dents.
Il va sans dire que l'effondrement allemand ne présage absolument rien de bon pour le reste de l'Europe, surtout pour une France quasiment en faillite.