Les militaires putschistes maliens annoncent la prochaine tenue d'élections, après l'arrestation du président Ibrahim Boubacar Keïta. Celui-ci a annoncé dans la nuit du 18 au 19 août sa démission sous la pression de l'armée.
Le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, arrêté en compagnie de son Premier ministre Boubou Cissé en fin d'après-midi du 18 août et emmené dans le camp militaire d'où était partie une mutinerie en début de journée, est apparu vers minuit, dans la nuit du 18 au 19 août, sur la télévision publique ORTM, portant un masque sur la bouche.
S'adressant d'une voix grave aux citoyens maliens et aux militaires de tout rang, il a remercié «le peuple malien pour son accompagnement au long de ces longues années» et a déclaré avoir œuvré depuis son élection en 2013 à redresser le pays et à «donner corps et vie» à l'armée malienne, confrontée depuis des années aux violences djihadistes.
Je voudrais en ce moment précis []... vous dire ma décision de quitter mes fonctions, toutes mes fonctions, à partir de ce moment
Puis il a évoqué les «manifestations diverses» qui depuis plusieurs mois ont réclamé son départ, faisant des victimes, estimant que «le pire en [avait] résulté», avant de dissoudre l'Assemblée nationale et le gouvernement.
«Si aujourd'hui il a plu à certains éléments de nos forces armées de conclure que cela devait se terminer par leur intervention, ai-je réellement le choix ? M'y soumettre, car je ne souhaite qu'aucun sang ne soit versé pour mon maintien aux affaires», a-t-il dit. Et d'ajouter : «C'est pourquoi je voudrais en ce moment précis, tout en remerciant le peuple malien de son accompagnement au long de ces longues années et la chaleur de son affection, vous dire ma décision de quitter mes fonctions, toutes mes fonctions, à partir de ce moment.»
Les mutins promettent une «transition politique civile» vers des élections
Plus de trois heures après l'annonce par le président Keïta, à l'issue d'une journée de mutinerie qui s'est transformée en coup d'Etat militaire, des hommes en uniformes sont apparus sur la chaîne publique ORTM.
«Nous, forces patriotiques regroupées au sein du Comité national pour le salut du peuple [CNSP], avons décidé de prendre nos responsabilités devant le peuple et devant l'histoire», a déclaré Ismaël Wagué, chef d'état-major adjoint de l'armée de l'air se présentant comme porte-parole des militaires mutins. «Notre pays, le Mali, sombre de jour en jour dans le chaos, l'anarchie et l'insécurité par la faute des hommes chargés de sa destinée», a accusé l'officier.
Il a dénoncé le «clientélisme politique» et «la gestion familiale des affaires de l'Etat», ainsi que la «gabegie, le vol et l'arbitraire», une justice «en déphasage avec les citoyens», une «éducation nationale qui patauge» ou encore des massacres de villageois, le «terrorisme et l'extrémisme». «La société civile et les mouvements socio-politiques sont invités à nous rejoindre pour, ensemble, créer les meilleures conditions d'une transition politique civile conduisant à des élections générales crédibles pour l'exercice démocratique à travers une feuille de route qui jettera les bases d'un Mali nouveau», a ajouté le colonel-major.
Ismaël Wagué a tenté de rassurer la communauté internationale quant aux intentions des militaires en révolte. Dans cette démarche, il a demandé aux organisations internationales et régionales de les «accompagner pour le bien-être du Mali».
Il a également affirmé que la mission de l'ONU Minusma, la force anti-djihadiste française Barkhane, le G5 Sahel qui regroupe cinq pays de la région, et la force Takuba, groupement de forces spéciales européennes censées accompagner les Maliens au combat, demeuraient leurs partenaires. «Tous les accords passés» seront respectés, a-t-il déclaré, en affirmant que les militaires étaient «attachés au processus d'Alger», l'accord de paix signé en 2015 entre Bamako et les groupes armés du nord du pays.
Enfin, les militaires en révolte ont affirmé vouloir mettre en place une «transition politique civile» devant conduire à des élections générales dans un «délai raisonnable». Et ce, afin de «permettre au Mali de se doter d'institutions fortes», selon Ismaël Wagué.
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