
Par Dan Dinello, le 27 octobre 2025
Chicago - Parmi les plus belles villes du monde, ma ville natale, Chicago, a été profanée, violée et ravagée par les troupes paramilitaires de Trump, sous prétexte de faire respecter les lois sur l'immigration. Bien que confrontés à une armée anti-immigration, les habitants des quartiers de l'agglomération de Chicago se sont organisés et ont uni leurs forces pour contrer l'opération d'expulsion éclair.
On aurait dit Halloween avant l'heure, alors que les soldats en tenue de combat sautaient des camions dans le quartier de Gold Coast, à Chicago, un dimanche après-midi ensoleillé de septembre. Les agents de l'Immigration and Customs Enforcement (ICE) et les membres de la Customs and Border Protection (CBP) portaient des tenues de combat intégrales, des casques balistiques, des lunettes de soleil et des masques, des armes de poing à la ceinture et un fusil en bandoulière. L'incursion en tenue de combat de ces agents a rapidement pris une tournure surréaliste lorsqu'ils se sont mêlés aux passants perplexes et en tenue estivale sur Michigan Avenue, le Magnificent Mile.
Ce spectacle affligeant est une pure démonstration de force et d'intimidation. L'avocat Berto Aguayo a publié une vidéo montrant les troupes de l'ICE avancer en formations agressives, conseillant aux Latino-Américains de garder leurs distances. Des diffusions en direct sur les réseaux sociaux ont montré quatre vedettes de la police des frontières avec des soldats armés et le commandant Greg Bovino, alias "Göring", cheveux en bataille, patrouillant sans raison sur la rivière Chicago, bien loin de toute frontière.
Des troupes prêtes au combat ont traqué les touristes dans le Millennium Park voisin. Pour démontrer leur toute-puissance, ils ont illégalement arrêté une famille de quatre personnes, apparemment parce qu'elles avaient un petit air mexicain. Les passants et les badauds les ont suivis en scandant : "ICE, dégagez !" et "La honte sur vous !" Des sifflets stridents ont retenti, donnant le signal du rassemblement anti-ICE qui s'est rapidement propagé au fur et à mesure que l'ICE infestait la ville et ses banlieues.
f. j. zirbel, "Junta - Minister of Justice". © f.j.zirbel
L'assaut militaire anti-immigrés de Trump, baptisé opération "Midway Blitz", a été annoncé le 8 septembre avec la promesse de "cibler les pires criminels étrangers en situation irrégulière" de la ville. Bien sûr, il a menti. Les voyous de l'ICE et du CPB harcèlent et poursuivent régulièrement des citoyens américains, les traînent par les vêtements et les cheveux et les poussent dans des fourgons banalisés.
L'abus de pouvoir de l'État envers les citoyens de Chicago est une provocation, un laboratoire pour un État policier terroriste et une mise en scène propagandiste propice à la médiatisation.
Les attaques illégales de l'ICE, avec coups de poing, agressions violentes, gaz lacrymogènes et tirs au poivre, se multiplient dans la ville et sa banlieue. Elles sont filmées, mises en musique et diffusées sur les réseaux sociaux pour assouvir le sadisme des partisans de MAGA. Des soldats aux allures de combattants de Call of Duty terrorisent et maltraitent des gens sans défense, traumatisés et désemparés, à la merci d'un déchaînement de sadisme légalisé.
Jeudi dernier, les sbires du CPB ont fait irruption au cœur de la communauté mexicaine de Chicago, à Little Village et Cicero, dans le sud-ouest de la ville, à bord d'un convoi de SUV noirs. Sans autre objectif que de semer la panique, ils ont tenté d'entrer dans le centre commercial Little Village Discount Mall, avant de réaliser qu'il était fermé. Ils se sont alors heurtés aux habitants mobilisés en toute hâte grâce aux photos et vidéos publiées sur les réseaux sociaux. En tenue de combat et le visage masqué, les soldats, sous les ordres arrogants de Bovino, le chef du CPB, ont provoqué le chaos en lançant des gaz lacrymogènes sans sommation, en violation d'une décision de justice.
Ils ont alors brutalement arrêté plusieurs manifestants en pleine confusion. La veille, des agents fédéraux ont provoqué un accident de circulation qui a suscité l'indignation de riverains, eux aussi aspergés de gaz poivré.
"Ils ont emmené au moins huit personnes, dont quatre sont des citoyens américains et deux de mes collaborateurs", a déclaré le conseiller municipal Mike Rodriguez. "Le règne de la terreur s'est abattu sur notre quartier".
Cette attaque a incité la juge fédérale Sara Ellis à intervenir, exaspérée par les méthodes des agents fédéraux. Vendredi, elle a ordonné au commandant Bovino, qui avait lancé une grenade lacrymogène sur la foule de Little Village en riant, de comparaître à nouveau devant le tribunal la semaine prochaine.
Bovino, symbole de la guerre contre l'agglomération de Chicago, a admis que les agents s'en prennent aux passants et les arrêtent au motif de leur couleur de peau. La majorité MAGA de la Cour suprême (6 contre 3) a statué, au mépris de la Constitution, que les agents de l'ICE/CPB peuvent détenir un individu en fonction de sa race, pratique courante des États policiers. Rédigée par Kavanaugh [juge fédéral siégeant à la Cour suprême], cette mesure bafoue la Déclaration des droits, qui garantit aux Américains une protection contre la fouille et l'arrestation illégales.
En investissant les quartiers nord et ouest de Chicago, plus aisés, la police fédérale a investi Lakeview et Lincoln Park, ainsi que Bucktown, Wicker Park et Ukrainian Village, où j'ai vécu pendant des années. Les agents fédéraux ont notamment brisé une vitre de voiture devant un centre de santé familial, alors que la compagne enceinte du propriétaire attendait son rendez-vous. D'autres agents ont arrêté deux ouvriers du bâtiment chez un particulier et ont gazé les voisins venus protester. Ils ont aussi renversé une femme en conduisant à vive allure, et ont pris la fuite sous le regard horrifié des témoins.
Les autorités fédérales patrouillent désormais dans presque tous les quartiers de Chicago, et les habitants ne cachent pas leur colère et leur écœurement.
"En tant qu'avocat et fervent défenseur de l'État de droit, je suis choqué d'assister aux violations flagrantes de la loi, juste devant chez moi", a déclaré un témoin.
Scott Sakiyama, citoyen américain, a été menotté et illégalement arrêté la semaine dernière par la police de l'immigration devant l'école de son enfant, l'Abraham Lincoln School, dans le quartier de Near West Oak Park. Cinq de ses neveux et nièces ont fréquenté cette école en toute sécurité, sans craindre qu'un parent puisse être kidnappé par la police. Sakiyama a déclaré qu'il roulait derrière le véhicule des agents, klaxonnant et sifflant pour avertir les voisins de leur présence. Un geste qui a suffi à irriter les sbires de Trump.
Ma femme et moi vivons actuellement à Oak Park, une enclave multiculturelle, tolérante et anti-Trump qui a voté à plus de 90 % pour Kamala Harris en 2024. Nous condamnons les incursions de l'armée privée de Trump dans notre quartier et la normalisation de ses tactiques policières scandaleuses par les médias nationaux.
Mardi dernier, au nord-ouest d'Albany Park, un voyou en uniforme a braqué son arme sur Hoan Huynh, représentant de l'État, après avoir immobilisé son véhicule alors qu'il klaxonnait pour signaler une alerte anti-ICE. Huynh a déclaré :
"Je n'aurais jamais cru possible qu'en 2025, nous vivrions sous un régime autoritaire aux États-Unis. Mais s'ils peuvent agir de la sorte ouvertement contre un élu, imaginez ce qui doit se passer derrière des portes closes".
BROADVIEW, ILLINOIS - 24 OCTOBRE : Des agents du shérif du comté de Cook entre les manifestants et le centre de détention de l'ICE le 24 octobre 2025 à Broadview, dans l'Illinois. Des manifestations ont lieu devant le centre depuis plusieurs semaines, alors que l'opération Midway Blitz de l'administration Trump est en cours, arrêtant et détenant des immigrants dans la région de Chicago. (Photo © Abel Uribe/Getty Images) / gettyimages.com
Une fusillade impliquant l'ICE a mortellement blessé un père célibataire sans antécédents de violence. Silverio Villegas González, père de deux enfants, venait de déposer l'un d'eux à l'école lorsque les agents de l'ICE l'ont abattu. Marimar Martinez, une citoyenne américaine qui travaille comme aide-enseignante dans une école Montessori, a également été blessée dans cette fusillade.
Sans se soucier du statut ni de la nationalité des victimes, les brigades anti-immigration ont procédé à des arrestations, puis ont cherché à recueillir des informations à leur sujet. Ce scénario se répète depuis le début du mois de septembre aux abords des tribunaux, lors de contrôles routiers, devant des commerces de proximité comme dans la banlieue de Naperville, dans des hôpitaux, des églises et des écoles, comme à St. Jerome's dans le quartier nord de Rogers Park, où mon fils a été scolarisé, et même à l'intérieur d'un complexe d'appartements dans le quartier de South Shore. Le tout sans procédure régulière.
Cette effroyable attaque nocturne a eu lieu dans un immeuble de cinq étages en briques situé au 7500 S. South Shore Drive. Kanye West a grandi à seulement 800 mètres au sud de cet immeuble. Jesse Jackson a longtemps vécu à Jackson Park Highlands, dans le quartier de South Shore, une zone résidentielle huppée qui a notamment attiré la légende des Chicago Bears, Gale Sayers. La maison d'enfance de Michelle Obama se trouve à environ un kilomètre et demi d'Euclid Avenue, où elle et Barack Obama ont brièvement vécu après leur mariage. Dans ses mémoires, Becoming, elle attribue à ce quartier, à sa forte cohésion familiale et communautaire, le mérite d'avoir forgé son identité et ses valeurs fondamentales.
Ce qui s'est produit dans la nuit du 30 septembre dans cet appartement de South Shore est jusqu'à présent le pire événement de ces six dernières semaines, rythmées par des embuscades de l'ICE et du CPB.
Des hélicoptères Black Hawk ont survolé l'immeuble et des tireurs d'élite sont descendus en rappel sur le toit. Alors que des grenades assourdissantes retentissaient à l'intérieur de cet immeuble de 130 appartements, des agents de l'ICE, du CBP et du FBI, en tenue de combat, ont enfoncé les portes et brisé les fenêtres, terrorisant les habitants. Soutenus par des camions antiémeutes et des bombes fumigènes, ils ont contraint les habitants, certains pleurant et criant, à sortir de leur lit sous la menace d'une arme, sans même leur permettre de rassembler leurs affaires ou de s'habiller.
Après avoir ligoté certains d'entre eux avec des bracelets en plastique, ils les ont parqués dans des camions Budget de location. Ils ont retenu d'autres résidents à l'extérieur pendant des heures, ignorant leurs plaidoyers de compatriotes américains. Quatre habitants de South Shore ont déclaré avoir vu des enfants nus et ligotés avec des attaches en plastique lors de cette nuit choquante.
"Imaginez que l'on vienne vous enlever vos enfants au milieu de la nuit, qu'on les menotte avec des bracelets en plastique, et que vous ne sachiez pas où ils ont été emmenés, ce qui va leur arriver, ni s'ils vous seront rendus un jour - surtout si ces enfants sont citoyens américains et que vous ne l'êtes pas", a déclaré un témoin.
Cette descente a été décrite comme une "violation flagrante du Quatrième Amendement" par Paul Gowder, professeur de droit à l'université Northwestern. Il a qualifié ce blocus de type militaire de
"l'un des actes les plus anticonstitutionnels que le gouvernement fédéral ait jamais commis. Le système des mandats de perquisition, des droits à une procédure régulière, etc., repose sur la présomption d'innocence : personne ne peut être déclaré coupable tant qu'il n'a pas été jugé par un tribunal".
Mais, à Chicago, nous vivons dans la dystopie futuriste du film Minority Report (2002), dans lequel la police procède à des arrestations pour des crimes qui n'ont pas encore été commis, sur la base d'intentions supposées.
Alors que près de 300 soldats ont mené une opération sans mandat dans une communauté majoritairement noire, le gouvernement fédéral n'a fourni aucune information publique sur le nombre de personnes détenues, le nombre de détentions en cours et le sort des enfants présents dans l'immeuble au moment de l'opération, que les résidents n'ont pas revus depuis.
Le Chicago Tribune n'a pu confirmer l'identité que d'un seul immigrant, un livreur de pizzas de 41 ans, placé en détention par les agents fédéraux cette nuit-là. Sa famille a déclaré qu'il est arrivé aux États-Unis en provenance du Mexique à l'âge de 10 ans. Actuellement incarcéré dans une prison du Kentucky, il n'a aucun antécédent judiciaire.
La descente dans l'immeuble n'était qu'une démonstration de la brutalité conçue pour la télévision, diffusée deux jours plus tard dans une vidéo de propagande du DHS [département de la Sécurité intérieure] réalisée sur mesure, qui célèbre avec perversité la malveillance, la puissance dominatrice et la déshumanisation de l'opération.
La vidéo commence par le vrombissement sinistre d'un hélicoptère, puis la caméra filme le bâtiment, tel un prédateur, tandis que des projecteurs balayent la façade. Des soldats armés, en tenue de combat et masqués, équipés de lunettes de vision nocturne, escaladent une échelle pour pénétrer dans un appartement. La scène rappelle l'attaque contre la cachette d'Oussama Ben Laden dans le film Zero Dark Thirty. La vidéo montre ensuite le passage à tabac de résidents en détresse et terrifiés.
Pour couvrir ce raid anticonstitutionnel, Bovino, le tyran du CPB, utilise l'argument favori de l'administration Trump : il prétend que des membres du gang Tren de Aragua se trouvaient à l'intérieur. Soupçonner quelqu'un d'appartenir à un gang ne suffit pas à justifier son arrestation, sa détention, son transfert dans un camp de concentration au Salvador ou son exécution en haute mer.
Outre la propagande et les actes d'intimidation, l'assaut sur l'appartement a servi de manœuvre d'entraînement, a déclaré Trump plus tard dans la journée.
Quelques heures après l'opération, il s'est adressé à des centaines de généraux et d'amiraux en service à travers le monde, convoqués pour l'occasion. Physiquement et mentalement éprouvé, Trump s'est exprimé d'une voix peu assurée. Son discours semblait
"incohérent, dépourvu d'énergie, partisan, parfois absurde, décousu, sans ligne directrice",
selon le général à la retraite Barry McCaffrey.
En plein déchaînement de délires et de mensonges compulsifs, Trump a déclaré aux commandants militaires du pays qu'il va déclarer la guerre à l'Amérique, en particulier aux villes de San Francisco, Chicago, New York et Los Angeles. Il a vilipendé ces villes, les qualifiant de
"villes infernales rongées par la criminalité", et a promis que les généraux mèneront une "guerre de l'intérieur", faisant de ces villes des "terrains d'entraînement pour notre armée".
BROADVIEW, ILLINOIS - 17 OCTOBRE : La police arrête un manifestant lors d'une mobilisation devant le bâtiment de l'ICE après le démantèlement récent de la clôture de sécurité de l'installation à Broadview, Illinois, Chicago, États-Unis, le 17 octobre 2025. (Photo © Jacek Boczarski/Anadolu via Gerty Images)
Trois cents soldats de la Garde nationale du Texas ont été déployés dans la région de Chicago et stationnés à plusieurs kilomètres de là, au centre d'entraînement de l'armée d'Elwood, dans l'Illinois. Leur déploiement a été condamné par le gouverneur de l'Illinois, J. B. Pritzker, et jusqu'à présent bloqué par les tribunaux. Mais dans combien de temps les soldats de la Garde nationale, avec leur accent sudiste, repousseront-ils les policiers du nord dans les villes de l'Illinois ? Donald Trump a également appelé à l'emprisonnement du gouverneur de l'Illinois, J. B. Pritzker, et du maire de Chicago, Brandon Johnson, qui a affirmé que le président "a clairement déclaré la guerre à la ville de Chicago".
Si un front existe dans cette guerre, il se situe le long de la 25è avenue, à West Suburban Broadview, une banlieue majoritairement noire, où le centre de rétention de l'ICE est situé à proximité d'une entreprise de lutte antiparasitaire. C'est un bâtiment en briques de deux étages dont les fenêtres sont condamnées par des panneaux de contreplaqué, et l'accès à la rue est bloqué par des blocs de béton, rappelant l'ambiance de la zone verte de Bagdad pendant la guerre en Irak. C'est ici que des centaines de personnes menacées d'expulsion sont incarcérées dans des conditions sordides avant d'être transférées vers d'autres camps de détention à travers le pays. Le nombre exact de détenus n'est pas rendu public.
Le centre de l'ICE constitue l'un des bastions de la résistance à la croisade de Trump contre l'immigration. Des manifestants s'y rassemblent régulièrement pour exprimer leur indignation et interpeller les agents présents en scandant : "Démissionnez !" et "Bas les masques !". La police de l'ICE a attaqué des manifestants, des journalistes et même certains politiciens en tirant des balles en caoutchouc et des munitions chimiques sur des citoyens exerçant leur droit à la liberté d'expression.
Lorsque Kat Abughazaleh, une candidate de 1,50 mètre à la neuvième circonscription de l'Illinois, a été bousculée et violemment jetée sur l'asphalte alors qu'elle manifestait, la vidéo est devenue virale. Le compte officiel X du DHS admet l'incident, mais affirme faussement qu'elle
"prenait parti pour les cartels sanguinaires, les trafiquants d'êtres humains et les criminels endurcis"."Ce que cette administration tente de faire est terrifiant", a déclaré Mme Abughazaleh. "Ils veulent réprimer nos droits humains fondamentaux. Ils ne cherchent pas l'apaisement, mais la soumission totale et absolue".
Les manifestations se poursuivent depuis six semaines. Plus de 200 manifestants se sont joints à une cinquantaine de responsables religieux qui se sont rassemblés vendredi dernier devant le centre de détention. Ils ont prié pour les détenus et le repentir des agents de l'ICE qui les ont arrêtés. Chaque vendredi, des représentants de diverses confessions organisent un service de prière sur le site, signe de la mobilisation croissante des chefs religieux contre la répression illégale.
Le pape Léon XIV, originaire de Chicago, a dénoncé les mauvais traitements infligés aux immigrants lors d'un discours, ajoutant ainsi sa voix aux nombreuses condamnations.
"Face aux abus commis sur des migrants vulnérables, nous ne sommes pas témoins d'un exercice légitime de la souveraineté nationale, mais de crimes graves commis ou tolérés par l'État", a-t-il déclaré. "Le christianisme, en revanche, fait référence au Dieu d'amour qui fait de nous tous des frères et sœurs".
Plus de 250 chefs spirituels chrétiens locaux ont signé une lettre ouverte condamnant les tactiques abusives de l'ICE. Intitulée "Jésus a été gazé à Broadview", elle a été signée par plus de 250 chefs spirituels chrétiens locaux.
Début octobre, la secrétaire du DHS, Kristi Noem, alias "ICE Barbie", bras droit de Trump et tueuse de chiens invétérée, a visité les propriétés que l'administration cherche à acquérir lors d'une visite à Broadview. Elle supervise un afflux massif de 170 milliards de dollars que les républicains ont accordés au DHS pour leur guerre contre les immigrés. N'hésitant pas à bafouer l'État de droit, Noem est tout indiquée pour prendre la tête de l'État policier américain.
Narcissique invétérée, elle a voyagé avec Benny Johnson, la mascotte de la propagande MAGA. Fraudeur de longue date et bénéficiaire de fonds destinés à la désinformation secrète, Benny filme chacun de ses gestes, de simples séances photo fascistes, probablement.
La vidéo où Benny se montre involontairement à son désavantage montre Noem confrontée aux réticences d'un employé de Broadview Village. Dans la vidéo, Noem affirme qu'elle est à Chicago pour "arrêter des individus avec antécédents judiciaires" lorsqu'on lui refuse l'accès au bâtiment municipal de Broadview Village. On entend la voix d'un homme debout derrière la porte vitrée lui dire : "Non, vous ne pouvez pas entrer !" alors qu'elle demandait à utiliser les toilettes.
À Chicago, les autorités municipales et les groupes locaux de défense des droits ont uni leurs efforts pour contrer les opérations de l'ICE. Le gouverneur de l'Illinois, J. B. Pritzker, et le maire de Chicago, Lori Lightfoot, contestent le déploiement de la Garde nationale devant les tribunaux. Johnson a également déclaré que les biens municipaux sont interdits d'accès à l'ICE, même si on ignore comment il compte faire respecter les "zones sans ICE", à moins de ne pas déverrouiller les portes des bâtiments municipaux.
Alors que l'ICE sème chaos et violence, les communautés contestent la politique de Trump en se mobilisant dans un élan de solidarité inventif et collectif. Certains organisent des rassemblements devant les magasins Home Depot et les taquerías. Les militants ont également repéré les hôtels de banlieue où séjournent les agents, comme à Downers Grove, et ont organisé des manifestations animées devant ceux-ci.
"Je vis ici depuis 28 ans et je ne me suis jamais senti aussi vulnérable que cette semaine", a récemment posté un habitant de Chicago. "Pas à cause des gangs, de la criminalité, des sans-abri, des toxicomanes ou des migrants. Je me sens menacé parce que des unités militarisées armées jusqu'aux dents sont stationnées dans les parkings des écoles de mon quartier et kidnappent mes voisins".
Les écoles publiques de Chicago (CPS) ne collaborent pas avec les agences fédérales d'immigration et ont récemment étendu leur dispositif de sécurité pour les élèves, ouvert 24 heures sur 24, avec une équipe dédiée au traitement des questions liées à la répression de l'ICE. Les CPS ont également mis en place un programme "Safe Passage" [passage sécurisé] qui propose aux élèves un accompagnement par des adultes sur le trajet entre chez eux et l'école. Plusieurs écoles ont mis en place un confinement partiel, empêchant les élèves de sortir pour déjeuner et supprimant les récréations.
De nombreux militants travaillent sous la direction de l'Illinois Coalition for Immigrant and Refugee Rights (Coalition de l'Illinois pour les droits des immigrants et des réfugiés), ou ICIRR, un groupe créé il y a plusieurs décennies. En collaboration avec d'autres groupes, comme Protect Rogers Park, l'ICIRR surveille et vérifie les opérations de l'ICE et organise des brigades de volontaires "d'intervention rapide" qui se déploient dans les zones sensibles où les agents de l'ICE pourraient tendre des embuscades.
Outre l'organisation de sessions de formation Zoom pour les bénévoles, ils ont élaboré un kit de réponse aux agissement de l'ICE constamment mis à jour - "un document vivant" - qui fournit aux membres de la communauté des outils pratiques pour surveiller, documenter et répondre aux interventions de l'ICE. Lorsque l'ICE est en intervention, certains bénévoles le suivent à pied, à vélo ou en voiture, en klaxonnant et en sifflant, créant ainsi un système d'alarme mobile afin d'alerter les voisins. Ils filment également les contacts avec les patrouilles de l'ICE. Les organisateurs soulignent l'importance des images directes qui documentent les pratiques et les arrestations anticonstitutionnelles.
CHICAGO, ILLINOIS - 18 OCTOBRE : Des manifestants à Butler Field dans Grant Park pour la marche "No Kings !" à Chicago, Illinois, États-Unis, le 18 octobre 2025. Des milliers de personnes pacifiques contre les politiques de l'administration Trump, notamment les arrestations de l'ICE et les mesures autoritaires, organisée par Indivisible Lincoln Square et le réseau No Kings. (Photo © Jacek Boczarski/Anadolu via gettyimages.com)
De petits sifflets bon marché sont ainsi devenus un moyen populaire d'alerter les gens des opérations de l'ICE. Des cafés aux bars, en passant par les sex-shops, des associations et des bénévoles ont distribué des milliers de sifflets dans toute la ville, en signe de solidarité. Des centaines de personnes ont également fabriqué des kits de sifflets lors de divers événements " Whistlemania". Ces kits comprennent des informations sur "Vos droits", des sifflets et un magazine contenant des instructions sur leur utilisation. D'autres ont distribué des affiches "Hands Off Chicago" à afficher aux fenêtres ou à porter lors de la manifestation "No Kings", qui a rassemblé 250 000 personnes le week-end dernier à Chicago.
"Je veux que les agents de l'ICE sachent qu'ils ne sont pas les bienvenus et qu'ils seront confrontés à de l'hostilité", a déclaré un bénévole. "Les agents de l'ICE ont signé pour cela : terroriser les gens, terroriser la communauté. Ils sont personnellement responsables. Ils sont la phalange de ce fléau".
77 millions d'Américains ont élu à la présidence un psychopathe raciste abject qui a annoncé des expulsions massives. Telle est désormais notre réalité : un gouvernement suprémaciste blanc qui justifie ses expulsions massives dans une guerre contre les villes américaines démocrates. Glorifiant la cruauté, la dépravation et la barbarie pour le plus grand plaisir de ses partisans républicains, Trump fait exécuter sommairement des gens de couleur sur des bateaux en mer, autorise des pratiques dignes de la Gestapo de l'ICE et fait disparaître les migrants arrêtés dans un goulag américain. Malgré un gouvernement paralysé par l'impasse budgétaire, les Démocrates semblent impuissants face au chaos engendré par ce président perturbé et mégalomane.
Le pouvoir autoritaire se nourrit du désespoir. Une fois que le désespoir a infecté notre esprit collectif, la répression s'exerce sans recours à la pression extérieure. Il n'est pas nécessaire de construire des prisons ou de distribuer des armes à feu si l'on peut convaincre la population que toute protestation est vaine. Le désespoir, ennemi intérieur, renforce le statu quo. La résistance démocratique se nourrit d'espoir. L'espoir s'incarne dans les 7 millions d'Américains qui ont envahi les rues pour protester contre la tyrannie lors des marches "No Kings", et dans la résistance acharnée des habitants de Chicago.
Traduit par Spirit of Free Speech
* Dan Dinello, professeur émérite au Columbia College de Chicago, est l'auteur de Children of Men, une analyse critique du chef-d'œuvre visionnaire de science-fiction dystopique d'Alfonso Cuarón. Parmi ses autres ouvrages, citons Finding Fela: My Strange Journey to Meet the AfroBeat King, un mémoire sur son voyage à Lagos, au Nigeria, en 1983, pour filmer la légende musicale africaine Fela Kuti, et Technophobia! Science Fiction Visions of Posthuman Technology. Dan gère le site web shockproductions.com et a également contribué à des chapitres d'ouvrages sur Avatar, Westworld, The Who, The Rolling Stones, Ridley Scott et Star Trek, entre autres. Il est un contributeur régulier d'Informed Comment.